Par Baptiste Robelin, avocat spécialisé en droit de l’hôtellerie et de la restauration (CHR).

Aucun texte ne prévoit expressément l’autorisation de vapoter, d’utiliser une cigarette électronique, dans les cafés, hôtels, restaurants.

Il existe en revanche un décret datant du 27 avril 2017 (n° 2017-633) prévoyant l’interdiction de vapoter dans certains lieux, en particulier « dans les établissements scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la formation et à l’hébergement des mineurs », mais aussi « dans les moyens de transport collectif fermés » (train, bus, métro…) ainsi que « dans les lieux de travail fermés et couverts à usage collectif ».

En revanche, si les locaux sont ouverts au public, le vapotage est autorisé.

Rien ne l’interdit donc dans les cafés, hôtels, restaurants : sauf, naturellement, à ce que le propriétaire de l’établissement, le restaurateur, indique expressément au moyen d’un panonceau, l’interdiction d’utiliser la cigarette électronique dans son établissement.

Nous vous proposons d’en découvrir davantage sur la règlementation relative à la e-cigarette.

Qu’est-ce que la cigarette électronique ?

Originaire de Chine, la cigarette électronique ou « e-cigarette » est apparue sur le sol français en 2005. Bien que son image reste aujourd’hui très controversée, depuis son avènement son succès n’a cessé de croitre.

La e-cigarette est un outil composé principalement d’une batterie, un réservoir de liquide ou « e-liquide » et d’un système de vapotage. La capacité du réservoir de e-liquide est limitée à 10 ml afin de limiter l’apport en nicotine que contient le liquide présent.

Quels sont les enjeux de la e-cigarette ?

Ce dispositif qui permet de reproduire la forme d’une cigarette classique est massivement utilisé par les consommateurs de tabac qui souhaitent mettre fin à leur dépendance.

Elle est donc utilisée comme outil de sevrage tabagique prisé. Toutefois si son utilisation reste moins nocive pour le consommateur que la consommation du tabac classique, les études scientifiques ont prouvé que la vapeur qu’elle fabrique contient des substances et particules cancérogènes. Si la cigarette électronique reste avant tout un moyen de substitution permettant de réduire les risques de maladies des fumeurs, elle est parfois considérée à tort comme un outil de mode. Il a donc été nécessaire d’encadrer son utilisation et ses conditions de vente afin de préserver les mineurs qui pourraient y recourir dans cet effet de mode.

Quelles réglementations autour de la e-cigarette ?

Son utilisation n’étant donc pas sans conséquence pour la santé, la Commission européenne a conféré à la cigarette électronique le statut juridique de « produit annexe du tabac ». Cette consécration a été donnée par une directive de 2014, la TPD ou « Tabacco Product Directive », soit la directive sur les produits du tabac, dont la finalité est de mieux encadrer la vente des produits du tabac ou apparentés au tabac.

Elle ainsi été transposé dans notre droit interne par une Ordonnance de 2016. Cette même ordonnance a confié à l’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail, le devoir d’exiger de chaque fabricant, importateur ou distributeur du produit du vapotage contenant de la nicotine, de mettre en place et tenir à jour un système de collecte d’informations sur les effets indésirables que ces produits peuvent causer sur la santé.

Néanmoins le législateur français a depuis adopté de nouvelles mesures pour encadrer les conditions de vente et d’utilisation des produits du vapotage dans un but de protection des mineurs. Le droit communautaire et le droit français posent donc les conditions de mise sur le marché de la cigarette électronique.

Qu’en est-il en droit français ?

Plusieurs textes sont concernés.

En premier lieu, L. 3513-1 du code de la santé publique énumère les produits considérés comme « produits du vapotage ». Il est donc compris « les dispositifs électroniques du vapotage » qu’ils soient avec cartouches et réservoir ou sans, mais aussi « les flacons de recharge ».

Concernant la publicité l’article L. 3513-4 du même code prévoit qu’à l’instar des produits du tabac « la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des produits du vapotage est interdite » et ceci qu’ils renferment de la nicotine ou non.

Vis-à-vis de la réglementation pour la protection des plus jeunes, la loi n°2014-344 en date du 17 mars 2014 corrélative à la consommation a consacré l’article L. 3511-2-1 du code de la santé publique. Celui-ci interdit la vente ou la donation de produits du tabac et « cigarettes électroniques ou toute autre forme d’inhalateur électromécanique ou électrique simulant de fumer » aux mineurs de moins de dix-huit ans.

Dans cette même lancée, l’article 3513-5 impose aux commerçants de demander à leurs clients de fournir une preuve de leur majorité. L’alinéa 6 du même article interdit le vapotage dans « les établissements scolaires et les établissements destinés à l’accueil, à la formation et à l’hébergement des mineurs ».

Cependant cet article instaure aussi une protection en faveur des majeurs non-fumeurs puisqu’il prohibe également le vapotage au sein des « moyens de transport collectif fermés » et « les lieux de travail fermés et couverts à usage collectif ». Par ces termes, le législateur exclus donc les lieux ouverts même lorsqu’ils accueillent du public, comme les terrasses de restaurant par exemple et les lieux de travail individuel. Assurément, le règlement de l’établissement peut interdire l’usage de la cigarette électronique auquel cas il faudra alors s’y soumettre. Quoi qu’il en soit, les locaux de travail où l’interdiction de vapoter s’applique, qu’elle soit légale ou propre à la réglementation de l’établissement, devront faire apparaître une signalisation apparente qui rappelle l’interdiction. À défaut de signalisation l’entreprise encourt une sanction pénale d’une amande de 450 euros. À l’inverse, l’individu qui ne respecterai pas cette interdiction s’expose au risque d’une contravention de seconde classe qui lui vaudra une amande de 35 euros.

Quant aux différents composants de la cigarette électronique, ils doivent également répondre à des exigences de normes légales.

Les chargeurs électriques sont ainsi assujettis, comme tous équipements électriques ou électroniques, aux préconisations du décret n°2015-1084 du 27 août 2015 relatif à la comptabilité de ces produits. De même, selon le décret n°2015-1083 de la même date, ils sont tenus de respecter les mesures de sécurité applicable pour toute mise en disposition sur le marché de matériel électrique. Parallèlement ces chargeurs doivent être adaptés aux lois environnementales prévues par la Directive n°2011/65/UE en date du 8 juin 2011 concernant la limitation de l’utilisation des substances dangereuses présentes dans les équipements électriques et électroniques. Enfin, les fabricants et importateurs de ces chargeurs doivent permettre leur identification et faire apparaitre le marquage « CE » sur ces appareils.

En ce qui concerne le corps de la cigarette électronique aussi appelé le vaporisateur, n’ayant pas de dispositions propres, il est soumis aux obligations générales de sécurité prévues par les articles L.421-1 et suivants du Code de la consommation. Ces mêmes dispositions du Code de la consommation sont aussi applicables aux batteries des e-cigarettes qui ne sont non plus régis par des réglementations spécifiques.

Quels aménagements au niveau européen ?

La TPD ou Tobacco Products directive citée plus haut, entrée en vigueur le 21 mai 2016, tend à encadrer la fabrication, la présentation et la vente des produits du tabac mais aussi des produits connexes comme la cigarette électronique et le e-liquide. Les fabricants d’e-liquide contenant de la nicotine sont soumis au respect de six règles impératives : `

Pour ce qui est de la commercialisation, le fabricant devra faire notifier six mois à l’avance la mise sur le marché de tels produits, déclarer l’ensemble des composants de son produit, informer les consommateurs des éventuels risques liés à la consommation de nicotine et donc la e-cigarette et ne pas faire de publicité de son produit.

Pour ce qui est du conditionnement du produit, le fabricant doit limiter le volume des flacons à 10 ml et limiter le volume de nicotine à 20 mg par ml.

Néanmoins le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne entendent par cette directive que chaque pays membre de l’Union européenne applique la TPD en tenant compte de sa propre législation. Ceci explique qu’il puisse exister des différences de droit entre les États membres, ainsi en Belgique un arrêté royal de 2016 relatif à la fabrication et à la mise dans le commerce de cigarettes électroniques prohibe la vente à distance de ces produits ainsi que des flacons de recharge. Un arrêt du tribunal de commerce belge de 2018 a d’ailleurs opposé cette interdiction à la vente transfrontalière.

En dehors du cadre communautaire, la e-cigarette à nicotine est interdite dans certains pays comme le Mexique. En France, bien que sa mise sur le marché est autorisée, la Direction générale de la concurrence et de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) est régulièrement saisie de plaintes signalant l’explosion de cigarettes électroniques causant parfois des brulures aux consommateurs. Bien que le nombre de plaintes reste très limité par rapport au nombre de batteries mises en circulation, ces accidents rappellent que ces appareils ne sont pas anodins et qu’il est donc impératif de respecter les dispositions légales.