Bail commercial et procédure collective
Que devient le bail commercial en cas de procédure collective  ?

Qu’est-ce qu’une procédure collective pour le locataire d’un bail commercial  ?

Une procédure collective est une procédure spécifique s’appliquant aux entreprises en difficulté. Les procédures collectives sont destinées à organiser le règlement des créanciers impayés sous le contrôle du tribunal, et à assurer le redressement de l’entreprise en difficulté lorsque cela est possible.

Il existe plusieurs types de procédures collectives  :

  • La sauvegarde judiciaire : c’est la procédure qui s’applique lorsque le débiteur n’est pas en état de cessation de paiements, mais qu’il rencontre des difficultés qu’il n’est pas en mesure de surmonter. La procédure est essentiellement destinée à assurer le redressement de l’entreprise, en l’aidant notamment à restructurer ses dettes.

  • Le redressement judiciaire  : c’est la procédure qui s’applique lorsque le débiteur est en état de cessation de paiements, c’est-à-dire dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Le but de la procédure est de permettre le redressement de l’entreprise. Il arrive parfois que le redressement passe par un plan de cession de l’entreprise en difficulté : c’est dans ce cadre qu’il peut être possible pour un repreneur de racheter un fonds de commerce en redressement judiciaire (on parle de « vente à la barre du tribunal », et parfois improprement de « vente aux enchères du tribunal »).

  • La liquidation judiciaire de l’entreprise : c’est la procédure qui s’applique lorsque le débiteur est en état de cessation des paiements et que le redressement judiciaire est manifestement impossible. L’objectif de la procédure est de réaliser la vente des actifs du débiteur pour tenter de désintéresser les créanciers. C’est en ce sens que l’on parle souvent de « vente aux enchères de fonds de commerce ».

Que se passe-t-il pour le bail commercial en cas de procédure collective  ? 

L’ouverture d’une procédure collective à l’encontre d’un commerçant entraîne trois situations possibles pour le bail commercial : en principe, le bail se poursuit. Il peut toutefois arriver que le bail soit résilié, soit à la demande du bailleur, soit à la demande de l’administrateur judiciaire.

Le bail commercial est-il résilié en cas d’ouverture d’une procédure collective  ?

En cas d’ouverture d’une procédure collective, le bail commercial se poursuit. Ce principe s’applique d’ailleurs à l’ensemble des contrats en cours, qui se poursuivent de plein droit. Ceci est nécessaire pour assurer la continuité de l’activité de l’entreprise  : à défaut, le redressement serait impossible si toute l’activité s’arrêtait. Et sur ce point, le bail commercial est un élément essentiel du fonds de commerce. Il est donc indispensable qu’il n’y ait pas de résiliation anticipée du bail commercial en cas de procédure collective.

Peut-on empêcher le bail commercial de continuer pendant la procédure collective ?

Le principe de la continuité des contrats en cours, notamment du bail commercial, est une règle d’ordre public : aucune clause du bail ne peut y déroger en prévoyant le contraire. Il est donc impossible de résilier le bail commercial en cas de procédure collective, sauf si le locataire ne paye pas ses loyers postérieurs à l’ouverture de la procédure collective, ou si l’administrateur considère que le bail commercial n’est pas utile à l’entreprise.
En ce cas, l’administrateur peut décider de résilier le bail commercial de manière anticipée, sans que le bailleur ne puisse s’y opposer.

Que se passe-t-il pour les loyers impayés avant l’ouverture de la procédure collective  ?

Le fait qu’il existe des arriérés de loyer impayé avant l’ouverture de la procédure collective ne remet pas en cause la règle d’ordre public  : le bail commercial se poursuit même après l’ouverture de la procédure collective.

Le bailleur devra donc déclarer sa créance de loyers impayés dans le cadre de la procédure collective  : comme tout créancier, le bailleur devra déclarer sa créance dans un délai de deux mois maximum à compter de la publication du jugement d’ouverture au BODACC. A défaut, il serait forclos (et devrait éventuellement faire une action en relevé de forclusion).

Attention en revanche  : les loyers postérieurs à l’ouverture de la procédure collective doivent être payés par le locataire.
Cette règle n’est pas sans conséquence sur les organes de la procédure : ainsi l’administrateur ou le liquidateur ayant exigé la poursuite du bail commercial peuvent voir leur responsabilité engagée s’il apparaît que l’entreprise n’est pas en mesure de payer les loyers postérieurs à la procédure.
L’administrateur comme le liquidateur doit ainsi s’assurer que le preneur dont le bail est poursuivi dispose des fonds nécessaires (selon les documents prévisionnels fournis) pour payer les loyers.

Le bailleur peut-il demander la résiliation du bail de cas de procédure collective du locataire  ?

Le bail commercial se poursuit automatiquement après l’ouverture de la procédure collective.

Le preneur doit donc continuer à payer les loyers et charges postérieurement à l’ouverture de la procédure, à leur échéance.

Le bailleur pourra demander la résolution judiciaire du bail si le locataire ne peut honorer ses obligations en vertu du bail. Cette demande ne peut toutefois intervenir avant l’expiration d’un délai de trois mois à compter du jugement d’ouverture de la procédure collective. Le locataire disposera donc quoiqu’il arrive d’un délai de 3 mois supplémentaire pour s’acquitter d’une dette locative née postérieurement à l’ouverture de la procédure collective.

Le bailleur souhaitant résilier le bail commercial pour défaut de paiement des loyers postérieurs à au redressement ou à la liquidation judiciaire, devra délivrer un commandement de payer par huissier de justice.

Cette action entraîne la mise en cause de l’administrateur ou du liquidateur ayant autorisé la poursuite du bail et du locataire. Dans ce contexte, les organes de la procédure pourront solliciter un délai de grâce devant le tribunal.

Le sort du bail commercial dans une procédure collective

L’administrateur judiciaire peut-il décider de résilier le bail commercial  ?

L’administrateur judiciaire ou le liquidateur judiciaire peuvent décider à tout moment après l’ouverture de la procédure de résilier de manière anticipée le bail commercial, et ce, même si l’entreprise dispose des fonds nécessaires pour continuer à payer ses loyers (pour des raisons de difficultés de cession du fonds de commerce au regard de la spécialité de ce dernier, de l’emplacement…).

Ce sera généralement le cas si l’entreprise dispose de plusieurs locaux commerciaux dont certains sont situés à des emplacements déficitaires (car l’emplacement du local est mauvais par exemple).

Dans ce cas, le bail est résilié au jour de sa notification auprès du bailleur.

Cette résiliation du bail à l’initiative des organes de la procédure collective peut ouvrir droit à des dommages et intérêts à l’égard du bailleur. Ce dernier doit alors procéder à une déclaration de créances au passif de la société dans le délai d’un mois à compter de la réception de la notification de la résiliation du bail, du montant estimé des dommages et intérêts.

Est-il possible de céder le bail commercial dans le cadre d’une procédure collective  ?

Le but de la procédure collective est d’assurer le redressement de l’entreprise lorsque cela est possible, tout en désintéressant au maximum les créanciers.
Or il arrive parfois que le redressement de l’entreprise passe par une cession forcée du fonds de commerce : ce sera notamment le cas si on estime que le dirigeant actuel n’est pas en mesure d’assurer le redressement et qu’il est de l’intérêt de l’entreprise de la céder, pour permettre son redressement entre les mains d’un repreneur. En ce cas, le plan de cession survient alors que l’activité de l’entreprise continue.

Si le redressement de l’entreprise est impossible, il faudra la liquider. Dans cette hypothèse, le fonds de commerce sera vendu en liquidation judiciaire. C’est en ce sens que l’on parle parfois de vente aux enchères de fonds de commerce.

Peut-on racheter une entreprise en redressement judiciaire  ?

Il est possible de racheter une entreprise en redressement judiciaire, dès lors que le tribunal a adopté un plan de cession. L’entreprise en redressement judiciaire est alors à vendre.

En réalité, toute entreprise qui tombe en redressement judiciaire est officiellement à vendre, car tout intéressé peut faire une offre de reprise. Mais en droit, la vente de l’entreprise est toujours subsidiaire au plan de cession : aussi la vente n’interviendra que si l’adoption d’un plan de redressement est impossible.

Le candidat repreneur qui souhaite racheter une entreprise en redressement judiciaire doit garder à l’esprit les objectifs prévus par le Code de commerce  :

  • Maintien de l’activité ;
  • Maintien des emplois attachés ;
  • Apurement du passif

Aussi, le candidat repreneur qui sera désigné par le tribunal ne sera pas forcément le mieux-disant en termes de prix, mais celui qui propose au tribunal le meilleur « projet » ; qui dispose du meilleur business plan pour assurer une reprise du fonds de commerce, et conserver le maximum d’emplois.

L’offre de reprise doit répondre aux indications prévues à l’article L.642-2 du Code de commerce et contenir des garanties de paiement. L’offre du repreneur doit ainsi comporter la liste des contrats inclus, et viser en particulier le bail commercial, s’il entend le reprendre.

Dans le cadre de la cession du bail commercial lors d’un redressement judiciaire, certaines clauses sont inapplicables à la procédure. Il est par exemple fréquent que le bail commercial contienne une clause stipulant que l’agrément du bailleur est nécessaire en cas de cession du bail commercial : cette clause ne s’appliquera pas, et le bailleur se verra ainsi en quelque sorte « imposer » un repreneur.
De manière générale, toutes les clauses restrictives à la cession sont privées d’effet dans une cession en redressement judiciaire, y compris le droit de préemption des communes.

Enfin, depuis la loi Pacte, les clauses de solidarité inversée sont également inapplicables en cas de cession du bail commercial en redressement judiciaire : le bailleur ne pourra donc pas espérer récupérer les arriérés de loyers accumulés, qu’il s’agisse de passif antérieur ou postérieur à l’ouverture de la procédure collective.

Est-il possible de racheter un bail commercial en liquidation judiciaire  ?

Lorsque le tribunal ordonne la liquidation judiciaire d’une entreprise, c’est qu’il estime que son redressement est manifestement impossible. Il convient donc d’arrêter immédiatement l’activité, afin de vendre les actifs de l’entreprise pour tenter de payer les créanciers impayés. Les actifs de l’entreprise doivent donc être vendus par le liquidateur. C’est en ce sens que l’on parle parfois de vente aux enchères de fonds de commerce.

Cette cession de l’entreprise en liquidation judiciaire sera l’occasion pour toute personne intéressée de se porter acquéreur soit du fonds de commerce global, soit de certains actifs isolés. On peut ainsi racheter pratiquement tous les actifs d’une société en liquidation judiciaire : des voitures, du matériel de cuisines, des tables et chaises de restaurant, etc. et bien sûr, le bail commercial.

Le bail cédé en liquidation peut être cédé avec l’ensemble du fonds de commerce, ou bien isolément.

À la différence du plan de cession dans le cadre d’un redressement judiciaire, l’ensemble des clauses du bail s’applique en cas de cession du bail en liquidation judiciaire. Par conséquent, les clauses relatives à un droit de préférence, l’agrément du bailleur ou le droit de préemption de la commune doivent être respectées.

Dans ce cadre, le bailleur est en droit d’exiger le respect du principe de spécialité de la destination prévue au bail commercial.

Surtout, si le bail renferme une clause de solidarité inversée (clause qui prévoit que le cessionnaire est garant du cédant, ou que tous les cédants sont solidairement responsables entre eux) le repreneur du bail devra supporter les éventuels arriérés de loyers. Ainsi, les personnes intéressées par la reprise d’un fonds de commerce en liquidation judiciaire doivent absolument vérifier si le bail commercial contient une clause de solidarité inversée  : en ce cas, le repreneur du bail commercial sera tenu de payer les arriérés locatifs dus par l’entreprise en difficulté.

Vous envisagez de reprendre une entreprise en difficulté  ? N’hésitez pas à nous demander conseil.

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