bail commercial Système d'extraction d'air restauration et petite restauration

Restauration et petite restauration : quelle différence pour le bailleur au niveau du système d’extraction d’air ?

Dans le cadre d’un contrat de location ou bail commercial, en vertu de l’article 1719 du Code civil, le bailleur est débiteur envers le preneur d’une obligation de délivrance conforme du local à l’usage qui entend en être fait par le preneur. Lorsque le bail commercial porte sur une activité de restauration, cette obligation implique une obligation pour le bailleur de fournir ou de garantir l’installation d’un système d’extraction d’air.

Cependant, de plus en plus de locaux sont affectés de nos jours à l’exercice exclusif d’une activité non pas de restauration, mais de petite restauration ou de restauration rapide. Se pose alors la question de savoir si des baux affectés exclusivement à ces activités de petite restauration ou de restauration rapide imposent également une obligation pour le local d’être équipé d’un système d’extraction d’air.

Définition de l’activité de restauration rapide

La question essentielle de la définition des activités de petite restauration et de restauration rapide est de savoir si les termes de restauration rapide et de petite restauration doivent être interprétés comme synonymes du terme de restauration et ainsi l’exercice de ces activités soumis aux mêmes normes et règlementations. De cette distinction ou absence de distinction dépendra donc l’existence pour le bailleur d’une obligation de fournir ou de garantir l’installation ou non d’un système d’extraction d’air conforme à la règlementation.

Il n’existe pas de définition juridique de l’activité de petite restauration ou de restauration rapide. Cependant, aux vues de l’augmentation du nombre de baux commerciaux utilisant ces terminologies, les juges ont dû faire face à des litiges dans lesquels ces termes étaient utilisés.

Ainsi, le Tribunal de grande instance de Lyon, dans une décision en date du 8 avril 2014, identifiait une distinction entre l’activité de restauration au sens d’une brasserie ou d’un restaurant et une activité de petite restauration (TGI Lyon, ch. des urgences, 8 avr. 2014, n° 13/11143). En l’espèce, le Tribunal avait relevé que les aliments vendus par le preneur n’étaient pas préparés sur place mais simplement réchauffés.

D’autres décisions identifieront également une distinction, dont notamment une décision de la Cour d’appel de Paris en date du 8 septembre 2021 (CA Paris, pôle 5 – ch. 3, 8 sept. 2021, n° 19/19467). La Cour énonçait ainsi qu’en l’espèce « l’activité exercée par la société n’est pas une activité de restauration traditionnelle, par opposition à la restauration rapide, dans la mesure où il n’y a pas de confection élaborée des plats cuisinés sur plus, les produits consommés étant des produits préalablement transformés, rapides à servir ». Dans les faits, le preneur exerçait conformément au bail une activité de bar à vin – épicerie – comptoir gourmand, proposant notamment à la vente des plateaux composés de produits froids transformés tels que du bœuf séché, du saumon fumé ou du fromage. La Cour a ainsi identifié ce type de restauration comme de la restauration rapide différente de la restauration traditionnelle. Il est cependant à noter que cette distinction identifiée par la Cour dans ce litige ne trouve pas son origine dans la législation mais dans le contrat entre les parties au litige, le bail précisant que : « Le preneur ne pourra exercer dans les locaux loués que l’activité commerciale suivante : EPICERIE FINE-RESTAURATION RAPIDE SUR PLACE ET A EMPORTER SANS EXTRACTION EXTERIEURE (à l’exclusion de toute activité de restauration traditionnelle) ».

Une distinction pas toujours prise en compte par le juge

Si cette distinction est identifiée et utilisée par certains juges, sa consécration ne serait cependant être considérée comme généralisée. Ainsi, il existe également des affaires dans lesquels bien qu’une activité dite de petite restauration soit exercée dans les locaux donnés à bail, le juge n’en a pas moins appliqué les mêmes normes et réglementations que pour une activité de restauration traditionnelle, ne considérant donc pas qu’il existe une quelconque différence de ce point de vue entre l’exercice de ces différentes activités.

Le Tribunal de grande instance de Grasse a ainsi par une décision en date du 2 décembre 2015 condamné un bailleur à installer un système d’extraction d’air, estimant que « lorsque le bail prévoit comme en l’espèce que le local loué est destiné à l’exploitation d’un commerce de petite restauration, peu importe la composition des menus et de la carte, dès lors que toute activité de restauration impose l’installation et l’existence d’un système d’extraction de l’air pollué conforme à la réglementation et au règlement de copropriété » (TGI Grasse, service des réf., 2 déc. 2015, n° 15/01371).

La Cour d’appel de Montpellier a rendu une décision similaire, condamnant le bailleur à installer un système d’extraction d’air conformément à la règlementation sur la restauration, mais en se basant quant à elle sur le rapport de l’expert judiciaire (CA Montpellier, 1re ch. c, 10 janv. 2017, n° 14/06143). Ce dernier avait en effet énoncé dans ses conclusions que « l’activité professionnelle constatée nécessite non seulement une extraction des fumées mais également une ventilation des locaux ». La Cour en avait ainsi conclu que le local n’était pas conforme à l’activité exercée par le preneur quand bien même il s’agissait d’une activité de salon de thé et de petite restauration et non pas une activité de restauration traditionnelle.

La prise en considération des nuisances olfactives : le cas du Kebab

D’autres approches, alternatives à une distinction stricte entre restauration traditionnelle et petite restauration et restauration rapide ont également vu le jour dans la jurisprudence.

Dans un litige sur un bail commercial pour l’exercice d’une activité de petite restauration dans lequel le preneur exerçait une activité de kebab, le juge s’est ainsi appuyé sur la notion de nuisance olfactive (TGI Paris, réf., 7 déc. 2010, n° 10/59731). Dans cette décision, suite au constat par la préfecture de police de Paris de la présence d’odeurs de friture aussi bien dans les parties communes de l’immeuble dans lequel le local étai situé que dans la rue, et d’une absence de conduit de ventilation, il a été constaté que l’exploitation de l’établissement n’était pas conforme à la réglementation, qui exigerait l’installation d’un système d’extraction d’air.

Toutefois, cette décision se démarque par la conclusion qui est tirée par le juge de ces constatations. Ce dernier en a déduit non pas que le bailleur avait manqué à son obligation de délivrance conforme, mais au contraire que le preneur « ne respecte pas les clauses contractuelles, l’activité de friture et de kebab constatée dans les locaux ne correspond pas à ce qu’il est habituel de considérer comme de la petite restauration, salon de thé, sandwicherie, glacier ». La résiliation du bail pour non-respect des clauses contractuelles et des prescriptions administratives fut ainsi prononcée par le juge.

La prise en considération de l’activité réellement exercée : le cas de la crêperie

Une autre approche que l’on peut retrouver dans la jurisprudence est la prise en considération de l’activité réellement exercée dans les locaux loués par le preneur, et les spécificités qu’elle nécessite, notamment au niveau de la santé, de l’hygiène et de salubrité publique, indépendamment d’une désignation de restauration traditionnelle ou de petite restauration dans le bail commercial.

Dans un litige sur un bail commercial pour l’exercice d’une activité de « crêperie, petite restauration et vente à emporter (sandwichs, salades) », le juge a ainsi pris en considération les mesures que l’activité exercée requérait sans s’interroger sur l’utilisation du terme de petite restauration (CA Paris, pôle 5 ch. 3, 10 mai 2023, n° 20/00976). La Cour d’appel de Paris a ainsi estimé que les lieux étant loués à destination d’une activité de crêperie, le bailleur s’obligeait aux termes de l’article 1719 du Code civil à délivrer au preneur un système d’extraction d’air.

Dans sa décision, la Cour a par ailleurs, et de manière intéressante considéré que « la clause stipulant que le « bénéficiaire prendra les lieux dans l’état où ils se trouvent » n’est par ailleurs pas de nature à exonérer le bailleur de son obligation de délivrance ».

Il n’existe ainsi pas d’approche uniforme, tant de la définition de petite restauration ou restauration rapide, ni de la question de l’obligation pour le bailleur de fournir un système d’extraction d’air lorsque le bail autorise l’exercice exclusif de ce type de restauration. Il s’agit ainsi d’étudier les faits au cas par cas. Cependant, il existe différentes options contractuelles pour limiter les incertitudes juridiques sur cette question.

Baptiste

Par Philipine CHAPOT en collaboration ave Baptiste Robelin, Avocat Associé Expert en Bail Commercial et Droit Immobilier du cabinet Novlaw Avocats,

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