Le CCAG Travaux et le CCAG Maîtrise d’oeuvre ont été  complétés par un arrêté du 30 septembre 2021 qui a été publié le 7 octobre 2021.

Surprise, le BIM qui était auparavant défini dans les « commentaires » (qui n’ont pas de valeur contractuelle), est désormais défini à l’article 2 des CCAG comme étant « un outil de représentation numérique partagée permettant de faciliter les processus de conception, de construction et d’exploitation et de former une base fiable permettant les prises de décision« .

BIM CCAG Travaux CCAG MOE

BIM Marché public CCAG Travaux

Retour sur la définition du BIM

Le Building Information Modelling (ou modélisation d’informations de la construction), ou encore processus BIM, ne fait pas aujourd’hui l’objet d’une définition « officielle », par le législateur en particulier. Autrement dit, d’un point de vue strictement juridique (pour ne pas dire légal), le BIM n’a pas de définition, ou du moins il n’en avait pas jusqu’à présent.

À tout le moins, on peut relever que la notion de « bâti immobilier modélisé » a fait l’objet d’une définition, mais uniquement aux termes d’un avis relatif au « Vocabulaire de l’aménagement et de l’urbanisme, de l’habitat et de la construction, des transports et de la mobilité », de la part de la Commission d’enrichissement de la langue française.

Le BIM, bâti immobilier modélisé donc, est défini comme la « maquette numérique d’un ouvrage immobilier qui permet de mettre en commun et d’actualiser les données géométriques et techniques durant les phases de conception, de construction et d’utilisation, voire de démolition ».

Cette définition n’apparaît toutefois guère satisfaisante, voire potentiellement source de confusion, bien qu’elle ne soit donnée qu’aux termes d’un avis. En effet, le BIM est réduit à la seule maquette numérique, laquelle ne constitue pourtant qu’un outil dans le cadre du processus BIM, au côté par exemple de la plateforme collaborative des différents intervenants à l’opération ou des bases de données relatives à celle-ci et issues du processus.

BIM, CCAG et marché public

Cette absence de définition « officielle » était à regretter, et ce d’autant plus que ce qu’il est conféré une valeur juridique, au demeurant contractuelle, à des documents se rapportant directement au BIM, tels que le cahier des charges BIM ou la convention BIM, dans le cadre des cahiers des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux et aux marchés de maîtrise d’œuvre.

Pour en rester d’ailleurs sur le terrain contractuel, et celui des marchés publics en particulier, il est important de souligner que le BIM est défini dans un texte « officiel » relatif aux marchés publics, pour la première fois à l’occasion de la réforme en avril 2021 des CCAG applicables aux marchés publics de travaux et aux marchés de maîtrise d’œuvre –  qui demeurent des documents facultatifs mais largement utilisés en pratique par les acheteurs et maîtres d’ouvrage (Voir notre article sur ce sujet).

Dans un premier temps, lors de leur entrée en vigueur, ces textes apportaient une définition du BIM aux termes des « commentaires » des articles des CCAG, lesquels « n’ont pas valeur contractuelle »

Le BIM était notamment défini comme « une méthode de travail basée sur la collaboration autour d’une maquette numérique », étant ajouté les précisions suivantes :

« Dans un processus BIM, chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir au final à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement« .

Cependant, consécutivement aux retours d’un certain nombre d’acheteurs utilisateurs des CCAG, ces derniers ont donc été modifiés et le BIM est désormais défini à l’article 2 de ces CCAG, définition qui a donc une valeur pleinement contractuelle.

Partant, aux termes de cet article 2, le BIM est défini de la façon suivante :

« BIM (“ Business Information Modelling ” ou “ Modélisation d’informations de la construction ”) est un outil de représentation numérique partagée permettant de faciliter les processus de conception, de construction et d’exploitation et de former une base fiable permettant les prises de décision ».

La définition en commentaire de l’article 2 a, elle, été supprimée des CCAG aujourd’hui en vigueur.

Observations sur la définition de BIM du CCAG

La définition de BIM issue de l’arrêté du 30 septembre 2021, appelle plusieurs observations.

Tout d’abord, aux termes de l’article 2 des CCAG Travaux et CCAG MOE, le BIM est donc défini comme un outil de représentation numérique partagé, de sorte qu’il semble que soient visées par « outil » à la fois la représentation numérique graphique de l’ouvrage et la représentation numérique en termes de données et de base de données.

On peut néanmoins regretter qu’il ne soit pas fait mention de la notion d’ « information » et de l’enrichissement des maquettes numériques par les informations des intervenants, fondement du processus collaboratif.

D’ailleurs, on peut tout autant regretter que cette dimension collaborative ou de collaboration ne soit pas expressément mentionnée à l’instar de la définition donnée auparavant par les commentaires et plus largement par les acteurs institutionnels ou associatifs de l’écosystème (Voir ci-dessous).

De ce point de vue, la volonté des ministères concernés semble d’avoir repris la définition de la norme NF EN ISO 19650, laquelle définit le BIM comme étant l’« utilisation d’une représentation numérique partagée d’un actif bâti pour faciliter les processus de conception, de construction et d’exploitation et former une base fiable permettant les prises de décision », définition qui semble donc restreindre le BIM principalement à la maquette numérique.

Toujours est-il que le BIM constitue en effet tout à la fois une méthode collaborative de travail, un outil, une maquette numérique et une base de données issues du processus.

En ce sens, les éléments de définition fournis par le CEREMA sont éclairants ; ainsi, « le BIM n’est pas un outil numérique ou un logiciel, mais l’ensemble des processus collaboratifs qui alimentent la maquette numérique tout au long du cycle de vie des ouvrages » (Gérer un parc immobilier avec un processus BIM, Méthodologie, conseils et points de vigilance, 2019).

En ce sens également, on peut souligner la définition de la MIQCP et le Plan BIM 2022.

Ainsi, le processus BIM est défini comme une « méthode de travail basée sur la collaboration autour d’une maquette numérique. Dans un processus BIM, chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir finalement à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement » (PTNB-MIQCP, BIM et maquette numérique, Guide de recommandations à la maîtrise d’ouvrage, juillet 2016).

Cette définition correspondait à celle précisé auparavant en commentaire de l’article 2 des CCAG Travaux et MOE.

Enfin, toujours dans le même sens, aux termes de son Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM,  buildingSMART France – Mediaconstruct définit le BIM comme une « méthode de travail basée sur la collaboration autour d’une maquette numérique ». Dans ce cadre, « chaque acteur de la construction crée, renseigne et utilise cette maquette, et en tire les informations dont il a besoin pour son métier. En retour, il alimente la maquette de nouvelles informations pour aboutir au final à un objet virtuel renseigné, représentatif de la construction, de ses caractéristiques géométriques et des propriétés de comportement. BIM pour le processus et maquette numérique pour le “model” » (buildingSMART France-Médiaconstruct, Guide méthodologique pour des conventions de projets en BIM, 2016).

Ces définitions mettent donc en avant tant la dimension collaborative du processus BIM que les outils au service de celui-ci, afin d’aboutir à un objet virtuel représentatif du projet.

Il convient de noter que le processus BIM est appréhendé largement, c’est-à-dire tout au long du cycle de vie de la construction, prenant en compte sa conception, sa réalisation et son exploitation.

Enfin, pour conclure, on relèvera ce qui semble être une coquille, le « B » de BIM étant défini par « Business » au lieu de « Building », tout en étant traduit par « construction »…

Eu égard ces observations, il peut sembler opportun pour le maître d’ouvrage de préciser la définition du BIM aux termes des documents contractuels portant sur le processus BIM, en complétant le cas échéant la définition donnée par l’article 2 des CCAG, laquelle a donc valeur contractuelle.

Laurent Bidault Avocat - Novlaw Avocats

Par Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en matière d’innovation appliquée au secteur public (achat innovant, R&D, BIM).

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