
Inaptitude et Télétravail
Avis d’inaptitude avec préconisation de télétravail
Comment l’employeur doit-il réagir ?
Est-il contraint d’aménager le poste ?
La chambre sociale de la Cour de cassation vient préciser, pour la première fois, que l’employeur peut se voir contraindre d’aménager un poste en télétravail pour respecter les préconisations de la médecine du travail, et ce même si aucun poste n’existait en télétravail au moment de la déclaration d’inaptitude. (Cass.soc., 29 mars 2023, n°21-15.472 F-B)
En l’espèce, les faits étaient les suivants : Une salariée avait été engagée en qualité de secrétaire médicale par une association santé au travail. La salariée exerçait en dernier lieu les fonctions d’assistante coordinatrice d’équipe pluridisciplinaire. Consécutivement à deux examens médicaux, elle a été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail. Par la suite, l’employeur l’a licenciée pour inaptitude considérant que tout reclassement était impossible.
Obligation pour l’employeur d’exécuter loyalement son obligation de reclassement
Or, comme nous le rappelle les articles L. 1226-2 et L. 1226-10 du Code du travail : l’employeur se doit de proposer un autre emploi à son salarié déclaré inapte, adapté à ses capacités, notamment en mettant en œuvre des mesures d’adaptation ou d’aménagement du poste.
Pour respecter ces obligations, l’employeur doit veiller à suivre les indications que le médecin du travail prend le soin de laisser dans l’avis d’inaptitude concernant l’adaptation du poste. Le recours au télétravail peut ainsi être préconisé par le médecin du travail comme une mesure d’adaptation. Dans ce cas, l’employeur doit donc en tenir compte dans sa recherche des possibilités de reclassement, comme l’a déjà indiqué la Cour de cassation dans un arrêt du 15 janvier 2014, n°11-28.898 D.
Dans la présente affaire, l’avis d’inaptitude mentionnait que la salariée pouvait occuper un poste administratif sans déplacement et à temps partiel (deux jours par semaine) « en télétravail avec aménagement du poste approprié ».
L’employeur l’a malgré tout licenciée considérant que le reclassement n’était pas possible en l’espèce.
La salariée a alors saisi le conseil des prud’hommes considérant que l’employeur avait manqué à son obligation de reclassement en ne suivant pas la préconisation de la médecine du travail du passage en télétravail de son poste, et demandait, donc, que son licenciement soit reconnu sans cause réelle et sérieuse.
Les juges ont accueilli favorablement sa demande, lesquels ont considéré que l’aménagement du poste en télétravail faisait en effet partie intégrante de l’obligation de reclassement à laquelle l’employeur est soumis.
Précision de l’arrêt : il importe peu que l’employeur n’ait jamais eu recours au télétravail auparavant au sein de l’entreprise
Cet arrêt est intéressant à plusieurs titres : l’employeur, en l’espèce, n’avait jamais mis en place de télétravail et faisait valoir que le télétravail ne pouvait pas être mis en place en raison du secret médical.
L’employeur peut-il se prévaloir de ces arguments ?
En l’espèce, la Cour de cassation n’a pas suivi les arguments de l’employeur, et rappelle qu’il appartient à ce dernier de proposer au salarié un reclassement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en œuvre de mesures telles que des mutations, transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail. Le télétravail peut être l’une de ces mesures d’adaptation.
Elle confirme ainsi l’arrêt de la Cour d’appel qui avait considéré que l’employeur n’avait pas loyalement exécuté son obligation de reclassement (comme l’exige la jurisprudence habituelle avec notamment l’arrêt de la Cour de cassation du 26 janvier 2022, n°20-20.369.B).
Il ressort de cette affaire que les fonctions occupées par la salariée étaient bien compatibles avec le télétravail, contrairement à ce que prétendait son employeur.
Le secret médical n’a pas non plus été retenu par les juges car en l’espèce les fonctions de la salariée ne supposaient pas l’accès aux dossiers médicaux. Ses missions étant, pour l’essentiel, réalisables à domicile en télétravail et à temps partiel, comme le préconisait le médecin du travail, la Cour de cassation a donc condamné l’employeur qui avait refusé la mise en place du télétravail.

Le télétravail peut être mis en place par simple avenant au contrat de travail
La Cour de cassation précise que, « l’aménagement d’un poste en télétravail peut résulter d’un avenant au contrat de travail », sans qu’il soit nécessaire que le télétravail ait déjà été mis en place auparavant comme modalité d’organisation du travail au sein de l’entreprise. L’argument de l’employeur a donc été rejeté. Ce n’est pas parce qu’il n’avait jamais eu recours au télétravail qu’il ne pouvait pas adapter le poste de la salariée inapte au télétravail. (Lire notre article : Qu’est-ce que le télétravail ?)
Une décision à mettre en perspective en fonction de la comptabilité du poste avec le télétravail
Cette décision de la Cour de cassation est intéressante car elle éclaire sur le recours au télétravail dans le cas d’un salarié inapte. Toutefois, elle est à mettre en perspective avec les particularités des fonctions du poste du salarié en question. La décision pourrait en effet être différente si le poste n’était pas compatible avec une organisation à distance du travail et/ou si une obligation de confidentialité renforcée justifiait l’empêchement du recours au télétravail, telle que le secret médical.
Cette affaire est donc particulièrement révélatrice de l’importance d’être conseillé en amont par un avocat, spécialiste en droit du travail, pour toutes les questions relatives au télétravail afin de connaitre vos droits et obligations en tant qu’employeur et/ou salarié et être au fait des derniers contentieux qui dessinent le régime de ce nouveau mode d’organisation du travail à distance.
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