Marche public Exclusion d’un candidat defaillant

Marché public : Exclusion d’un candidat défaillant

Les marchés publics représentent un enjeu crucial pour les pouvoirs publics, qui doivent garantir une utilisation optimale des deniers publics tout en assurant une prestation de qualité.

À ce titre, la sélection des candidats est une étape essentielle pour s’assurer de la capacité des entreprises à mener à bien les missions qui leur sont confiées.

Parmi les mesures permettant de sécuriser ce processus, l’exclusion des candidats défaillants lors de l’exécution de précédents marchés publics est une option à disposition des pouvoirs adjudicateurs.

Cependant, cette mesure doit être appliquée avec prudence.

Exclure un candidat défaillant : une possibilité

En effet, l’article L. 2141-7 du Code de la commande publique prévoit la possibilité d’exclure un candidat qui a fait preuve de défaillance lors de l’exécution d’un précédent marché public.

Plus précisément, l’acheteur est en droit d’exclure d’une procédure de passation de marché toute personne qui, au cours des trois dernières années, a été condamnée à verser des dommages et intérêts, a subi une résiliation de contrat, ou a fait l’objet d’une sanction similaire en raison d’un manquement grave ou répété à ses obligations contractuelles lors de l’exécution d’un précédent marché public (TA Bordeaux, 17 janvier 2023, n°2206735).

Cette disposition vise à écarter des entreprises qui n’ont pas respecté leurs engagements contractuels antérieurs, mettant ainsi en péril la bonne exécution des services publics.

Toutefois, la notion de « défaillance » n’est pas précisément définie dans les textes, laissant une large marge d’appréciation aux autorités adjudicatrices.

L’appréciation de la défaillance doit être faite au cas par cas, en tenant compte des circonstances particulières de chaque situation. Il ne s’agit pas simplement de sanctionner un manquement isolé, mais d’évaluer l’ensemble du comportement du candidat au regard de ses obligations contractuelles antérieures. Cette évaluation doit être rigoureuse et fondée sur des éléments factuels solides.

Par exemple, un retard de livraison ou une non-conformité des prestations peuvent révéler des défaillances, mais ces éléments doivent être mis en perspective avec les motifs invoqués par le candidat pour justifier ces manquements (CAA Nancy, 26 février 2019, Société PBTP et Démolitions, n° 18NC00064).

Au contraire, un comportement fautif de la part de l’entreprise pourra justifier l’exclusion. Les manquements doivent être graves ou persistants. À titre d’exemple, le non-respect des obligations en matière de sécurité ayant causé un incendie sur le chantier pourra être retenu pour justifier l’exclusion (CE, 10 juin 2009, Région Lorraine, n°324153).

Par ailleurs, à moins que le texte ne l’exige explicitement, il ne semble pas nécessaire que le manquement reproché à l’entreprise soit obligatoirement lié à l’objet du marché pour lequel une exclusion est envisagée. En effet, puisqu’il ne s’agit plus d’évaluer la capacité professionnelle de l’entreprise à exécuter le marché en question, tout manquement survenu lors d’un contrat précédent pourrait justifier une exclusion, même si l’objet de ce contrat est très différent de celui du marché à conclure.

L’exclusion d’un candidat sur la base de sa défaillance lors d’un précédent marché public n’est pas sans risque. Une telle décision peut être contestée par le candidat écarté, qui pourrait invoquer une atteinte disproportionnée à sa liberté d’accès à la commande publique.

Dès lors, avant de prononcer cette exclusion, l’acheteur doit mener une procédure contradictoire, permettant au candidat de présenter ses observations, de démontrer qu’il a pris les mesures nécessaires pour remédier à ses manquements, et d’établir que sa participation n’entraînera pas de violation du principe d’égalité de traitement.

De plus, une exclusion non fondée pourrait engendrer des recours devant les juridictions administratives, avec le risque pour le pouvoir adjudicateur de voir sa décision annulée, voire d’être condamné à indemniser le candidat.

Le juge administratif contrôle avec vigilance les décisions d’exclusion, s’assurant que celles-ci sont proportionnées et justifiées. Ainsi, le pouvoir adjudicateur doit s’assurer que la défaillance invoquée est suffisamment grave et répétée pour justifier une telle mesure, sous peine de voir leur décision contestée.

Dès lors, pour limiter les risques de contentieux, il est recommandé aux pouvoirs adjudicateurs de respecter certaines bonnes pratiques comme définir clairement les critères de sélection et les motifs d’exclusion, en s’appuyant sur des éléments objectifs ; documenter de manière rigoureuse les manquements du candidat en s’appuyant sur des preuves écrites, les décisions d’exclusion devant être motivées et explicitées. Avant de prononcer une exclusion, il convient d’évaluer la gravité des manquements au regard de l’ensemble des circonstances. Une défaillance isolée, si elle est justifiée par des circonstances exceptionnelles, pourrait ne pas suffire à justifier une exclusion. Enfin, il peut être opportun de permettre au candidat de s’expliquer sur les manquements reprochés avant de prendre une décision d’exclusion. Ce dialogue peut permettre de clarifier certains points et d’éviter des contentieux inutiles.

L’enjeu est d’assurer un équilibre entre la protection des intérêts publics et le respect des droits des entreprises à concourir à la commande publique.

Laurent Bidault Avocat - Novlaw Avocats

Coécrit avec Nicolas Machet & Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en matière d’innovation appliquée au secteur public (achat innovant, R&D, BIM).

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