Quels sont les pouvoirs du maire pour faire face aux constructions illégales

Quels sont les pouvoirs du maire pour faire face aux constructions illégales ?

Qu’est-ce qu’une construction illégale ?

Une construction est un ouvrage fixe et pérenne, comportant ou non des fondations et générant un espace utilisable par l’Homme en sous-sol ou en surface (cf. Lexique national d’urbanisme).

Un bâtiment, une route, un réseau d’électricité, un ouvrage public, sont par exemple des constructions.

Pour pouvoir réaliser une construction, toutes les règles d’urbanisme applicables doivent être respectées.

Ces règles sont notamment contenues dans le Code de l’Urbanisme ainsi que dans les documents locaux d’urbanisme, et notamment, le Plan Local d’Urbanisme (Vous pouvez lire notre article sur les règles d’urbanisme).

L’ensemble de ces règles ont pour but d’encadrer l’utilisation et l’occupation du sol par la réalisation de construction.

Pour pouvoir construire, il faut d’abord obtenir une autorisation d’urbanisme (un permis de construire sur le fondement de l’article L 421-1 du code de l’urbanisme) ou déposer une déclaration préalable.

Ainsi, une construction est considérée comme étant illégale si elle est réalisée sans autorisation d’urbanisme et en violation de ces règles.

À quoi correspond une autorisation d’urbanisme ?

L’autorisation d’urbanisme est un arrêté délivré par l’autorité administrative compétente (maire ou le Préfet) autorisant la réalisation de votre construction.

À ne pas confondre avec les certificats d’urbanisme lesquels servent à vous informer sur les règles d’urbanisme applicables pour envisager la possibilité de réaliser votre projet.

Cette autorisation d’urbanisme reprend toutes les informations propres à votre projet (adresse postale, références cadastrales, surface de plancher de la construction etc.) ainsi que les limites légales et règlementaires que votre construction devra respecter une fois achevée.

Une fois qu’elle est édictée, elle a un caractère obligatoire puisque cette autorisation doit être scrupuleusement respectée par la personne qui en est bénéficiaire.

Ainsi, toute construction réalisée sans autorisation d’urbanisme ou ne respectant pas celle qui a été édictée, est illégale.

L’autorisation d’urbanisme en vue de construire peut prendre plusieurs formes (celle du permis de construire ou de la non-opposition à une déclaration préalable).

Dans certains cas bien précis, il n’est pas nécessaire d’obtenir une autorisation d’urbanisme.

Cependant, cela ne concerne que les cas dans lesquels votre construction est de très faible importance ou temporaire. Ces hypothèses sont clairement à définies par la loi (article L 421-5 du code de l’urbanisme).

Le permis de construire

Par principe, l’obtention d’un permis de construire est la première étape lorsqu’une construction nouvelle d’une surface de plancher ou d’une emprise au sol supérieure à 20 m² (ou 40 m² en zone urbaine) est envisagée. Ce permis de construire concerne l’acte administratif délivré par l’autorité compétente.

Par conséquent, la réalisation de travaux en l’absence de ce permis de construire peut être constitutive d’une infraction pénale (article L480-4 du code de l’urbanisme).

La responsabilité des bénéficiaires du projet, des architectes, des entrepreneurs ou de toute autre personne responsable des travaux peut donc être engagée.

Pour connaitre les recours possibles en urbanisme à l’encontre d’un projet de construction consultez notre article : “Comment obtenir l’annulation d’un permis de construire ?”

La déclaration préalable

Pour certains projets de construction bien spécifiques et prévus par la loi, l’autorisation d’urbanisme ne prendra pas la forme d’un permis de construire. C’est le cas par exemple, pour la construction d’une véranda quand son emprise au sol et sa surface de plancher sont inférieures à 40 m².

Il s’agira alors de suivre une procédure administrative simplifiée.

En effet, il peut s’agir d’un dépôt d’une déclaration préalable de travaux.

Seront essentiellement concernées, les constructions de faible envergure (article R421-9 du code de l’urbanisme).

Désormais, le dépôt de cette déclaration peut se faire en ligne et l’instruction de votre demande est obligatoirement dématérialisée pour les Communes de plus de 3 500 habitants.

De manière très récente, l’Etat a mis en place un service d’assistance pour accompagner les pétitionnaires à déposer leurs demandes d’autorisation d’urbanisme accessible ici.


Existe-t-il un délai de prescription en matière de constructions illicites ?

Oui. Toute construction illégale engage la responsabilité de son bénéficiaire durant une période dite de “délai de prescription”.

L’achèvement des travaux constitue le point de commencement de ce délai. Toutefois dans le cadre d’une construction illégale la date de fin de travaux peut s’avérer complexe à déterminer.

Pour déterminer le point de départ du délai de prescription, il faut rechercher, selon le juge pénal, la date à laquelle l’ouvrage était en état d’être affecté à l’usage auquel il était destiné (Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 25 juin 2019, 18-83.843).

La détermination de cette date, peut se faire sur la base d’indices tels que des factures, des photographies aériennes de la construction etc. (Cour administrative d’appel de Versailles, 2ème Chambre, du 21 avril 2005, 02VE03315)

Une fois ce délai arrivé à terme, l’introduction d’une action en justice (civile ou pénale) contre l’auteur de la construction illicite n’est plus possible.

En matière pénale, la prescription est acquise après 6 années (article 8 code de procédure pénale). Cela signifie, qu’à compter de la fin des travaux et pendant les 6 années qui suivront, le risque d’une condamnation pénale pour une remise en état des lieux ou d’une amende subsiste.

  • En matière civile, la prescription varie en fonction de l’auteur du recours contre la construction illégale :

→ Pour les tiers qui souhaiteraient obtenir la réparation d’un préjudice causé par une construction, ils peuvent saisir la juridiction civile jusqu’à 5 ans après la fin des travaux (article 2224 du code civil).

→ Pour la Commune, son action devant la justice civile se prescrit au bout de 10 ans après l’achèvement des travaux pour solliciter la démolition ou la mise en conformité de l’ouvrage illégalement édifié (article L480-14 du code de l’urbanisme).

  • Enfin, en matière administrative, le délai de prescription renvoie à une période durant laquelle la mairie peut refuser de vous délivrer une autorisation d’urbanisme pour des travaux sur une construction déjà existante. Cette période est de 10 ans ( article L421-9 du code de l’urbanisme).


Est-il envisageable de régulariser une construction illégale ?

Oui, il est possible de régulariser une construction illégale, notamment si la construction achevée n’est pas conforme au permis de construire délivré ou à la non-opposition à la déclaration préalable que vous avez déposée (articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme).

Cette demande de régularisation doit porter sur l’ensemble des modifications de la construction par rapport au projet initial et respecter les règles d’urbanisme au moment de la délivrance de ce permis de construire de régularisation (CE, 25 novembre 2020, n° 429623).

Depuis le 1er janvier 2025, l’Etat a publié un nouveau document CERFA n° 16700-01 destiné à déclarer une modification d’une autorisation d’urbanisme en cours de validité ou à solliciter la régularisation d’une autorisation initiale.

En matière d’autorisation de régularisation, plusieurs hypothèses se posent en fonction de l’achèvement ou non de la construction.

En effet, il faut rappeler que votre construction ne peut être considérée comme officiellement terminée seulement à compter du jour où vous avez déposé votre Déclaration Attestant l’Achèvement et la Conformité des Travaux (DAACT) en mairie.

  • Hypothèse n° 1 : La construction est achevée et mais rien n’a été déclaré par le bénéficiaire

Les démarches de régularisation seront essentiellement identiques à celles prévues pour obtenir une autorisation de travaux :

Vous pouvez les consulter directement sur le site Géoportail de l’Urbanisme.

Si ce n’est pas le cas, vous devez mettre en conformité votre construction

Cependant, certaines constructions sont catégoriquement interdites par les règles d’urbanisme notamment celles situées dans des zones inconstructibles répertoriées sur le règlement graphique du plan local d’urbanisme ou du plan de prévention des risques naturels font par exemple.

    • Ensuite, il faudra déposer une demande d’autorisation de construire auprès de la mairie par voie dématérialisée.

Votre demande devra indiquer qu’elle porte sur une régularisation de travaux.

De plus, l’autorisation demandée devra être adaptée à la construction projetée. C’est-à-dire qu’en fonction de la nature de la construction, il s’agira de déposer soit une demande de permis de construire, soit une déclaration préalable.

  • Hypothèse n° 2 : La construction est achevée, mais elle ne correspond pas à ce qui a été déclaré dans l’autorisation d’urbanisme qui vous a été délivrée

Dans cette hypothèse, il faudra déposer une nouvelle demande d’autorisation d’urbanisme (permis de construire ou déclaration préalable) pour régulariser la situation.

Cette nouvelle demande reste soumise à une instruction par les services de votre Commune en fonction des règles d’urbanisme applicables.

  • Hypothèse n° 3 : La construction n’est pas achevée (DAACT non déposée) et elle ne correspond pas à ce qui est déclaré dans l’autorisation d’urbanisme initiale (permis de construire ou non-opposition à une déclaration préalable)

Il est recommandé de ne pas poursuivre les travaux.

    • Dans le cas où les travaux ont été réalisés dans le cadre d’un permis de construire, une demande de permis de construire modificatif peut être déposée pour régulariser cette construction.

Toutefois, cette autorisation d’urbanisme n’a de chances d’être délivrée que si les modifications envisagées n’apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même (CE, 26 juillet 2022, n° 437765).

Ceci est notamment le cas par exemple, pour des modifications portant sur la taille d’une fenêtre ou la couleur de l’enduit.

En effet, si les différences avec le permis de construire initial sont importantes (augmentation ou diminution significative de la hauteur, de la surface de plancher ou du volume etc.), la construction peut devoir faire l’objet d’une régularisation par l’octroi d’un nouveau permis de construire.

    • Dans le cas où les travaux sont réalisés dans le cadre d’une déclaration préalable : il s’agira tout d’abord de modifier votre construction pour la rendre conforme à la déclaration.

Il est également possible de demander de modifier une autorisation de non-opposition à une déclaration préalable en cours de validité ou de régulariser votre situation en remplissant le document CERFA n° 16700-01 accessible ici.

Si ces modifications sont inenvisageables alors vous serez contraint de déposer une nouvelle déclaration préalable de travaux.

Néanmoins, si la construction réalisée est de plus grande ampleur que le projet initialement prévu, il est possible que vous soyez contraint de déposer une demande de permis de construire pour régulariser la situation.

Ces hypothèses nécessitent une analyse juridique préalable pour évaluer les enjeux et les contraintes qui peuvent survenir.

Célie MENDEZ, Avocate associée chez Novlaw Avocats vous accompagne dans vos démarches en urbanisme.


Quels sont les moyens d’action dont dispose le maire face aux constructions illégales ?

Tout comme les officiers et agents de police judiciaire, le maire peut constater toute infraction aux règles d’urbanisme sur le territoire de sa commune (article L480-1 du code de l’urbanisme)

En ce sens, il peut aussi réceptionner les plaintes des particuliers à l’encontre de constructions illégales.

Ces plaintes peuvent donner lieu à une visiter sur le site et le cas échéant, à un procès-verbal d’infraction transmis au procureur de la République, si l’infraction pénale est avérée (article L480-1 du code de l’urbanisme).

Seul le Ministère public peut décider ou non d’engager des poursuites pénales devant le juge judiciaire.

Toutefois, tant que l’autorité judiciaire n’a pas rendu de décision, le maire conserve ses pouvoirs de police administrative.

Ainsi, le maire peut décider, de façon autonome, de prendre certaines mesures administratives pour faire cesser l’infraction constatée :

Cette mise en demeure viser à ordonner la mise conformité de la construction avec l’autorisation d’urbanisme délivrée.

Plus encore, la mise en demeure peut également ordonner au bénéficiaire des travaux de procéder à une démarche de régularisation en déposant un permis de construire ou une déclaration préalable.

Si la mise en demeure n’a pas donné lieu à une régularisation de la part du responsable de la construction illicite, le maire peut lui ordonner de consigner un montant équivalent au coût des travaux à réaliser.

Cette somme d’argent sera restituée au fur et à mesure si le responsable exécute les mesures prévues par la mise en demeure dont il a fait l’objet.

    • Le maire peut aussi assortir sa mise en demeure, d’une astreinte dont la durée ne peut excéder un an. Le montant de cette astreinte est compris ne peut être supérieur à la somme de 500 € par jour et le montant total des sommes résultant de l’astreinte ne peut excéder 25 000 € (article L481-1 du code de l’urbanisme).
    • Enfin, s’il n’existe aucun moyen technique permettant de régulariser les travaux entrepris ou exécutés, en conformité avec les règles d’urbanisme, le maire peut procéder à la démolition complète des installations qui présentent un risque certain pour la sécurité ou pour la santé, aux frais de l’intéressé (CE, 22 décembre 2022, n° 463331).

Cependant, cette démolition doit avoir été préalablement autorisée par un jugement du président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond.

Laurent Bidault Avocat - Novlaw Avocats

Cet article a été écrit par Célie Mendez Avocate Associée chez Novlaw Avocats  intervient principalement en droit de l’urbanisme

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