Les délais de recours en contentieux administratif

Les délais de recours en contentieux administratif

Délais de recours et délais contentieux

L’article R.421-1 du Code de justice administrative lequel dispose que « la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ».

C’est par exemple le cas d’une décision de refus de permis de construire ou d’une décision de résiliation d’un marché public.

Toutefois, eu égard l’article R.421-5 du Code de justice administrative, le délai de recours susvisé n’est pas opposable lorsqu’il n’a pas été mentionné dans la notification de la décision ; en effet, «  les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ».

Pour rappel, le Conseil d’État a eu l’occasion de considérer, à l’occasion de son fameux arrêt « Czabaj », aux termes duquel :

« le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d’une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu’en une telle hypothèse, si le non-respect de l’obligation d’informer l’intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l’absence de preuve qu’une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable ; qu’en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance » (CE, 13 juillet 2016, N°387763 Czabaj).

Dès lors, un requérant qui ne s’est pas vu mentionner les voies et délais de recours d’une décision de l’Administration dispose d’un délai dit raisonnable d’un an pour contester cette dernière.

Ce délai commence alors à courir soit à réception de la décision expresse, soit à compter de la date à laquelle le requérant est supposé avoir eu connaissance de ladite décision, notamment dans le cas d’une décision implicite.

Point de départ, interruption et prorogation du délai raisonnable

Plus récemment, à l’occasion de plusieurs décisions, le juge administratif est venu apporter des précisions quant au régime juridique applicable aux délais de recours et notamment en ce qui concerne leur interruption ou leur prorogation.

À cet égard, il convient de répertorier les délais de recours appliqués par le juge administratif selon les hypothèses données.

Tout d’abord, la déclaration d’incompétence du juge judiciaire peut constituer le point de départ du délai de recours de droit commun.

Ainsi, le Conseil d’État a considéré que la déclaration d’incompétence du juge judiciaire au profit du juge administratif devait être regardée comme faisant courir un nouveau délai de droit commun.

Dès lors, dans un tel cas de figure, le requérant, consécutivement à la décision par laquelle le juge judiciaire s’est déclaré incompétent, dispose d’un délai de 2 mois pour saisir le juge administratif, et ce alors même qu’initialement le délai de recours raisonnable d’un an était applicable :

« Ce délai raisonnable est opposable au destinataire de la décision lorsqu’il saisit la juridiction judiciaire, alors que la juridiction administrative était compétente, dès lors qu’il a introduit cette instance avant son expiration. Ce requérant est ensuite recevable à saisir la juridiction administrative jusqu’au terme d’un délai de deux mois à compter de la notification ou de la signification de la décision par laquelle la juridiction judiciaire s’est, de manière irrévocable, déclarée incompétente » (CE 5 juillet 2023, n°465478)

Parallèlement, le Conseil d’État est venu schématiser l’application de l’arrêt Czabaj suite à l’introduction d’un recours préalable devant l’administration (CE 12 juillet 2023, n°474865).

Aux termes de cet arrêt, le juge administratif a considéré que l’introduction d’un recours préalable (par exemple un recours gracieux) dans le délai raisonnable ne faisait pas échec à une deuxième application du même délai raisonnable pour introduire un recours contentieux, dès lors que les voies et délais de recours n’ont pas été mentionnés au requérant par l’administration lors du rejet de ce recours.

À cette occasion, le juge administratif rappelle qu’une décision explicite qui mentionne les voies et délais de recours doit se voir appliquer le délai de droit commun de deux mois.

À l’inverse, une décision explicite qui ne les mentionne pas, se voit appliquer le délai raisonnable d’un an pour engager toute poursuite devant le juge administratif.

Le juge administratif précise également les délais de recours applicables à une décision implicite de l’Administration.

Ce dernier considère que la notification d’un accusé de réception mentionnant les voies et délais de recours suffit à faire courir le délai de recours contentieux de droit commun de deux mois à compter de la naissance de la décision.

L’absence de mention des voies et délais de recours au requérant fait quant à elle courir le délai raisonnable d’un an à compter de la date à laquelle le requérant a connu ou aurait dû connaître la décision.

Le raisonnement adopté par le juge administratif peut être schématisé comme suit :

En d’autres termes, un second délai raisonnable d’un an peut naître, soit lorsque les délais et voies de recours contentieux ne sont pas mentionnés dans la décision explicite de rejet du recours préalable, soit lorsque l’administration n’a ni accusé réception du recours préalable formé, ni informé le requérant de la date à laquelle une décision est susceptible d’intervenir.

L’application du délai de recours raisonnable au contentieux contractuel

Le juge administratif a étendu l’application d’un tel délai de recours raisonnable au contentieux contractuel.

En effet, le Conseil d’État a considéré que le requérant qui avait eu connaissance de l’existence d’un contrat, même par une publicité incomplète, disposait d’un délai raisonnable d’un an pour en contester la validité.

Soucieuse de garantir une certaine sécurité juridique, il semblerait que la jurisprudence entende élargir l’application du délai de recours raisonnable dès lors que le requérant à connaissance ou est censé avoir connaissance de la décision litigieuse, même carencée :

« Le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l’effet du temps, fait obstacle à ce que la validité d’un contrat administratif puisse être contestée indéfiniment par les tiers au contrat. Dans le cas où, faute que tout ou partie des mesures de publicité appropriées mentionnées au point précédent aient été accomplies, le délai de recours contentieux de deux mois n’a pas commencé à courir, le recours en contestation de la validité du contrat ne peut être présenté au-delà d’un délai raisonnable à compter de la date à laquelle il est établi que le requérant a eu connaissance, par une publicité incomplète ou par tout autre moyen, de la conclusion du contrat, c’est-à-dire de son objet et des parties contractantes. En règle générale et sauf circonstance particulière dont se prévaudrait le requérant, un délai excédant un an ne peut être regardé comme raisonnable » (CE, 19 juillet 2023, Société Seateam aviation, n°465308).

L’ensemble de ces décisions s’inscrivent donc dans la volonté de garantir aux justiciables la possibilité de contester des décisions qui leur sont défavorables dans un délai suffisamment long tout en assurant une certaine sécurité juridique des décisions administratives afin qu’elles ne puissent pas être remises en question perpétuellement.

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