permis de construire, autorité administrative

Modifier sa demande de permis de construire en cours d’instruction

Que faire lorsque l’autorité administrative vous informe que votre projet de construction n’est pas totalement conforme aux dispositions d’urbanisme ?

Il ne faut en tout cas pas espérer qu’elle autorise le permis de construire en l’assortissant de prescriptions spéciales.

Le Conseil d’État vient en effet de juger que l’autorité administrative (généralement la commune) n’est jamais tenue d’autoriser avec prescriptions un projet d’urbanisme qui ne respecterait pas certaines règles d’urbanisme.

Par conséquent, en cas de refus d’autorisation, le pétitionnaire qui conteste ce refus devant le juge administratif ne peut pas soutenir que son projet aurait pu être autorisé moyennant des prescriptions spéciales destinées à s’assurer que les travaux qu’il projette soient conformes aux règles de droit de l’urbanisme applicables.

CE, avis du 11 avril 2025, n° 498803

Cette solution se justifie par la possibilité laissée au pétitionnaire de modifier sa demande d’autorisation d’urbanisme en cours d’instruction.

Après avoir exposé le contexte de l’affaire, l’avis ici commenté sera donc l’occasion de préciser dans quelle mesure un pétitionnaire peut, en cours d’instruction, modifier sa demande d’autorisation d’urbanisme.

Un refus ne peut se muer en une autorisation assortie de prescriptions spéciales

Dans l’affaire ici commentée, le Conseil d’État se trouvait saisi d’une demande d’avis du Tribunal administratif sur le point de savoir si un pétitionnaire dont le projet a été refusé pouvait, dans le cadre du recours contre ce refus, soutenir que l’autorité compétente aurait pu autoriser son projet en l’assortissant de prescriptions spéciales destinées à s’assurer de sa conformité aux règles d’urbanisme qu’il méconnaissait.

À cette question, la Haute Juridiction a répondu par la négative.

Précisément, le Conseil d’État a rappelé qu’il est loisible au pétitionnaire d’apporter à son projet des modifications en cours d’instruction, qui plus est lorsque l’autorité administrative compétente lui a fait part des absences de conformité de son projet à certaines règles d’urbanisme.

Pour ce faire, les modifications doivent être apportées avant l’intervention de la décision, tacite ou expresse, afin que cette décision finale porte sur le projet ainsi modifié.

De cette faculté offerte au pétitionnaire, le Conseil d’État en déduit que l’autorité administrative n’est jamais tenue d’autoriser un projet non conforme à la réglementation en l’assortissant de prescriptions spéciales destinées à le rendre conforme.

Par conséquent, il en conclut que « le pétitionnaire auquel est opposée une décision de refus de permis de construire ou d’opposition à déclaration préalable ne peut utilement se prévaloir devant le juge de l’excès de pouvoir de ce que l’autorité administrative compétente aurait dû lui délivrer l’autorisation sollicitée en l’assortissant de prescriptions spéciales. »

Il n’appartient donc pas au juge d’apprécier si, en lieu et place d’un refus, l’autorité administrative avait pu autoriser un projet en l’assortissant de prescriptions spéciales.

Autrement dit, c’est au pétitionnaire de modifier son projet en cours d’instruction s’il est informé que ce dernier ne respecte pas une partie des règles d’urbanisme qui lui sont applicables.

Toutefois, cette faculté n’est pas sans limite.

À quelles conditions le pétitionnaire peut-il modifier sa demande de permis de construire ?

Le code de l’urbanisme n’interdit pas, mais n’encadre pas non plus, la possibilité de modifier en cours d’instruction sa demande de permis de construire ou de déclaration préalable.

C’est le juge administratif qui a validé cette pratique, tout en lui apposant des limites (CE, 1er décembre 2023, n° 448905).

D’une part, les modifications (qui consistent souvent dans l’envoi de nouvelles pièces) doivent parvenir à l’autorité administrative compétente avant sa décision finale.

D’autre part, les modifications ne doivent pas changer la nature du projet.

Si elles changent la nature du projet, il s’agira d’une demande nouvelle, nécessitant le dépôt d’un dossier complet et faisant partir un nouveau délai d’instruction.

Quels sont les effets de la modification du projet sur les délais d’instruction ?

Pour déterminer les effets de l’envoi de pièces modificatives d’un permis de construire sur la procédure d’instruction de la demande, une distinction doit être opérée entre les modifications mineures et les modifications majeures.

C’est à l’autorité compétente de déterminer si les modifications sont mineures ou majeures sur la base de trois critères :

    • L’objet des modifications ;
    • L’importance des modifications ;
    • La date de demande de modifications.

Notons que des modifications importantes ou tardives seront regardées comme majeures.

De même, si les modifications portent sur un point du projet qui requiert l’avis d’un service spécifique, elles pourront être regardées comme majeures par leur objet dès lors que le service en question devra rendre un nouvel avis.

Lorsque l’autorité compétente reçoit une demande de modifications, elle doit, au regard de ces trois critères, vérifier si leur examen pourra être réalisé dans le délai d’instruction restant, compte tenu notamment des nouvelles vérifications ou consultations que cela peut impliquer.

Si le délai d’instruction ne peut pas être respecté, il s’agit alors de modifications majeures.

Dans ce cas, l’autorité administrative se trouve saisie d’une demande nouvelle dont les pièces modificatives se substituent aux pièces de la première demande.

Avant l’expiration du délai d’instruction, l’autorité administrative doit ainsi informer par tout moyen le pétitionnaire du fait que les modifications sont majeures et font courir un nouveau délai d’instruction, au terme duquel le projet sera réputé être accepté par l’administration en l’absence de réponse.

À l’inverse, des modifications qui peuvent être traitées dans le délai d’instruction initial sont mineures et n’ont, ce faisant, aucune incidence sur ce délai.

Ces modifications ne feront donc pas obstacle à la naissance d’une décision tacite d’acceptation en l’absence de réponse de l’autorité compétente à l’issue du délai d’instruction qui a été indiqué lors du dépôt de la demande initiale.

Par conséquent, l’autorité administrative dispose d’un large pouvoir d’appréciation face à des demandes de modifications et peut adapter le délai d’instruction, en fonction de l’objet, de l’importance et de la date des modifications.

Laurent Bidault Avocat - Novlaw Avocats

Coécrit avec Nicolas Machet & Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en matière d’innovation appliquée au secteur public (achat innovant, R&D, BIM).

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