La clause de solidarité dans les baux commerciaux

La clause de solidarité dans les baux commerciaux

Les baux commerciaux incluent fréquemment des clauses permettant de protéger le bailleur contre des impayés du locataire. On notera, par exemple, que dans la pratique la très grande majorité des baux commerciaux comportent une clause résolutoire permettant de mettre fin au contrat de bail en cas de non-paiement du loyer . De même, il est courant que le bail comporte une clause d’agrément permettant au bailleur d’avoir un droit de regard dans le cas où le locataire souhaite céder son droit au bail.

Cet article se concentre plus particulièrement sur la clause de solidarité. Cette clause oblige le locataire qui cède son droit au bail à un autre professionnel d’être garant des dettes locatives de ce dernier. On pourra aussi trouver des clauses de solidarité dites « inversées » lorsque le cessionnaire devra être garant du cédant (pour en savoir plus sur la clause de solidarité inversée voir l’article « La clause de solidarité inversée dans un bail commercial depuis la loi PACTE »).

Cette clause de solidarité est très utile pour le bailleur, qui n’ayant pu choisir son nouveau co-contractant, va pouvoir exiger à son contractant initial ce qui lui est dû en cas de défaillance du nouveau locataire. Cette clause de solidarité, par son effet, place alors l’ancien locataire dans une situation périlleuse. C’est pour cette raison que la loi dite Pinel (n°2014-626), du 18 juin 2014 relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, est venue encadrer ces clauses de solidarité dans leur durée et leur exercice.

Les clauses de solidarité avant et après la loi Pinel

Avant la loi Pinel, aucune disposition n’était venue encadrer les clauses de solidarité dans les baux commerciaux, de telle sorte que si un locataire cédait son droit au bail, alors ce dernier pouvait être responsable de l’intégralité des impayés du nouveau preneur, et ce,  pendant toute la durée du bail. Pour illustration, si un preneur cédait son droit au bail un an après la conclusion du bail commercial d’une durée classique de neuf ans, alors le preneur initial pouvait être solidaire du paiement des loyers du nouveau preneur pendant encore huit ans, et même au-delà en cas de prolongation tacite de celui-ci.

La loi Pinel est donc venue limiter la durée de cette garantie à trois ans à compter de la cession du bail, en créant l’article L. 145-16-2 du Code de commerce. La loi Pinel a également encadré l’exercice de la garantie, puisque, pour se prévaloir de cette clause de solidarité, le bailleur doit désormais « informe[r] le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci » en vertu de l’article L 145-16-1 du Code de commerce.

Une question naturelle se pose donc : ces dispositions s’appliquent-elles à des contrats conclus avant la loi Pinel et toujours en cours à ce jour ? S’appliquent-elles seulement aux baux commerciaux conclus après l’entrée en vigueur de cette loi ?

Les difficultés tendant à l’application dans le temps des dispositions de la loi Pinel

La troisième chambre civile de la Cour de cassation a répondu en partie à cette question d’application de la loi Pinel dans le temps vis-à-vis des clauses de solidarité des baux commerciaux dans un arrêt du 11 avril 2019 (n° 18-16.121).

Il avait notamment été demandé aux juges du cinq quai de l’horloge si l’article L 145-16-2 du Code de commerce précité revêtait un caractère d’ordre public. Sur cette question, les juges avaient répondu positivement, venant ainsi élargir le domaine de l’ordre public dans les baux commerciaux. Cela signifie que le texte n’est pas supplétif de volonté, et que dès lors, tout bail commercial conclu après la loi Pinel ne pourra écarter cette disposition.

Cependant, ce n’est pas parce qu’une disposition est qualifiée d’ordre public qu’elle est immédiatement applicable à tous les contrats en cours. En effet, pour cela, il faut qu’un motif impérieux d’intérêt général soit justifié pour venir bouleverser un contrat légalement formé. Les juges de la Cour de cassation n’ont cependant pas reconnu un tel motif.

Le demandeur à l’instance (le cédant) a cependant cherché un autre fondement issu de la jurisprudence, car le principe de la non-application de la loi nouvelle aux contrats en cours comporte quelques exceptions. L’une d’entre elles est la théorie de l’effet légal du contrat. Ce principe civiliste issu de l’arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation en date du 8 février 1989 (n° 87-18.046) précise alors que « la loi nouvelle régit immédiatement les effets des situations juridiques non définitivement réalisées ayant pris naissance, avant son entrée en vigueur, non en vertu du contrat, mais en raison des seules dispositions légales alors applicables ». Néanmoins, concernant les dispositions de l’article L 145-16-2 du Code de commerce, la Cour de cassation n’a pas reconnu l’application de cette théorie. Elle précise en effet que « la garantie solidaire […] ne constitue pas un effet légal du contrat mais demeure régie par la volonté des parties ».

En conclusion, la nouvelle disposition de la loi Pinel, relative à la durée de la clause de solidarité n’est pas applicable aux baux conclus avant cette loi.

Qu’en est-il de l’article L. 145-16-1 du Code de commerce ? Cet article vient encadrer l’exercice de la garantie, puisque le bailleur est tenu d’informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle le loyer aurait dû être payé. A défaut, le bailleur perd la garantie de la clause de solidarité. Est-ce que cet article sera appliqué selon les mêmes modalités que l’article L 145-16-2 du Code de Commerce ? La Cour de cassation n’a pas tranché ce point, ainsi, la question reste en suspens, mais tout laisse à penser que la Cour de cassation appliquera sa jurisprudence de l’arrêt du 11 avril 2019 18-16.121.

La clause de solidarité dans les baux commerciaux

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Maître Margaux Cabanes, collaboratrice dans le département Droit des Affaires dirigé par Maître Baptiste Robelin avec la participation écrite de Faustine GERARD, stagiaire chez NovLaw Avocats.

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