À l’instar du droit commun de la responsabilité civile, l’action en insuffisance d’actif suppose l’existence d’une faute. En effet, il apparaît à la lecture de l’article L651-2 du Code de commerce que seule la réalisation d’une faute de gestion ayant contribué à l’insuffisance d’actif peut conduire le juge à faire supporter toute ou partie de cette insuffisance d’actif au dirigeant ayant commis la faute.
La Cour de cassation est venue préciser dans son arrêt en date du 8 mars 2023 (n°21-24.650) dans le cadre d’une conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire que seules peuvent être prises en compte les fautes de gestion antérieures au jugement d’ouverture de la procédure collective.
En l’espèce, le 13 juillet 2016, une société a été placée en redressement judiciaire ; par la suite ce redressement a fait l’objet d’une conversion en liquidation judiciaire par jugement en date du 12 juillet 2017. Le liquidateur a assigné le dirigeant en responsabilité pour insuffisance d’actif soutenant que ce dernier avait commis différentes fautes de gestion au cours de la période d’observation. Sa demande a été rejetée par les juges du fond (CA Amiens, 23 septembre 2021, n°21/00452) ; décision confirmée par la chambre commerciale de la Cour de cassation.
La chambre commerciale de la Cour de cassation rejette le pourvoi formé par le liquidateur contre l’arrêt de la Cour d’appel en soutenant que seules les fautes de gestion antérieures au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire peuvent être prises en compte pour l’application de l’article L651-2 du Code de commerce.
Ainsi, le jugement de conversion du redressement en liquidation judiciaire n’ouvre pas une nouvelle procédure collective. Il s’en déduit qu’une sanction ne peut être prononcée en raison de fautes commises antérieurement au jugement de conversion. En outre, ce n’est qu’en cas de résolution du plan de redressement judiciaire et d’ouverture d’une liquidation judiciaire que les fautes de gestion commises avant l’ouverture d’une liquidation judiciaire peuvent être prises en considération pour fonder l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif (Cass.com., 22 janvier 2020, n°18-17.030).
En conclusion, les conditions de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif sont donc différentes selon que le redressement est converti en liquidation judiciaire ou en cas de résolution du plan et d’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire : dans la première situation, la conversion n’ouvre pas une nouvelle procédure ; au contraire dans la seconde situation, le jugement ouvre une nouvelle procédure.
Dès lors que les conditions de l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif ne sont pas remplies, il est possible d’imaginer que le droit commun de la responsabilité pourrait trouver à s’appliquer à de telles situations sur le fondement d’une action ut singuli notamment.