Sommaire
- Démonstration de l’intérêt à agir contre un ICPE
- Intérêt à agir contre le permis de construire d’une unité de méthanisation
- Irrecevabilité de l’action d’une association contre un permis de construire d’une unité de méthanisation
- Incomplétude du dossier de demande d’enregistrement d’une ICPE (unité de méthanisation)
- Complétude du dossier de demande d’autorisation environnementale et des études d’impact concernant une unité de méthanisation
- La simple correction d’une erreur matérielle de la déclaration ICPE n’est pas une demande de modification
- Possibilité de contester la preuve de dépôt d’une déclaration d’une ICPE
- Unité de méthanisation et procédure d’autorisation environnementale
- La production de biogaz par méthanisation est une activité liée et nécessaire à des exploitations agricoles
- Unité de méthanisation et atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique (risques de nuisances olfactives)
- Exploitation d’une unité de méthanisation et indemnisation des pertes d’exploitation
- L’approche de NOVLAW Avocats

Contentieux des unités de méthanisation en 2023
Le présent article a pour objet de présenter plusieurs décisions rendues au cours des 12 derniers mois en matière d’unité de méthanisation.
Ces décisions permettent d’illustrer les arguments qui peuvent être opposés – tant pour défendre que contester – l’installation d’un projet d’unité de méthanisation, mais également ceux par l’exploitant d’une telle installation notamment vis-à-vis de son cocontractant public
Démonstration de l’intérêt à agir contre un ICPE
S’agissant des tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers que le fonctionnement de l’installation, rappelons qu’ils peuvent contester la décision en matière d’ICPE dans un délai de 4 mois à compter de sa publication (Article R. 514-3-1 du Code de l’environnement).
Pour mémoire, le demandeur (l’exploitant) dispose lui d’un délai de 2 mois à compter de la notification de cette décision pour la contester.
Attention, le juge administratif doit apprécier si les tiers qui contestent une décision prise au titre de la police des installations classées justifient d’un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l’annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l’installation en cause, appréciée notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux (Article R. 514-3-1 du Code de l’environnement).
Par exemple, les propriétaires d’un château à proximité duquel la construction d’une installation de méthanisation et de combustion comprenant plusieurs bâtiments et fosses à environ 350 mètres d’un château est envisagée ont un intérêt à agir. Il va de même au regard du fait que l’exploitation de l’installation est susceptible de comporter des risques de pollution des sols et du cours d’eau ou des risques de nuisances olfactives et sonores pour les occupants (CAA Nantes, 7 mars 2023, n°21NT00131).
Intérêt à agir contre le permis de construire d’une unité de méthanisation
Classiquement l’intérêt à agir de tiers dans le cadre d’un recours contre un permis de construire portant sur une unité de méthanisation s’apprécie au regard de l’article L. 600-1-2 du Code de l’urbanisme.
Ainsi, le requérant doit faire état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que l’atteinte résultant du projet est susceptible d’affecter directement les conditions d’occupation, d’utilisation ou de jouissance de son bien.
Dans cette affaire, les requérants justifiaient d’un intérêt à agir contre le permis de construire de l’unité de méthanisation dans la mesure où leurs parcelles étaient mitoyennes de celle du projet ou situées dans un rayon compris entre 600 et 800 mètres de l’unité de méthanisation projetée. De plus, il relevé le risque de nuisances olfactives dans la mesure où le projet le stockage des déchets en extérieur avant incorporation dans le digesteur est de nature à émettre des odeurs, ainsi que l’épandage des digestats à la suite de la méthanisation (CAA Bordeaux, 23 mai 2023, n°21BX00134).
Irrecevabilité de l’action d’une association contre un permis de construire d’une unité de méthanisation
La Cour rappelle ici qu’en l’absence, dans les statuts d’une association, de stipulation réservant expressément à un autre organe la capacité de décider de former une action devant le juge administratif, celle-ci est régulièrement engagée par l’organe tenant des mêmes statuts le pouvoir de représenter en justice cette association. Et dans le silence desdits statuts sur ce point, l’action ne peut être régulièrement engagée que par l’assemblée générale.
Dans cette affaire, eu égard le silence des statuts de l’association, le président l’association requérante ne pouvait être régulièrement habilité que par une délibération de l’assemblée générale, et non pas par le conseil d’administration (CAA Bordeaux, 18 juillet 2023, n°22BX02295).
Incomplétude du dossier de demande d’enregistrement d’une ICPE (unité de méthanisation)
Les inexactitudes, omissions ou insuffisances qui pourraient éventuellement affecter le dossier de demande d’enregistrement d’une ICPE ne sont pas automatiquement susceptibles de vicier la procédure.
Ce ne sont celles qui ont eu pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative, qui sont susceptible d’entacher d’irrégularité l’autorisation.
À titre d’illustration, il a été jugé qu’un dossier d’enregistrement était insuffisant car les incidences du projet sur la faune, la flore et les habitats naturels étaient présentées de façon trop succincte. De plus, le dossier ne comportait pas d’éléments suffisants permettant d’apprécier la compatibilité du projet avec le SDAGE et le SAGE (CAA Nantes, 7 mars 2023, n°21NT00131).
Complétude du dossier de demande d’autorisation environnementale et des études d’impact concernant une unité de méthanisation
Dans cette affaire, la Cour administrative rappelle classiquement que les inexactitudes, omissions ou insuffisances affectant le dossier de demande d’autorisation environnementale ne sont susceptibles de vicier la procédure et ainsi d’entacher d’irrégularité l’autorisation que si elles ont eu pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative (CAA Nantes, 2 août 2023, n° 21NT00177).
Il en va de même s’agissant des études d’impact, la Cour rappelant que les inexactitudes, omissions ou insuffisances d’une étude d’impact ne sont susceptibles de vicier la procédure, et donc d’entraîner l’illégalité de la décision prise au vu de cette étude, que si elles ont pu avoir pour effet de nuire à l’information complète de la population ou si elles ont été de nature à exercer une influence sur la décision de l’autorité administrative.
Tant le dossier de demande d’autorisation environnementale que les études d’impact ont été jugés conformes à ces principes par le juge administratif.
La simple correction d’une erreur matérielle de la déclaration ICPE n’est pas une demande de modification
La simple demande de l’exploitant d’une unité de méthanisation qui a pour objet de corriger une erreur matérielle de la déclaration initiale et de compléter le dossier, et qui a été présentée sur le fondement de l’article R. 512-54 II du code de l’environnement, ne peut pas s’analyser comme une demande de modification des prescriptions applicables qui serait susceptible de faire l’objet d’une décision implicite de rejet en application notamment de l’article R. 512-52 du Code de l’environnement (CAA Lyon, 29 mars 2023, n°21LY00200).
Possibilité de contester la preuve de dépôt d’une déclaration d’une ICPE
Dans une affaire suivie par le cabinet, le Conseil d’État a considéré que la preuve de dépôt d’une déclaration d’une installation classée pour la protection de l’environnement prévue à l’article R. 512-48 du code de l’environnement est constitutive d’une décision faisant grief qui est donc susceptible de faire l’objet d’un recours devant les juridictions administratives par application des articles L. 512-8 et L. 514-6 du code de l’environnement (CE, 15 septembre 2022, n°463612).
Unité de méthanisation et procédure d’autorisation environnementale
La Cour relève dans cette affaire que compte tenu de l’importance du projet d’unité de méthanisation, des impacts initiaux importants que celle-ci pourrait engendrer et de sa localisation dans un milieu présentant une sensibilité environnementale notable (zone de protection Natura 2000), ce projet aurait normalement dû faire l’objet d’une évaluation environnementale et être instruit selon la procédure de l’autorisation environnementale.
C’est donc à juste titre que le tribunal administratif a retenu le moyen tiré de ce qu’en s’abstenant de soumettre le projet à la procédure d’autorisation environnementale (prévue à l’article L. 512-7-2 du Code de l’environnement), laquelle prévoit la réalisation par le pétitionnaire d’une étude d’impact et l’organisation d’une enquête publique, qui présentent le caractère d’une garantie pour le public et sont susceptibles d’exercer une influence sur le sens de la décision, le préfet a entaché sa décision d’un vice de procédure de nature à entrainer l’annulation de l’arrêté en litige (CAA Bordeaux, 23 mai 2023, n°21BX00134).
La production de biogaz par méthanisation est une activité liée et nécessaire à des exploitations agricoles
Pour mémoire, un projet de méthanisation relève de l’activité agricole si au moins 50% des matières proviennent d’exploitations agricoles (Article L. 311-1 du Code rural et de la pêche maritime).
L’unité de méthanisation projetée est une construction liée et nécessaire à des exploitations agricoles au sens des dispositions du PLU dans la mesure où ce projet est mené par une société détenue majoritairement par des exploitants agricoles, ayant pour objet de valoriser des déchets agricoles, provenant à 80 % d’exploitations agricoles, dont celles des six membres fondateurs de la société, pour produire du biogaz par méthanisation ainsi que des digestats destinés à être épandus pour amender les sols d’une vingtaine d’exploitations agricoles, dont celles des porteurs du projet, en complément de l’activité de ces derniers (CAA Nantes, 2 août 2023, n° 21NT00177).
De plus, l’unité de méthanisation permettra d’injecter du biogaz dans le réseau public de distribution de gaz, de sorte qu’elle constitue un équipement d’intérêt général au sens du PLU.
Unité de méthanisation et atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique (risques de nuisances olfactives)
Pour mémoire, le maire lors de l’instruction d’une demande de permis de construire peut refuser un projet s’il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d’autres installations (Article R. 111-2 du Code de l’urbanisme).
Toutefois, il appartient au maire (ou le cas échéant au requérant) de démontrer la réalité de cette atteinte.
Dans cette affaire, le maire avait refusé le permis de construire portant sur la construction d’une unité de méthanisation au motif que le projet notamment que celui-ci présente des « risques de nuisances olfactives notamment lors des épandages, compte tenu de la proximité des habitations », ainsi qu’un « risque de nuisances sonores occasionnées par le transport des digestats » (CAA Nantes, 2 août 2023, n°21NT00149).
La Cour censure ces motifs observant que le projet et ses caractéristiques seront de nature à réduire significativement les nuisances olfactives des digestats (fosse de stockage située à 760 mètres des premières habitations, fosse couverte d’une membrane PVC et non étanche empêchant le risque de fermentation, temps de séjour moyen des matières dans les digesteurs sera suffisamment long pour permettre une dégradation adéquate).
De même, la Cour relève que les ouvrages ne seront pas particulièrement bruyants en dehors des dépotages et des pompages, dont le bruit sera comparable à celui d’un tracteur et assimilable à une activité d’épandage.
Exploitation d’une unité de méthanisation et indemnisation des pertes d’exploitation
La société en charge de la conception, la construction et l’exploitation d’une unité de compostage et de méthanisation (via une délégation de service public), était confrontée des difficultés d’exploitation (qualité des intrants agricoles ou des biodéchets) qu’elle impute à une mauvaise définition des caractéristiques du service qu’à une rupture de l’économie du contrat.
Pour faire droit partiellement à la demande d’indemnisation de l’exploitant, le juge relève que la personne publique avait surestimé le volume des intrants agricoles valorisables lors de la conclusion du contrat, de sorte qu’elle doit répondre des conséquences de cette surestimation, c’est-à-dire des pertes d’exploitation (CAA Lyon, 6 juillet 2023, n°22LY03584).
L’approche de NOVLAW Avocats
La pluridisciplinarité et la complémentarité des équipes de Laurent BIDAULT et de Baptiste ROBELIN permettent au cabinet d’accompagner ses clients à toutes les étapes de leurs projets immobiliers : audit des règles d’urbanisme, rédaction et négociation des baux, autorisations d’urbanisme (permis de construire), autorisation d’exploitation commerciale, travaux de construction, exploitation (baux commerciaux).

Par Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en innovation publique (achat innovant, R&D).
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