Sommaire
- La fixation du montant de l’indemnité d’éviction due par le locataire
- Les règles applicables en matière de prescription
- Le régime de l’indemnité d’occupation du locataire dans un bail commercial
- Cet article vous a plu ? Retrouvez d’autres actualités sur nos pages « Avocat bail commercial » et « Avocat cession de fonds de commerce ».

Le régime de l’indemnité d’occupation du locataire dans un bail commercial
Un arrêt récent de la Cour de cassation du 16 mars 2023 est l’occasion de revenir sur le régime juridique de l’indemnité d’occupation due par le locataire en matière de bail commercial, et les règles relatives à la fixation de son quantum ainsi qu’à la prescription (Cass, Civ, 3, n° 21-19.707).
On rappellera qu’à l’expiration du bail commercial, le bailleur et le preneur peuvent se mettre d’accord sur le principe du renouvellement, tout en manifestant leur désaccord sur le loyer du bail renouvelé.
Dans ce contexte, les parties ont deux ans pour saisir le Juge des loyers à l’effet de statuer sur le loyer de renouvellement.
Pendant la durée de l’instance, le preneur est en principe tenu de régler l’ancien loyer (ou le loyer fixé éventuellement à titre provisionnel par la juridiction).
C’est ce que prévoit l’alinéa 1 de l’article L. 145-57 du Code de commerce :
« Pendant la durée de l’instance relative à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé, le locataire est tenu de continuer à payer les loyers échus au prix ancien ou, le cas échéant, au prix qui peut, en tout état de cause, être fixé à titre provisionnel par la juridiction saisie, sauf compte à faire entre le bailleur et le preneur, après fixation définitive du prix du loyer ».
Une fois le loyer fixé par la juridiction, le preneur et le bailleur disposent d’un droit d’option (droit de régulariser ou non le bail au montant du loyer fixé judiciairement) prévu par l’article L. 145-57 alinéa 2 :
« Dans le délai d’un mois qui suit la signification de la décision définitive, les parties dressent un nouveau bail dans les conditions fixées judiciairement, à moins que le locataire renonce au renouvellement ou que le bailleur refuse celui-ci, à charge de celle des parties qui a manifesté son désaccord de supporter tous les frais. Faute par le bailleur d’avoir envoyé dans ce délai à la signature du preneur le projet de bail conforme à la décision susvisée ou, faute d’accord dans le mois de cet envoi, l’ordonnance ou l’arrêt fixant le prix ou les conditions du nouveau bail vaut bail ».
La partie qui finalement refuse le renouvellement doit supporter « tous les frais » de l’instance en renouvellement du bail (voir par exemple l’arrêt de la 3e chambre civile de la Cour de cassation du 16 sept. 2009, n° 08-15.741 : « les frais qui sont mis à la charge du bailleur qui, exerçant son droit d’option, refuse le renouvellement du bail sont exclusivement les frais exposés avant l’exercice de ce droit » ).
Ces grands principes rappelés, reste à déterminer la qualification juridique de l’indemnité d’occupation que doit régler le preneur au bailleur pour avoir joui des lieux après l’expiration de l’échéance du bail.
Cette indemnité pourrait relever soit du droit commun, soit du régime spécifique des baux commerciaux (régime statutaire). La question de la nature juridique de l’indemnité d’occupation est importante, car elle permet de déterminer ensuite les règles applicables pour la fixation de son montant, mais également pour la prescription.
C’est à cette question que répond l’arrêt de la Cour de cassation du 16 mars 2023 présentement commenté (Civ. 3e, 16 mars 2023, n° 21-19.707).
La fixation du montant de l’indemnité d’éviction due par le locataire
La Cour de cassation a déjà eu l’occasion de se prononcer sur les modalités de fixation de l’indemnité d’occupation due par le locataire en cas d’exercice de son option par le bailleur.
La Cour de cassation considère qu’elle est d’origine statutaire (fondée sur le régime spécifique des articles L. 145 et suivants du Code de commerce) et doit ainsi être fixée selon les mêmes règles que celles gouvernant la valeur locative, conformément à l’article L. 145-28 du Code de commerce (Civ. 3e, 30 juin 1999, n° 96-21.449).
Ainsi, si le bailleur exerce son option, succèdera une procédure en fixation de l’indemnité d’éviction, période pendant laquelle l’indemnité d’occupation devra répondre à la valeur locative.
La question est différente si c’est le locataire qui opte. Sur ce point, la jurisprudence a évolué.
Avant le 5 février 2023, la Cour de cassation considérait que le locataire exerçant son option se trouvait dans une situation comparable à celle d’un occupant sans droit ni titre : l’indemnité d’occupation devait dès lors être fixée selon les règles du droit commun (pouvant parfaitement excéder la valeur locative).
Dans un arrêt important du 5 février 2003 (Civ. 3e, 5 févr. 2003, n° 01-16.882), la Cour de cassation a nuancé sa position et distingué deux périodes : pour la période comprise entre la fin du bail et l’exercice du droit d’option par le locataire, l’indemnité trouve son origine dans l’application de l’article L. 145-57 du code de commerce. Elle est donc statutaire et doit répondre aux règles de fixation de la valeur locative.
Pour la période postérieure à l’exercice du droit d’option du locataire (si celui-ci refuse finalement le renouvellement du bail) le locataire doit être regardé comme un occupant sans droit ni titre, et l’indemnité d’occupation peut être fixée sans respecter les règles du statut des baux commerciaux.
Cette distinction est reprise par l’arrêt du 16 mars 2023 présentement commenté qui distingue deux périodes :
- pour la période comprise entre la date à laquelle le bail commercial a pris fin et l’exercice du droit d’option par le locataire, l’indemnité d’occupation est d’origine statutaire (trouvant son fondement sur l’article L. 145-57 du Code de commerce) et doit donc suivre la valeur locative (voir également l’arrêt suivant, Paris, 26 févr. 2014, n° 12/05634.),
- pour la période postérieure au refus du renouvellement par le locataire (lorsqu’il se maintient dans les lieux après l’exercice de son option), l’indemnité d’occupation due relève du droit commun et peut donc excéder la valeur locative – du moins être fixée différemment.
Les règles applicables en matière de prescription
Dès lors que cette distinction est faite (indemnité antérieure à l’exercice de l’option par le locataire, origine statutaire ; indemnité postérieure à l’exercice de l’option par le locataire, droit commun) il est facile de déterminer le régime applicable en matière de prescription.
Pour la période antérieure à l’exercice de son option par le locataire, l’indemnité trouvant son origine sur l’article L. 145-57 du Code de commerce, elle relève du régime de prescription biennale prévue par l’article L. 145-60 du Code de commerce (2 ans donc).
De manière logique, pour la période postérieure à l’exercice de son option par le locataire, l’indemnité d’occupation relève du droit commun et suit donc le régime de l’article 2224 du Code civil (5 ans).
C’est bien l’apport de la décision du 16 mars 2023 présentement commentée.
Reste la question du point de départ de ce délai de prescription quinquennale ou biennale.
Aux termes de l’arrêt commenté, pour la période antérieure à l’exercice du droit d’option du locataire, le délai de prescription biennale ne court qu’à compter du jour où le bailleur est informé de l’exercice par le locataire de son option.
C’est la même date qui sera retenue pour la période de maintien dans les lieux par le locataire après l’exercice de son option, s’agissant du point de départ de la prescription quinquennale.
Si la matière est complexe, une fois que les principes sont compris, l’arrêt de la Cour de cassation devient limpide et pourrait presque se passer d’explication :
« Il résulte de ces textes que l’indemnité d’occupation, due par un locataire pour la période ayant précédé l’exercice de son droit d’option, trouve son origine dans l’application de l’article L. 145-57 du code de commerce et l’action en paiement de cette indemnité est, comme telle, soumise à la prescription biennale édictée par l’article L. 145-60 de ce code (3e Civ., 5 février 2003, pourvoi n° 01-16.882, Bulletin civil 2003, III, n° 26).
Il s’ensuit que le bailleur n’ayant connaissance des faits lui permettant d’agir en paiement de cette indemnité, laquelle se substitue rétroactivement au loyer dû sur le fondement de l’article L. 145-57 du même code, qu’à compter du jour où il est informé de l’exercice par le locataire de son droit d’option, le délai de prescription biennale ne court qu’à compter de cette date.
Par ailleurs, lorsque le locataire se maintient dans les lieux après l’exercice de son droit d’option, il est redevable d’une indemnité d’occupation de droit commun soumise à la prescription quinquennale, dont le délai court à compter de ce même jour ».
Commentaire par Me Baptiste Robelin
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