Dans un arrêt du 2 juin 1989, Ville de Boissy-Saint-Léger (n°65631), le Conseil d’État a affirmé que la retenue de garantie avait pour but de garantir contractuellement l’exécution des travaux « pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître d’ouvrage », notamment dans le cadre de la garantie de parfait achèvement prévue à l’article 1792-6 du Code civil.

L’article R. 2191-32 du Code de la commande publique reprend ce principe :

« La retenue de garantie a pour seul objet de couvrir les réserves formulées à la réception des prestations du marché et, le cas échéant, celles formulées pendant le délai de garantie lorsque les malfaçons n’étaient pas apparentes ou que leurs conséquences n’étaient pas identifiables au moment de la réception ».

Ainsi, cette sûreté a pour objet de permettre au maître d’ouvrage ou maître d’œuvre de retenir une somme afin d’obtenir de l’entrepreneur une exécution correcte et intégrale des travaux demandés en cas de malfaçons constatées :

  • Soit à la réception des prestations du marché (lorsqu’elles sont suffisamment visibles) ;
  • Soit pendant la durée du délai de garantie (s’agissant de malfaçons qui n’étaient pas apparentes ou dont les conséquences n’étaient pas identifiables au moment de la réception).

Cette somme correspond, en vertu de l’article R. 2191-33 du Code de la commande publique, à 5 % du montant des travaux (augmenté, le cas échéant, du montant des modifications en cours d’exécution). Le même article prévoit également un taux maximum de 3% pour les marchés publics conclus entre l’État et une PME.

Ces dispositions légales sont d’ordre public et sont également applicables aux contrats de sous-traitance.

Marché public : Qu’est-ce que la retenue de garantie ?

Marché public : Qu’est-ce que la retenue de garantie ?

La retenue de garantie est-elle obligatoire ?

Non, elle est facultative.

Conformément aux articles R. 2191-32 et R. 2191-33 du Code de la commande publique précités, la personne publique peut prévoir, lorsque le marché stipule un délai de garantie, une retenue.

La retenue de garantie présente donc un double caractère contractuel et facultatif.

Elle n’est en conséquence opposable que si elle est prévue au marché.

Comment le maître d’ouvrage peut-il faire jouer la retenue de garantie ?

La retenue de garantie est restreinte aux seules obligations techniques de l’entrepreneur (absence de malfaçons).

Ainsi, « la retenue de garantie applicable aux marchés de travaux a pour but de garantir contractuellement l’exécution des travaux pour satisfaire, le cas échéant, aux réserves faites à la réception par le maître de l’ouvrage et qu’en cas de carence de l’entreprise titulaire du marché, le maître d’ouvrage est en droit de prélever sur le montant des retenues de garantie pratiquées le coût des travaux effectués pour remédier aux malfaçons constatées lors de la réception des travaux » (CAA de Bordeaux, 4 avril 2017, n°15BX03009).

En écartant la retenue de garantie pour toute autre raison, le Code de la commande publique aligne le régime de la retenue de garantie des marchés publics sur la loi n°71-584 du 16 juillet 1971, relative à la retenue de garantie dans les marchés privés.

Par exemple, la retenue de garantie ne saurait être conservée en compensation de créances détenues sur l’entreprise à la suite de l’application des pénalités de retard (CAA de Nancy 31 mai 2010, n°08NC01369) ou encore pour couvrir des frais engagés en raison de l’abandon du chantier par le titulaire avant la fin des travaux et de la nécessité de les faire exécuter par une autre entreprise à la suite de la résiliation pour faute du marché public initial (CAA de Lyon, 8 mars 2018, n°17LY01827).

Quelles sont les modalités d’utilisation de la retenue de garantie ?

Retenue de garantie et sous-traitance

La retenue de garantie ne peut être opérée par l’Administration sur des sommes à verser aux sous-traitants que si le contrat de sous-traitance, le marché, l’avenant ou l’acte spécial, le prévoient.

En conséquence, les conditions de paiement d’un sous-traitant ne peuvent être agréées que si elles sont compatibles avec la retenue de garantie lorsqu’une telle sûreté est stipulée dans le marché principal.

Retenue de garantie et malfaçons ayant fait l’objet de réserves

S’agissant des malfaçons ayant fait l’objet de réserves, la retenue de garantie peut être utilisée pour le financement des reprises de malfaçons couvertes par la garantie contractuelle, jusqu’à expiration de la garantie de parfait achèvement. En conséquence, dès lors qu’elles peuvent être mobilisées après le règlement du marché, les sommes prélevées sur la retenue ne s’imputent pas sur le solde de rémunération de l’entreprise (CAA de Lyon 18 février 2010, n°s 07LY01299 et 09LY00808).

Cependant, si le maître d’ouvrage retient sur le solde du marché le montant des travaux nécessaires à la levée des réserves, il ne possède plus contre l’entreprise aucune créance rendant nécessaire le maintien de la retenue de garantie (CAA Marseille, 8 juill. 2010, no 08MA00897).

Dans quelles conditions la retenue de garantie est-elle restituée ?

La retenue de garantie peut être partiellement restituée dans deux hypothèses :

La retenue de garantie doit être totalement restituée dans deux hypothèses :

Quelles sont les conditions de remboursement de la retenue de garantie ?

Aux termes de l’article R. 2191-35 du Code de la commande publique, la retenue de garantie doit être remboursée « dans un délai de 30 jours à compter de l’expiration du délai de garantie ».

Toutefois, si des réserves ont été notifiées au créancier pendant le délai de garantie et si elles n’ont pas été levées avant l’expiration de ce délai, la retenue de garantie est remboursée dans un délai de 30 jours après la date de leur levée.

Une circulaire du 14 février 2012 relative au Guide des bonnes pratiques en matière de marchés publics précise que « lorsque les conditions prévues par le code sont réunies, la libération des garanties, quel que soit le régime de garantie retenu, procède de la décision du seul ordonnateur et non du comptable public ».

Il est à noter que le refus abusif de l’Administration de rembourser une retenue de garantie est de nature à engager sa responsabilité indemnitaire (CE 3 novembre 1978 OPHLM des Alpes-Maritimes, n°02260).

Comment s’effectue la substitution à cette retenue de garantie d’une garantie à première demande ?

En cas d’accord des parties (mais sans que celui de l’Administration soit nécessaire), la retenue de garantie peut être remplacée postérieurement à l’attribution ou à la notification du marché par une garantie à première demande. L’article R. 2191- 36 du Code de la commande publique prévoit que « L’objet de cette garantie de substitution est identique à celui de la retenue de garantie qu’elle remplace ».

Cette substitution de garantie peut être réalisée à la demande de l’opérateur économique pendant toute la durée du marché.

Aux termes de l’article R. 2191-40 du Code de la commande publique, la garantie de substitution doit être constituée en totalité au plus tard à la date à laquelle le titulaire remet la demande de paiement correspondant au premier acompte. Si ce délai n’est pas respecté, l’Administration prélèvera la retenue de garantie correspondante sur l’acompte à verser, et le titulaire sera privé de la faculté de procéder à la substitution de garantie au titre du marché concerné. Lorsque la garantie de substitution a été constituée après la date fixée au premier alinéa, les montants déjà prélevés au titre de la retenue de garantie sont reversés au titulaire.

Il est à noter que le maître d’ouvrage ne peut pas inclure, dans le montant réclamé au titre de la caution, les pénalités de retard dont l’entreprise lui serait redevable. Il peut en revanche exiger qu’elle prenne en charge, dans la limite de son engagement, le coût des travaux qu’il a été contraint d’exposer pour couvrir les réserves formulées à la réception des travaux et pendant le délai de garantie, et non levées par l’entreprise (CAA de Paris 15 juin 2010, n°08PA05801).

Le remplacement de la retenue de garantie par la garantie à première demande permet de rassurer l’acheteur sur sa faculté d’être indemnisé de son préjudice éventuel, la garantie à première demande étant dans cette hypothèse directement versée par la banque, porteuse de la garantie.