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PNF : 10 ans d’un acteur qui a contribué a façonner une compliance à la française

Le PNF (parquet national financier) célèbre cette année les 10 ans de sa création. L’occasion parfaite pour un retour sur ses origines, son rôle crucial dans la lutte contre la corruption, comme accélérateur d’une culture compliance et son bilan pour sa première décennie d’exercice.

L’émergence d’un parquet pour accompagner l’ère de la compliance

Le PNF a été créé par la loi du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude fiscale et la grande délinquance économique et financière et a démarré son activité le 1er février 2014.

Le PNF a pour mission de « s’attaquer à la racine de la défiance de l’opinion, qui demande des garanties sur l’intégrité de ceux qui exercent des responsabilités politiques et d’avoir une plus grande efficacité dans la lutte contre la corruption et l’évasion fiscale », c’est l’objectif poursuivi après la création de ce parquet.

Créé la même année que la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et dans la foulée de « l’affaire Cahuzac » (scandale déclenché en décembre 2012 par la révélation de l’affaire de fraude fiscale mettant en cause Jérôme Cahuzac, ministre délégué chargé du Budget), le PNF s’inscrit dans cette émergence d’un mouvement éthique et compliance qui imprègne depuis le paysage juridique et judiciaire français.

Composée de magistrats spécialisés et capables d’investiguer sur les montages financiers les plus épineux, cette institution dispose d’une compétence nationale lui permettant de conduire des enquêtes relatives à des faits commis sur l’ensemble du territoire français et même sous certaines conditions à l’étranger. Son action est spécialisée car elle est ciblée sur les enquêtes pénales les plus complexes dans le domaine de la délinquance économique et financière.

Les principales missions du PNF sont les suivantes :

  • Repérer et punir les atteintes à la probité, telles que la corruption, le trafic d’influence, le favoritisme, le détournement de fonds publics, la prise illégale d’intérêt, ou l’obtention illicite de suffrage en matière électorale.
  • Punir les atteintes aux finances publiques telles que les fraudes fiscales, le blanchiment d’argent, ou l’escroquerie à la TVA.

  • Réguler les atteintes au bon fonctionnement des marchés financiers par la diffusion de fausses informations ou trompeuses.
  • Lutter contre les atteintes au libre jeu de la concurrence.

Si l’efficacité du parquet est reconnue, cette arme de lutte contre la corruption et la délinquance économique est renforcée en 2016 avec la loi dite « Sapin 2 » du 9 décembre 2016, qui créé une nouvelle procédure : la convention judiciaire d’intérêt public (CJIP).

La CJIP pour accélérer lutte contre la corruption et la délinquance économique

Équivalent français de la justice négociée Anglo-Saxonne, la CJIP permet aux personnes morales mises en cause pour corruption, trafic d’influence, blanchiment, blanchiment aggravé ou blanchiment de fraude fiscale de négocier avec le parquet :

  • le versement d’une amende au Trésor public, dont le montant sera fixé de « manière proportionnée aux avantages tirés des manquements constatés dans la limite de 30 % du chiffre d’affaires moyen annuel calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date du constat de ces manquements ».
  • la mise en œuvre d’un programme de mise en conformité comprenant une ou plusieurs mesures de prévention et de détection. Ce programme de conformité est alors contrôlé par l’Agence française anticorruption.

Bien que le PNF en soit à l’initiative, la CJIP doit toute de même être homologuée par un magistrat du siège qui s’assurera de la régularité de la procédure et de la conformité des mesures convenues. Elle permet aux personnes visées d’échapper à la poursuite du parquet et offre ainsi la possibilité de prononcer l’extinction de l’action publique si la personne poursuivie respecte son engagement convenu dans la CJIP.

Ce mécanisme est l’arme déterminante du PNF dans sa lutte contre les délinquances économique et financière. La CJIP a largement fait ses preuves pour attester de son efficacité en tant qu’alternative aux poursuites pénales réservée aux personnes morales avec 20 CJIP validées depuis 2016.

Plus récemment, la loi du 24 décembre 2020 complète le mécanisme de CJIP en introduisant la possibilité de conclure des CJIP en matière environnementale qui permet de proposer à une personne morale visée par des délits prévus dans le code de l’environnement de conclure une CJIP et d’échapper aux poursuites pénales en contrepartie :

  • Du versement d’une amende d’intérêt public au Trésor public.
  • De la mise œuvre d’un programme de conformité contraignant.
  • De la réparation du préjudice écologique dont elle est à l’origine.

Confirmant le succès du mécanisme de la CJIP, le PNF est venu clarifier les conditions dans lesquels les entreprises pourraient en bénéficier, à travers la publication de lignes directrices sur la mise en œuvre de la CJIP en janvier 2023.

Avec 5 CJIP prononcées en 2023, le bilan de cette année est positif. A titre d’exemple, le 15 mai 2023 (publiée le 17 mai 2023), une CJIP est conclue[4] entre le procureur de la République financier et la société Guy Dauphin Environnement (Groupe Derichebourg) au terme de laquelle cette société devra verser une amende de 1 230 000 d’euros pour des faits de trafic d’influence dans le cadre de l’obtention de la délivrance d’une autorisation d’installation d’un centre d’enfouissement de résidus de broyage automobile dans l’Orne.

Plus récemment, le 28 novembre 2023 (publiée le 4 décembre 2023), une amende d’intérêt public de 13 373 000 d’euros est prononcée à l’encontre des sociétés SEVE GROUP SARL et SEDIVER SAS pour mettre fin à des poursuites pour corruption d’agent public étranger.

Le montant des 5 amendes prononcées par les CJIP conclues en 2023 entre le procureur de la République financier et les personnes morales s’élèvent à plus de 246 000 000 d’euros.

PNF : Une décennie d’action qui dessine un avenir propice à la compliance

Ce 23 janvier 2024, au cours de l’audience de rentrée du parquet national financier, le procureur de la République financier, Jean-François Bohnert a dressé le bilan de l’activité du parquet au cours de l’année 2023. Il a souligné ainsi l’importante hausse de l’exercice du parquet avec un total de 111 condamnations (une augmentation notable de 58,6% par rapport à l’année 2022), 5 conventions judiciaires d’intérêt public conclues et 781 procédure. Il a indiqué que le montant des amendes prononcées en faveur du Trésor public dans les procédures terminées se chiffrait à 482,8 millions d’euros.

Cette année est très positive pour le parquet national financier et permet de dresser un bilan plus global pour fêter les 10 ans de la mise en place de cette institution.

Depuis le début de son activité, le PNF a permis au Trésor public d’obtenir plus de 12 milliards d’euros. Le parquet national financier a compté plus de 3200 procédures initiées, 500 personnes condamnées et 20 conventions judicaires d’intérêt public conclues.

Le secteur phare de cette institution reste la lutte contre la délinquance fiscale avec 363 personnes condamnées parmi les 532 condamnées depuis sa création.

La création du PNF, puis de la CJIP, a permis de faire évoluer drastiquement le traitement des affaires d’anticorruption et d’atteinte à la probité – qui représentent d’ailleurs plus de 47 % des procédures du PNF en 2023.

Le nombre de procédures traitées depuis la mise en place du PNF n’a pas cessé de s’accroitre depuis 2014 allant de 211 procédures pour l’année de sa création (508 procédures en cours en 2018, 601 procédures en cours en 2020) à 781 procédures en cours en 2023.

C’est l’année 2023 qui est marquée par la plus importante hausse des procédures en cours avec plus de 300 procédures initiées au fil de cette année.

Le bilan de cette première décennie est très prometteur pour le parquet national financier, c’est pourquoi certaines institutions comme la Cour des comptes ou l’OCDE plaident en faveur d’un renforcement de ses moyens d’actions.

Samuel

Par Samuel Guetta Avocat Associé Expert en Compliance du cabinet Novlaw Avocats,

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