Bail commercial et liquidation judiciaire

Bail commercial et liquidation judiciaire : la Cour de cassation précise les règles du jeu

Dans un arrêt rendu le 12 juin 2025 (n° 23-22.076), la chambre commerciale de la Cour de cassation apporte une précision importante en matière de baux commerciaux et de procédures collectives.

Elle rappelle que la liquidation judiciaire ouverte à la suite de la résolution d’un plan de redressement constitue une nouvelle procédure, empêchant la résiliation du bail pour des loyers impayés postérieurs à l’ouverture du redressement judiciaire, sauf exception. Une décision qui renforce la protection du débiteur tout en encadrant strictement les droits du bailleur.

Rappel des faits

L’affaire opposait la société Pasaryne, agissant en qualité de mandataire judiciaire, à la société Kabrousse, locataire d’un local commercial. Cette dernière avait bénéficié d’un plan de redressement dans le cadre d’une procédure collective. Le bailleur, constatant le non-paiement des loyers postérieurs à l’ouverture du redressement judiciaire, avait saisi le juge-commissaire pour faire constater la résiliation du bail.

La demande avait été accueillie en première instance, assortie de l’exécution provisoire. La décision fut par la suite frappée d’appel. Entre-temps, le plan de redressement fut résolu et la société locataire placée en liquidation judiciaire. La cour d’appel pouvait-elle alors confirmer la résiliation du bail ? La Cour de cassation répond par la négative.

Une nouvelle procédure, un nouveau cadre

La haute juridiction rappelle que la liquidation judiciaire ouverte concomitamment à la résolution d’un plan de redressement constitue une nouvelle procédure collective. Cette nouvelle procédure fait obstacle à la résiliation du bail pour des loyers échus après l’ouverture du redressement judiciaire, sauf si une décision de résiliation a acquis force de chose jugée avant l’ouverture de cette nouvelle procédure.

Autrement dit, si la décision de résiliation est encore en cours d’appel au moment de l’ouverture de la liquidation judiciaire, elle ne peut pas être opposée dans le cadre de cette nouvelle procédure. C’est précisément ce qui s’est produit dans l’affaire jugée : la décision de première instance n’avait pas encore acquis force de chose jugée, rendant la résiliation inopposable.

Un encadrement strict des droits du bailleur

Le droit des procédures collectives encadre de manière rigoureuse les possibilités de résiliation du bail commercial par le bailleur. Ce dernier ne peut pas agir pour non-paiement des loyers antérieurs à l’ouverture de la procédure (article L. 622-21 du Code de commerce). En revanche, il peut demander la résiliation judiciaire ou faire constater la résiliation de plein droit pour défaut de paiement des loyers postérieurs, mais seulement après un délai de trois mois suivant le jugement d’ouverture (articles L. 622-14, L. 631-14 et L. 641-12).

Lorsque la procédure est simplement convertie (par exemple, d’un redressement en liquidation), il ne s’agit pas d’une nouvelle procédure : le délai de trois mois court à compter de la première ouverture. En revanche, si la liquidation est ouverte en même temps que la résolution du plan, il s’agit bien d’une nouvelle procédure, et un nouveau délai de trois mois commence à courir.

Une jurisprudence cohérente

La décision du 12 juin 2025 s’inscrit dans une jurisprudence constante de la Cour de cassation en ce qui concerne le sort du bail commercial dans une procedure collective. Déjà, dans un arrêt du 18 janvier 2023 (n° 21-15.576), la Cour avait jugé que la résolution d’un plan suivie immédiatement d’une liquidation judiciaire ouvrait une nouvelle procédure, impliquant un nouveau point de départ pour le délai de résiliation du bail.

Elle avait également précisé que les loyers impayés durant la première procédure devaient être traités comme des créances antérieures à la nouvelle procédure. Toutefois, si une décision de résiliation a été rendue avant l’ouverture de cette nouvelle procédure et a acquis force de chose jugée, le bailleur peut s’en prévaloir.

Une décision équilibrée

Cette jurisprudence vise à protéger l’entreprise en difficulté contre des ruptures brutales de contrats essentiels à sa survie, tout en maintenant un équilibre avec les droits du bailleur. Elle impose à ce dernier une vigilance accrue dans le suivi des procédures et des délais, et l’incite à agir rapidement pour faire constater la résiliation du bail avant qu’une nouvelle procédure ne vienne rebattre les cartes.

Dans le cas contraire, il devra patienter à nouveau trois mois avant de pouvoir engager une nouvelle action, cette fois dans le cadre de la liquidation judiciaire.

En conclusion

L’arrêt du 12 juin 2025 confirme la complexité du droit des procédures collectives et l’importance d’une lecture rigoureuse des délais et des effets de chaque phase procédurale. Pour les bailleurs comme pour les praticiens du droit, il s’agit d’un rappel salutaire : en matière de baux commerciaux, chaque jour compte, et chaque décision doit être anticipée avec précision.

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