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Peut-on exclure un associé d’une SAS ?

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Clauses d’exclusion statutaire des SAS : le Conseil Constitutionnel a tranché

La constitutionnalité de la procédure d’exclusion prévue par les statuts d’une SAS en application des dispositions du premier alinéa de l’article L. 227-16 du code de commerce et du second alinéa de l’article L.227-19 du Code de commerce, consacrant la possibilité d’introduire et de modifier des clauses d’exclusions dans les sociétés par actions simplifiées (SAS), aura été prononcée, finalement, sans grand débat houleux.

La décision du Conseil Constitutionnel était pourtant très attendue par les praticiens, mais aussi par les nombreuses sociétés par actions simplifiées qui composent le paysage économique français. Rappelons-le, même si aujourd’hui la forme sociale la plus répandue est la SARL, l’effectif SAS, depuis sa création en 1994 a crû de manière exceptionnelle. Le succès des SAS s’explique par son régime, lequel offre une grande souplesse de gestion au quotidien. En effet, nulle autre forme sociale n’est aussi proche de l’entreprise que la SAS.

Récemment, l’alinéa 2 de l’article L.227-19 du Code de commerce, introduit par la loi Soilihi n°2019-744 du 19 juillet 2019, est venue modifier la règle de l’unanimité (auparavant requise) pour l’adoption ou la modification des clauses d’exclusion dans les statuts de SAS ; afin de permettre l’introduction et la modification des clauses d’exclusions à la majorité prévue par les statuts.

Cette modification a fait couler beaucoup d’encre, et cela peut se comprendre, puisqu’elle entraîne une précarisation des associés minoritaires, devenant tributaire des associés majoritaires quant à leur droit de demeurer associé.

Ainsi, sans grande surprise, par jugement en date du 8 juillet 2022, le tribunal de commerce de Paris a transmis quatre questions prioritaires de constitutionnalité (QPC). Les dispositions concernées étaient entre autres le premier alinéa de l’article L. 227-16 du code de commerce, lequel dispose que, dans les SAS « dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tendu de céder ses actions » et le second alinéa de l’article L. 227-19 du même code, dans sa rédaction issue de la loi Soilihi, qui dispose que « les clauses statutaires mentionnées aux articles L. 227-14 et L.227-16 ne peuvent être adoptées ou modifiées que par une décision prise collectivement par les statuts ».

En clair, il était soutenu par le requérant que l’application d’une clause d’exclusion à laquelle l’associé possiblement exclu n’aurait pas consenti porterait doublement atteinte au droit de propriété. Premièrement, elle entraînerait une privation de propriété de l’associé qui ne serait pas justifiée par une nécessité publique légalement contestée, en méconnaissance de l’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen (DDHC) ; d’autre part, elle serait une atteinte disproportionnée au droit de propriété garanti par l’article 2 de la DDHC.

Par une décision en date du 9 décembre 2022 (N°2022-1029 QPC), le Conseil Constitutionnel a rejeté les deux arguments. Premièrement, le Conseil Constitutionnel considère que l’exclusion statutaire d’un associé ne peut être assimilée à une privation de propriété au sens de l’article 17 de la DDHC. Deuxièmement, le Conseil Constitutionnel estime que si le dispositif statuaire d’exclusion dans les SAS, adopté en application de l’article L. 227-16 du code de commerce, porte atteinte au droit de propriété de l’associé sur ses actions, cette atteinte est proportionnée par un motif d’intérêt général et proportionnée à l’objectif poursuivi.

En effet, le Conseil Constitutionnel a estimé que le législateur a entendu garantir la poursuite de l’activité de la société en préservant la cohésion de son actionnariat

Si la décision du Conseil Constitutionnel peut surprendre à bien des égards, notamment par rapport à l’atteinte du droit de propriété, en réalité, une telle décision s’explique par les garanties offertes par le dispositif statutaire d’exclusion des SAS. La première garantie offerte par le régime statutaire d’exclusion est le respect d’une procédure statutaire, devant elle-même garantir les grands principes de la défense, notamment, le respect du contradictoire. En effet, selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, la décision d’exclure un associé ne peut être prise qu’à la suite d’une procédure prévue par les statuts.

La deuxième garantie offerte porte sur les motifs d’exclusions. En effet, les motifs d’exclusion, en plus d’être conformes à l’intérêt social et à l’ordre public, doivent être stipulés dans les statuts.

Ces deux garanties sont des garde-fous impératifs pour ne pas exposer les associés minoritaires à l’arbitraire

À présent que les clauses d’exclusion peuvent être adoptées ou modifiées à la majorité, le risque d’une augmentation des contentieux liés à la mise en œuvre de telles clauses est réel.

En effet, les associés minoritaires, bien qu’étant dans une position délicate, ne sont pas pour le moins dépourvus de recours.

Tout d’abord, et tel que souligné par le Conseil Constitutionnel « la décision d’exclusion peut être contestée par l’associé devant le juge, auquel il revient alors de s’assurer de la réalité et de la gravité du motif retenu ». En effet, l’appréciation de l’abus dans l’application de la clause d’exclusion demeure l’apanage du juge. Rappelons à ce titre qu’une décision d’exclusion abusive encourt la nullité.

Ensuite, l’associé exclu dispose toujours de la possibilité de se prévaloir de l’abus de majorité, et tenter d’obtenir la nullité de la décision. Il lui faut alors prouver que le seul objectif de cette décision est de favoriser les majoritaires au détriment des minoritaires, plutôt que de garantir l’intérêt social.

Enfin, il convient de souligner que pour les SAS constituées avant l’entrée en vigueur de la loi Soilihi n°2019-744 du 19 juillet 2019, le maintien de l’unanimité pourrait être obtenu par l’application du principe de la survie de la loi ancienne applicable aux contrats en cours.

Aussi, et au vu des nombreux recours contentieux offerts aux associés minoritaires de la SAS, il est fortement conseillé aux associés majoritaires de maintenir l’unanimité. Toutefois, et puisque les nouvelles dispositions permettent aux associés majoritaires d’introduire ou modifier une clause d’exclusion sans l’approbation des actionnaires minoritaires, il est conseillé, pour éviter tout contentieux relatif à la fixation discrétionnaire du prix de rachat, d’indiquer en amont, que le prix de rachat sera fixé par un expert conformément à l’article 1843-4 du Code civil. Il est vrai que cette méthode entraîne une absence de visibilité sur la méthode d’évaluation qui pourrait être retenue par l’expert pour les associés susceptibles d’exclus. Ainsi, les associés majoritaires peuvent retenir cette option dans un second temps après avoir proposé à l’associé exclu une méthode d’évaluation conventionnelle du prix de rachat.

Margaux Cabanes, collaboratrice dans le département Droit des Affaires du cabinet NovLaw Avocats dirigé par Baptiste Robelin.

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