Lorsqu’une activité de restaurant est exercée dans un immeuble en copropriété, les odeurs de cuisine peuvent envahir les logements supérieurs. Pour un restaurant, il est obligatoire de disposer d’un système d’extraction, ou ventilation, capable de capter les odeurs et la fumée, et d’assurer un renouvellement suffisant de l’air pour satisfaire aux exigences posées par le Règlement Sanitaire Départemental. Il convient de préciser les règles applicables aux systèmes d’extraction et les recours possibles en cas de litige.

Par Maître Baptiste Robelin, avocat spécialisé en bail commercial, cession de fonds de commerce et droit de l’hôtellerie et de la restauration.

Les règlementations applicables aux systèmes d’extraction

Lorsqu’une activité de restaurant est exercée dans un immeuble en copropriété, les odeurs de cuisine peuvent envahir les logements supérieurs. Pour un restaurant, il est obligatoire de disposer d’un système d’extraction, ou ventilation, capable de capter les odeurs et la fumée, et d’assurer un renouvellement suffisant de l’air pour satisfaire aux exigences posées par le Règlement Sanitaire Départemental. Il convient de préciser les règles applicables aux systèmes d’extraction et les recours possibles en cas de litige.

L’exigence d’un système d’extraction

L’obligation de délivrance conforme est prévue par l’article 1719 du Code civil qui dispose que le bailleur est obligé, par la nature du contrat, de délivrer au preneur la chose louée, et de l’entretenir afin qu’elle soit en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée. Il doit également lui en assurer la paisible jouissance.

La réalisation de cette obligation dépend donc, pour le bailleur, de l’usage qui sera fait de ses locaux. Or, pour conclure un contrat de bail commercial, il faut y insérer une clause de destination ; elle vient définir et limiter l’activité que le preneur pourra exercer dans les locaux.

De plus, le Règlement Sanitaire Départemental de Paris et plus particulièrement son article 63 dispose que les cuisines, salles d’eau, cabinets d’aisances et tous autres locaux où existent des émissions de produits nocifs ou gênants autres que ceux liés à la seule présence humaine sont des locaux à pollution spécifiques pour lesquels il faut un système d’extraction.

Ainsi, dès lors qu’un contrat de bail commercial a une clause de destination visant l’exploitation de l’activité de restaurant, la Cour de cassation retient qu’il relève de l’obligation de délivrance conforme du bailleur de faire installer un système d’extraction conforme au Règlement Sanitaire Départemental en vigueur[1]. Idem pour les cas de petite restauration lorsqu’il existe un risque de gêne olfactive causé par la cuisine[2].

Les caractéristiques du système d’extraction

Pour les restaurants et petits restaurants situés à Paris, les normes relatives aux systèmes d’extraction figurent dans le Règlement Sanitaire Départemental de Paris, aux articles 63 et suivants.

D’une part, les prises d’air neuf et les ouvrants doivent être placés à huit mètres au moins de toute source éventuelle de pollution, notamment véhicules ou sorties d’air extrait, ou comporter des aménagements tels qu’une reprise d’air pollué ne soit pas possible. Dans les zones où l’air est des plus pollués, des mesures plus strictes peuvent être décidées par le préfet de police.

L’air doit être rejeté à au moins huit mètres de toute fenêtre, de toute prise d’air neuf, de tout débouché de conduit de fumée et de tout conduit de ventilation sauf aménagements tels qu’une reprise d’air pollué ne soit pas possible. L’air extrait des locaux à pollution spécifique doit, en outre, être rejeté sans recyclage.

D’autre part, un débit minimum d’air neuf est imposé.  Lorsque la ventilation est mécanique ou naturelle par conduit, le débit minimum dans les cuisines collectives est de 300L/s par mètre carré de surface de cuisson. Il faudra également que l’air soit préfiltré puis filtré (Article 65 Règlement Sanitaire Départemental de Paris.). Si la pollution spécifique est très variable, le système d’extraction peut être éteint lorsque les émissions cessent, mais devra être remis en marche suffisamment longtemps pour que l’extraction soit totalement assurée.

La ventilation peut également être assurée par les ouvrants lorsque leurs surfaces sont en « adéquation » avec la surface du local (s = S/8 log(10S) où s = surface des ouvrants en m2 S = surface du local en m2).

Enfin, les conduits de ventilation doivent avoir un tirage suffisant pour et être en bon état de fonctionnement. En pratique, pour avoir un tirage suffisant il faudra que la gaine ait un diamètre de 400 millimètres.

Pour leur entretien, les conduits de ventilation être ramonés chaque fois qu’il est nécessaire et au moins tous les trois ans.

La cheminée et le système d’extraction

Enfin se pose la question de savoir comment les normes des systèmes d’extraction s’articulent avec la règlementation relative aux conduits de fumée.

L’article 18 de l’arrêté du 22 octobre 1969 dispose que les orifices extérieurs des conduits doivent se situer au moins 0,4 mètres au-dessus de toute construction dans un rayon de huit mètres. Cela permet d’assurer que l’air extrait ne viennent s’introduire dans les logements.

Par exception, lorsque la pente de la toiture est supérieure à 15 degrés, si aucune construction ne dépasse le faîte du toit dans un rayon de huit mètres, et si le conduit est équipé d’un système anti-refouleur, alors l’orifice extérieur pourra être placé au niveau du faîtage du toit.

[1] Civ. 3ème, 13 juillet 2010, n°09-15.409 : RJDA 12/10, n°1133 ; Civ. 3ème, 14 septembre 2017, n°16-21.799.

[2] TGI Montpellier, 31 mars 2011

Les recours possibles contre une nuisance olfactive

Que faire si le restaurant émet de mauvaises odeurs et si le système d’extraction ne semble pas fonctionner normalement ou bien n’avoir pas été autorisé ? Il existe une série de recours, afin de faire constater le caractère illicite de l’extraction et son défaut de conformité. Voici la marche à suivre.

La constatation du trouble

En premier lieu, il est important d’établir l’existence du trouble. Pour ce faire, il est possible de le signaler à la Mairie afin qu’elle réalise, par l’intermédiaire de la Direction de la Prévention, de la Sécurité et de la Protection, un rapport. Dans ce rapport, la Mairie pourra constater le trouble et accorder un délai au responsable pour qu’il régularise sa situation.

Il est également possible en vertu de l’article L. 3332-15 du Code de la Santé publique de demander au préfet de police la fermeture administrative de l’établissement pour une durée n’excédant pas six mois.

En pratique, si la Mairie prononce un délai pour la mise en conformité des installations, il est probable que la Préfecture de police attende l’expiration de ce délai avant de faire droit à la demande de fermeture administrative. En tout état de cause, lorsqu’il n’y a aucun doute sur l’irrégularité des installations, les chances de succès d’une telle prétention sont presque assurées.

Enfin, en vertu de l’article 145 du Code de procédure civile, il est possible de demander au Président du tribunal judiciaire, avant tout procès, de désigner un expert judiciaire afin qu’il réalise les mesures d’instruction en vue d’établir le défaut de conformité de l’installation d’extraction actuelle. L’intérêt est de permettre l’acquisition d’éléments de preuve dont pourrait dépendre la solution du litige. À cet égard, la réponse apportée par l’expert permettra de déterminer la marche à suivre.

La destruction de l’installation non conforme aux frais du bailleur

En vertu de l’article 835 du Code de procédure civile, le Président du tribunal judiciaire peut ordonner les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour faire cesser un trouble imminent.

En d’autres termes, s’il s’avère que le système d’extraction mis en place n’est pas conforme, il sera possible de demander au président du tribunal judiciaire de faire cesser le trouble manifestement illicite. Or le trouble résultant d’une installation non conforme est forcément illicite. En pratique, il pourra ordonner la destruction du système d’extraction.

Le trouble anormal du voisinage

Si l’installation est conforme, il est quand même possible d’agir et d’engager une action sur le fondement du trouble anormal du voisinage de l’article 544 du Code civil (Arrêt en date du 19 novembre 1986, n°84-16379, rendu par la 2ème  chambre civile de la Cour de cassation ). En effet, les gênes olfactives provoquées par les cuisines peuvent, en fonction de leur durée, de leur récurrence, de leur intensité, constituer un trouble anormal du voisinage.

La preuve du trouble peut être rapportée par tout moyen : constat d’huissier témoignages, courriers pour demander de faire cesser le trouble… etc.

Dans la théorie des troubles anormaux du voisinage, le principal responsable est le locataire. Cependant, il est possible d’engager la responsabilité du propriétaire du local si celui-ci a été prévenu du comportement fautif de son locataire, mais qu’il n’a pas agi.

Pour faire cesser le trouble, deux voies sont possibles. La première est la conciliation. Il est fait obligation de faire recours à un conciliateur pour toutes les demandes portant sur un montant inférieur à 5 000 € (cinq mille euros).

La seconde est la saisine du tribunal qui pourra notamment prononcer l’arrêt de l’activité litigieuse, le versement de dommages-intérêts, et ordonner que soient entrepris les travaux nécessaires pour faire cesser le trouble.

La modification du règlement de copropriété

Enfin, il est possible de modifier le règlement de copropriété pour faire changer la destination de l’immeuble et interdire l’exercice de l’activité de restaurant en vertu de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965.

Cependant, pour modifier les stipulations du règlement de copropriété relative à la destination de l’immeuble, il faudra obtenir l’unanimité.

Dans tous les cas, le recours à un avocat spécialisé en droit immobilier, avec une connaissance du droit de la copropriété et des baux commerciaux, sera nécessaire. Chez NovLaw Avocats, notre département Droit de la Restauration et notre connaissance approfondie des règles applicables en matière d’extraction, constitue un atout pour vous accompagner dans ces démarches. N’hésitez pas à nous contacter !

Les règles applicables aux extractions des restaurants

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