Airbnb accusé de concurrence déloyale par les hôteliers

Airbnb accusé de concurrence déloyale par les hôteliers

Le marché locatif en France connaît des tensions croissantes dans les zones urbaines attractives. Les locations de courte durée, notamment celles facilitées par des plateformes comme Airbnb, ont aggravé cette situation en diminuant la disponibilité des logements pour les résidents permanents.

Il devient de plus en plus difficile pour les particuliers de trouver des résidences principales dans certaines communes. Il y aurait environ 800 000 logements meublés destinés au tourisme en France, sur un total de 38 millions de logements.

Afin de pallier ces déséquilibres, le gouvernement envisage d’encadrer plus strictement les locations de meublés de tourisme (une proposition de loi d’encadrement des locations saisonnières qui pourrait être reprise par le nouveau gouvernement de Michel Barnier).

La mesure principale du projet de loi concerne la réduction de l’abattement fiscal. Jusqu’ici, les propriétaires pouvaient bénéficier d’un abattement de 71 % sur leurs revenus locatifs dans les zones tendues, avec un plafond fixé à 180 000 € de recettes locatives. Cet abattement pourrait être réduit à 30 % pour les meublés touristiques, si la loi était adoptée, harmonisant ainsi leur fiscalité avec celle des locations longue durée.

Dans ce contexte, le 20 juin dernier, une vingtaine d’hôteliers, représentés par le syndicat de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie, premier syndicat patronal du secteur hôtelier, ont assigné en justice la plateforme Airbnb pour « concurrence déloyale » devant le tribunal de commerce de Lisieux afin de lui réclamer la somme de 9,2 millions d’euros de dédommagement.

En l’espèce, le syndicat a agi au nom de ses membres, principalement des hôteliers, pour contester ce qu’il considère comme une concurrence déloyale de la part des plateformes comme Airbnb. À ce titre, il a pu souligner plusieurs manquements administratifs, légaux et réglementaires de la plate-forme, notamment l’absence de numéro d’enregistrement dans certaines communes, le non-paiement de la taxe de séjour et la publication d’annonces dépassant les 120 jours de location pour les résidences principales.

Il demande par conséquent une indemnisation à hauteur de 9,2 millions d’euros.

Qu’est-ce qu’un acte de concurrence déloyale ?

Pour rappel, la concurrence déloyale est le fait, dans le cadre d’une concurrence autorisée, de faire un usage excessif de sa liberté d’entreprendre, en recourant à des procédés contraires aux règles et usages, occasionnant un préjudice.

Le droit de la concurrence déloyale constitue fondamentalement le droit commun de la concurrence. Le principe de l’action en concurrence déloyale semble avoir été rendu par la cour d’appel de Paris le 8 avril 1842 où les juges du fond ont estimé que « si la libre concurrence est permise au commerce, cela ne peut sentendre que dune concurrence loyale, et non de celle qui tendrait à nuire à lindustrie des autres par des moyens que réprouveraient la délicatesse et la probité commerciale ».

La concurrence déloyale, en tant que limite à la liberté du commerce et de l’industrie, doit être appréciée à l’aune de celle-ci (CA Paris, 12 sept. 2017, n°16/04469). Elle « consiste dans des agissements s’écartant des règles générales de loyauté et de probité professionnelle applicables dans les activités économiques et régissant la vie des affaires » (TGI Paris, 7 sept. 2018, n°16/12074)

Ainsi, la lutte contre la concurrence déloyale protège indirectement les intérêts des consommateurs. En outre, elle vise à rétablir un équilibre dans le secteur en s’assurant que tous les acteurs respectent les mêmes règles.

En l’espèce, les hôteliers considèrent qu’ils sont victimes d’une concurrence déloyale dans la mesure où ils sont assujettis à des règles plus strictes qu’Airbnb alors que la plateforme capte une part substantielle du marché de l’hôtellerie.

Quelles sont les conditions nécessaires pour que les hôteliers puissent obtenir une indemnisation de leur préjudice causé par la concurrence déloyale d’Airbnb ?

Trois conditions doivent être réunies afin de caractériser la concurrence déloyale, à savoir :

  • Une faute, qui vise tous procédé contraire aux usages du commerce et à l’honnêteté professionnelle, indépendamment de l’intention de nuire. Il s’agit du parasitisme, que la Cour de cassation a défini comme le fait de « tirer indûment profit du savoir-faire et des efforts humains et financiers consentis par une entreprise, victime des agissements de la personne qui usurpe la notoriété acquise par ce concurrent ». (, 27 juin 1995, n° 93-18.601)
  • Un préjudice, qui concerne tout dommage subi, générateur d’un trouble commercial. Le préjudice consiste principalement en la perte de la clientè De la même manière, la perte de quelques clients suffit à caractériser le préjudice.” (Civ. 2e, 4 févr. 2010, n° 09-10.630)
  • Un lien de causalité, généralement induit de la faute et du dommage.

Il conviendra au demandeur, en l’occurrence au syndicat UMIH représentant des hôteliers, de rapporter la preuve de ce qu’il dénonce.

La preuve est libre et se fait par tous moyens. Tous les écrits sont pertinents et doivent être versés aux débats (lettres, courriels, attestations, rapports techniques, etc.)

Pour évaluer les préjudices, il sera nécessaire pour le syndicat représentant de fournir les comptes, les bilans et autres documents comptables, ainsi qu’une attestation de l’expert-comptable si cela s’avère nécessaire.

Quelles sanctions pourraient être prononcées par le Tribunal si un acte de concurrence déloyale est imputé à Airbnb ?

Les actes de concurrence déloyale sont sanctionnés par une action en responsabilité civile, fondée sur les articles 1240 et 1241 du Code civil. Par conséquent, le juge peut condamner l’auteur à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, qui peut être matériel et résulter de la perte de clientèle ou de la perte de chance de la développer, ou moral et prendre la forme d’un trouble commercial.

Le syndicat UMIH peut également saisir le juge des référés, lequel a la faculté de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire cesser le trouble occasionné, au besoin sous astreinte (C. pr. civ., art. 809 et 873), et prononcer des mesures d’instruction (C. pr. civ., art. 145).

La décision sera rendue dans les prochaines semaines. Elle est évidemment très attendue par l’ensemble des professionnels du secteur du CHR et crainte par les plateformes de location saisonnière, qui considèrent que la location saisonnière de meublé de tourisme est déjà soumise à des règles strictes.

Baptiste

Par Agathe Arzul en collaboration ave Baptiste Robelin, Avocat Associé Expert en Bail Commercial et Droit Immobilier du cabinet Novlaw Avocats,

Cet article vous a plu ?

Vous recherchez un conseil ?

Cet article vous a plu, partager !

Contact

Laissez-nous votre message

Vous souhaitez avoir plus d’informations concernant nos services, ou bien prendre un rendez-vous ? Contactez-nous via les coordonnées ou le formulaire ci-dessous.

Formmulaire de Contact

(*) champ obligatoire requis

Novlaw Avocats - Bureau de Paris

53 Boulevard de Magenta - 75010 PARIS

Tél. : 01 44 01 46 36

Email : contact@novlaw.fr

Novlaw Avocats - Bureau de Lyon

123 Rue Tête d’Or - 69003 Lyon

Tél. : 04 88 76 82 29

Email : contact@novlaw.fr

Contact

Laissez-nous votre message

Vous souhaitez avoir plus d’informations concernant nos services, ou bien prendre un rendez-vous ? Contactez-nous via les coordonnées ou le formulaire ci-dessous.

Novlaw Avocats Bureau de Paris

53 Boulevard de Magenta – 75010 PARIS

Tél. : 01 44 01 46 36

Email : contact@novlaw.fr

Novlaw Avocats Bureau de Lyon

123 Rue Tête d’Or – 69003 Lyon

Tél. : 04 88 76 82 29

Email : contact@novlaw.fr

Formulaire de contact

(*) champ obligatoire requis