C'est quoi une prime d'arrivée ou prime d'embauche ?

C’est quoi une prime d’arrivée ou prime d’embauche ?

Une prime d’arrivée prévoyant un remboursement en cas de démission est-elle licite ?

Dans certains secteurs très compétitifs (par exemple, dans la finance, la tech, etc.) ou pour des profils atypiques, le recrutement des talents peut-être source de grandes difficultés.

Ainsi, il n’est pas rare que les employeurs, dans ces situations, rusent d’ingéniosité pour attirer/fidéliser les talents et recourent notamment à ce qu’on appelle la prime d’arrivée/d’embauche, de bienvenue ou encore bonus d’arrivée (« welcome bonus »).

Si le recours à ces primes n’est pas nouveau, un arrêt récent de la Cour de cassation du 11 mai 2023 (n° 21-25.136 FS-B) est venu, pour la première fois, valider cette pratique et en préciser le contour.

Le cabinet NovLaw Avocats, et plus particulièrement Maître Aurélie MOINE, spécialisée en droit du travail, décryptent cet arrêt et reviennent sur les conditions de mise en œuvre de ces clauses.

LIBERTE CONTRACTUELLE DE L’EMPLOYEUR VS LIBERTE DE TRAVAIL DU SALARIE

L’employeur a tout à fait le droit de subordonner l’octroi d’une prime à certaines conditions. Toutefois, cette liberté n’est pas sans limite.

En effet, l’employeur doit veiller, lorsqu’il fixe ces conditions, à ne pas enfreindre les libertés et droits fondamentaux des salariés.

Parmi ces libertés et droits fondamentaux figure notamment celle de la liberté du travail du salarié. Or, quand le coût de la démission pour le salarié devient trop onéreux, cela peut avoir pour effet de porter atteinte à sa liberté de quitter ou non son poste.

L’arrêt du 11 mai dernier est particulièrement intéressant car il répond, pour la première fois, à cette question en ce qui concerne les primes d’arrivée.

Une prime d’arrivée prévue contractuellement, et subordonnée à une condition de présence du salarié dans l’entreprise pendant une certaine durée après son versement, est-elle licite ?

Ces primes d’arrivée sont, en effet, le plus souvent subordonnées à la condition que le salarié ne démissionne pas durant une certaine période, et on comprend bien pourquoi. L’employeur ne veut pas payer un gros bonus d’arrivée pour voir le salarié démissionner quelques semaines après. C’est pourquoi ces primes d’arrivée prévoient quasi systématiquement une obligation de remboursement partiel si le salarié décide de démissionner de manière anticipée.

Mais, est-ce que cette obligation de remboursement ne contrevient pas à la liberté de démissionner du salarié ? C’est la question à laquelle la Cour de cassation a répondu.

FOCUS SUR LES FAITS : UNE DEMANDE DE REMBOURSEMENT ATTEIGNANT PRES DE 80.000 EUROS

En l’espèce, le salarié avait été engagé en tant qu’opérateur sur les marchés financiers (à savoir, « trader ») à compter du 1er janvier 2016.

Il était convenu dans son contrat de travail qu’il bénéficierait d’une prime d’arrivée à hauteur de 150.000 euros, versée au cours du premier mois suivant son embauche.  La condition au paiement intégral de cette prime était qu’il reste pendant 3 ans au sein de la société. Cette clause prévoyait donc qu’en cas de démission de sa part avant la fin de cette période, il devrait rembourser le prorata de la prime reçue.

L’intéressé a démissionné le 16 mars 2017 (soit moins d’un an et demi), et a refusé de rembourser à la société le prorata de la prime.

La société a alors saisi la juridiction prud’homale afin d’en obtenir le remboursement.

Dans un premier temps, les juges du fond ont donné gain de cause au salarié et ont invalidé la clause de remboursement en considérant que le coût particulièrement élevé du remboursement de la prime (à savoir environ 80.000 euros) par le salarié portait atteinte à sa liberté de travail.

Leur raisonnement suivait celui déjà bien établi de la prime de fin d’année. En effet, dans un arrêt du 18 avril 2000 (Cass.soc., 18 avril 2000, n°97-44.235 PB), la Cour de cassation avait retenu que l’employeur ne pouvait conditionner le maintien du droit à une prime de fin d’année à la présence de ce salarié dans l’entreprise au 30 juin de l’année suivant son versement, et déduire le montant de la prime du solde de tout compte du salarié qui avait démissionné avant cette date. Cela portait atteinte à la liberté de travail du salarié et constituait une sanction pécuniaire illicite.

Mais la Cour de cassation a censuré ce raisonnement en précisant que la prime d’arrivée a un objet différent de la prime de fin d’année.

RECONNAISSANCE PAR LA COUR DE CASSATION DE LA LICÉITÉ DES CLAUSES DE REMBOURSEMENT

Censurant la Cour d’appel, la chambre sociale de la Cour de cassation a validé la pratique de la prime d’arrivée avec clause de remboursement.

Elle a ainsi jugé que « la clause convenue entre les parties, dont l’objet est de fidéliser le salarié dont l’employeur souhaite s’assurer la collaboration dans la durée, peut, sans porter une atteinte injustifiée et disproportionnée à la liberté du travail, subordonner l’acquisition de l’intégralité d’une prime d’arrivée, indépendante de la rémunération de l’activité du salarié, à une condition de présence de ce dernier dans l’entreprise pendant une certaine durée après son versement et prévoir le remboursement de la prime au prorata du temps que le salarié, en raison de sa démission, n’aura pas passé dans l’entreprise avant l’échéance prévue ».

Autrement dit, les primes d’arrivée peuvent être subordonnées à la présence du salarié dans la société pendant une certaine période. Dans l’affaire discutée, l’employeur était donc fondé à demander le remboursement de la partie de la prime pour la période non respectée par le salarié au regard de la clause.

PRÉCISION DE LA COUR DE CASSATION : LA PRIME DOIT ETRE INDEPENDANTE DE LA RÉMUNÉRATION DE L’ACTIVITÉ DU SALARIE

Il est important de noter que la Cour de cassation a précisé que la prime en question était « indépendante de la rémunération de l’activité du salarié ».

Si la prime d’arrivée avait été en lien avec la rémunération de l’activité du salarié, la décision aurait été différente.

Il est en effet de jurisprudence constante que « si l’ouverture du droit à un élément de rémunération afférent à une période travaillée peut-être soumise à une condition de présence à la date de son échéance, le droit à rémunération, qui est acquis lorsque cette période a été intégralement travaillée, ne peut être soumis à une condition de présence à la date, postérieure, de son versement. » (Cass. soc., 8 juillet 2020, n° 18-21.945 D) ; Cass.soc., 29 septembre 2021, n°13-25.549 D).

En conclusion, si une prime est liée à la rémunération de l’activité du salarié, le paiement ne peut pas être conditionné à la présence du salarié à une date ultérieure, le salarié ayant droit à la totalité de la prime dès lors que l’activité a été accomplie. Mais, lorsque la prime est liée à un autre événement tel que l’arrivée du salarié et/ou son maintien dans la société, une telle prime peut être subordonnée à la présence du salarié pendant une période déterminée (dès lors que la période demandée reste proportionnée et justifiée). Dans cette situation, en cas de non-respect de la clause par le salarié, l’employeur est en droit de demander le remboursement au prorata de la prime déjà versée au salarié.

Il est important dans le cadre de la rédaction de ces clauses, et de manière générale de tout contrat de travail et/ou offre d’embauche, d’être accompagné par un expert afin de vous assurer de leur validité ainsi que de leur exécution en cas de non-respect par l’une des parties. A cet égard, n’hésitez pas à contacter Me Aurélie Moine, Associée chez Novlaw avocats.

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Pour toute question relative au droit du travail, veuillez contacter notre spécialiste, Aurélie Moine, Associé au sein du cabinet d’affaires Novlaw Avocats.

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En collaboration avec Lolita Seguy, étudiante en droit à la Faculté de Droit de Pau

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