Dans le cadre de l’attribution d’un marché public, l’analyse de la recevabilité des offres par l’acheteur public est l’étape qui précède l’analyse proprement dite des offres au regard des critères de sélection et à leur classement par l’acheteur public.

En effet, dans le cadre de la procédure d’attribution d’un marché public, pour pouvoir être classée, l’offre d’un candidat ne doit pas être une offre irrégulière, une offre inacceptable ou une offre inappropriée.

Si tel est les cas, l’offre doit être rejetée par l’acheteur public (pouvoir adjudicateur, entité adjudicatrice).

Qu’est-ce qu’une offre irrégulière ? Qu’est-ce qu’une offre inacceptable ? Qu’est-ce qu’une offre inappropriée ? Retour sur la recevabilité des offres.

L’offre irrégulière est une offre incomplète ou une offre ne respecte pas certaines exigences prévues dans les documents de la consultation du marché public : DCE, règlement de la consultation, cahier des charges, CCAP, CCTP (Article L. 2152-2 du Code de la commande publique).

Une offre qui méconnaît la législation applicable, notamment en matière sociale et environnementale, est également irrégulière. Cela peut également être le cas de l’offre qui méconnait les règles relatives à la sous-traitance ou les règles fiscales.

Attention, si la législation en cause entre en vigueur postérieurement à la fin de l’exécution du marché, une offre ne les prenant pas en compte ne peut pas être jugée irrégulière (CE, 19 décembre 2014, Valor’Aisne, n° 384014).

Notons que concernant les concessions et les délégations de service public, une offre est irrégulière lorsqu’elle qui ne respecte pas les caractéristiques minimales du contrat de concession (Article L. 3124-3 du Code de la commande publique).

L’offre anormalement basse est également une offre irrégulière : il s’agit de l’offre dont le prix a été sous-évalué de manière évidente et qui risquerait de compromettre la bonne exécution du marché (articles L 2152-5 et suivants du Code de la commande publique).

Offre irrégulière – exemples

A titre d’exemple, seront notamment considérées comme des offres irrégulières :

  • Les offres ne respectant pas les exigences prévues dans les documents de consultation, dès lors que ces exigences sont dénuées d’ambiguïtés (CE, 23 novembre 2005, SARL Axialogic, n°267494).
  • Les offres comportant des contradictions empêchant l’acheteur de déterminer si elles respectent ou non les exigences des documents de la consultation (CAA Lyon, 9 juin 2011, Société étanchéité service, n°09LY02544).
  • Les offres incomplètes ou non signées, notamment l’offre dont tous les éléments n’auraient pas été chiffrés (CE, 8 mars 1996, M.Pelte, n°133198).
  • Une offre présentant une maquette trop colorée par rapport aux exigences de la consultation (TA Marseille, 6 mai 2020, n°2002357).
  • Une offre qui ne respecte pas les exigences formulées par l’acheteur dans les documents de la consultation. En l’occurence, le système proposé par le candidat ne correspondait pas celui déjà utilisé par l’acheteur et faisait obstacle à l’interopérabilité des équipements prévu par le cahier des charges (TA Besançon, 7 avril 2023, n°2300483).

A l’inverse, le Conseil d’État a récemment considéré qu’une offre n’est pas irrégulière, car elle ne saurait être regardée comme ne respectant pas les exigences du règlement de la consultation au seul motif que le prix qu’elle propose (aux termes de son DQE) est inférieur au montant minimum de l’accord-cadre figurant dans le règlement de la consultation (CE, 24 décembre 2020, Métropole Nice Côte d’Azur, n°445078).

De même, n’est pas irrégulière l’offre qui ne comprend pas un agrément préfectoral (CE, 4 octobre 2019, Société moderne d’assainissement et de nettoiement (SMA), n°421022).

Il a également été jugé qu’une offre n’était pas irrégulière au seul motif que le candidat n’avait pas fourni le bordereau des prix unitaires (BPU) modifié – mais uniquement le BPU initial – dans son offre, la remise du détail quantitatif (DQE) conforme au bordereau des prix modifié attestant que le candidat avait bien tenu compte de cette modification (CE 16 avril 2018, Société SNT Petroni, n° 417235).

Offre inacceptable – Définition

L’offre inacceptable, est une offre qui excède les crédits budgétaires alloués au marché public, établis et qui ont été définis avant le lancement de la procédure (Article L. 2152-3 du Code de la commande publique).

Attention, dans cette hypothèse, l’acheteur public devra démontrer qu’il n’a véritablement pas les moyens d’assumer financièrement une telle offre.

Ainsi, si le budget ou la capacité de financement de l’acheteur public lui permet d’accepter l’offre en cause, il ne peut pas la rejeter au motif qu’elle serait inacceptable.

Offre inacceptable – exemples

A titre d’exemple, le fait qu’une offre dépasse de 25% l’estimation de l’acheteur ne suffira pas pour considérer l’offre comme inacceptable (CE, 24 juin 2011, Office public de l’habitat interdépartemental de l’Essonne, du Val d’Oise et des Yvelines, n° 346665).

En revanche seront inacceptables les offres portant sur un lot et dont le prix excède le montant des crédits budgétaires alloués à ce lot (CE, 17 juillet 2013, Département de la Guadeloupe, n°366884).

A l’inverse, dernièrement, il a été jugé qu’une offre dépassant le montant de l’enveloppe financière n’était pas inacceptable, dès lors que ce montant avait « seulement une valeur indicative » (CAA Nantes, 10 juillet 2020, n°19NT00091).

Offre inappropriée – Définition

Une offre est inappropriée est une offre qui est sans rapport avec le marché public (et son objet) parce qu’elle n’est manifestement pas en mesure, sans modification substantielle, de répondre au besoin et aux exigences de l’acheteur public qu’il a formulés dans les documents de la consultation du marché : DCE, règlement de la consultation, cahier des charges, CCAP, CCTP (Article L. 2152-4 du Code de la commande publique et article L. 3124-4 du code de la Commande publique en matière de concession).

Comme le souligne la Direction des affaires juridiques du Ministère de l’économie, l’offre inappropriée peut être assimilée à une absence d’offre dans la mesure où elle ne répond pas à la solution technique et administrative définie par l’acheteur public et qu’elle ne correspond pas à son besoin.

Offre inappropriée – exemples

Sera notamment considérée comme étant une offre inappropriée :

L’offre qui n’est pas conformes aux spécifications techniques issues de prescriptions règlementaires, nationales et communautaires en matière de protection de l’environnement (CJCE, 4 juin 2009, Commission contre République hellénique, C-250/07).

L’offre proposant des rétroviseurs sans bras alors que l’acheteur demandait des rétroviseurs avec bras (CAA Marseille, 11 juillet 2016, n°15MA01461).

Laurent Bidault Avocat - Novlaw Avocats

Par Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en matière d’innovation appliquée au secteur public (achat innovant, R&D, BIM).

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