Sommaire
- Permis de construire obtenu par fraude : le droit d’agir d’un tiers devant le Conseil d’État
Suppression de l’appel pour les projets d’habitation en zone tendue : précisions jurisprudentielles
Autorisation d’urbanisme et captage d’eau
Notification obligatoire des recours contre une autorisation d’urbanisme, y compris en appel ou en cas de pourvoi incident
Accessibilité : définition de l’agglomération validée par le Conseil d’État
Régularisation d’une construction inachevée : la demande doit porter sur l’ensemble du bâtiment
Régularisation des autorisations d’urbanisme : les limites fixées par le Conseil d’Etat
Le rôle du juge en cas de sursis à statuer portant sur la régularisation d’une autorisation d’urbanisme
L’intérêt à agir d’un locataire contre un permis de construire portant sur un immeuble destiné à être démoli
Cristallisation des règles d’urbanisme et opération de lotissement
L’articulation entre la police des installations classées pour la protection de l’environnement et les dérogations pour espèces protégées
Mise en compatibilité du PLU pour un projet hôtelier
De nouvelles précisions importantes sur les effets cristallisateurs du certificat d’urbanisme
Le caractère exécutoire des délibérations instituant le droit de préemption urbain
OAP et permis de construire : le Conseil d’État affine les règles de compatibilité
Modification d’un PLU : point de départ du délai de révision après la création d’une zone à urbaniser
Notification du recours en urbanisme : Validité de l’adresse mentionnée sur le panneau d’affichage
Droit au silence et constatation des infractions en urbanisme : Décision du Conseil d’État
- Urbanisme : Revue de jurisprudence mars 2024
- Permis de construire obtenu par fraude : le droit d’agir d’un tiers devant le Conseil d’État

Urbanisme et aménagement : Revue de jurisprudence de l’automne 2024
Retrouvez les principales décisions rendues durant les mois septembre à novembre 2024 en matière de droit de l’urbanisme et d’aménagement
Le Cabinet NOVLAW Avocats accompagne ses clients de façon transversale en droit public et en droit immobilier.
Septembre 2024
Permis de construire obtenu par fraude : le droit d’agir d’un tiers devant le Conseil d’État
Le Conseil d’État rappelle qu’un tiers disposant d’un intérêt à agir peut demander l’annulation d’une décision administrative refusant d’abroger ou de retirer un permis de construire obtenu par fraude.
Cette action est recevable dans le délai du recours contentieux, indépendamment du moment où le tiers a saisi l’autorité administrative pour contester le permis de construire.
Dans cette affaire, le Tribunal administratif ne pouvait rejeter la requête sans examiner les demandes visant les décisions implicites de rejet formulées dans le cadre de recours préalables.
Plus précisément, le Conseil d’Etat donne une grille de lecture à destination du juge de l’excès de pouvoir en indiquant que dans un tel cas, il lui incombe de :
- “Vérifier la réalité de la fraude alléguée à la date du permis de construire”
- “Puis, en cas de fraude, de contrôler que l’appréciation de l’administration sur l’opportunité de procéder ou non à l’abrogation ou au retrait n’est pas entachée d’erreur manifeste, compte tenu notamment de la gravité de la fraude et des atteintes aux divers intérêts publics ou privés en présence susceptibles de résulter, soit du maintien de l’acte litigieux, soit de son abrogation ou de son retrait”.
Suppression de l’appel pour les projets d’habitation en zone tendue : précisions jurisprudentielles
Le Conseil d’État a rappelé que la suppression de l’appel prévue par l’article R.811-1-1 du Code de justice administrative s’applique aux décisions relatives aux autorisations de construire, démolir ou aménager.
Cette suppression concerne également les recours contre les retraits ou les refus de retraits de ces autorisations.
En revanche, ce mécanisme de suppression de l’appel n’est pas applicable aux décisions refusant de délivrer un certificat de permis de démolir ou de construire tacite.
CE, 24 septembre 2024, n° 475357
Dans le même sens, la Cour administrative d’appel de Paris a étendu cette suppression de l’appel aux décisions de sursis à statuer prises sur le fondement de l’article L. 424-1 du code de l’urbanisme. Ces décisions doivent être assimilées à des refus et sont donc soumises aux mêmes règles.
Autorisation d’urbanisme et captage d’eau
Dans cet arrêt, le Conseil d’État précise les conditions pour refuser une autorisation d’urbanisme dans un périmètre de protection des captages d’eau potable prévu par l’article L. 1321-2 du code de la santé publique
Un tel refus est légal uniquement si :
-
- L’acte pris par le préfet délimitant les périmètres de protection est lui-même légal.
- Une analyse concrète établissant que le projet est susceptible de polluer l’eau au point de la rendre impropre à la consommation humaine.
En revanche, la Haute juridiction estime que l’interdiction générale et absolue de toute construction superficielle ou souterraine dans un périmètre de protection rapprochée, sans qu’il soit recherché si cette construction est susceptible d’entraîner une pollution de nature à rendre l’eau impropre à la consommation humaine est illégale.
Octobre 2024
Notification obligatoire des recours contre une autorisation d’urbanisme, y compris en appel ou en cas de pourvoi incident
Le Conseil d’État a confirmé que l’obligation de notification prévue par l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme s’applique également aux recours incident, présentés en appel ou en cassation.
Tout recours contentieux contre une autorisation d’urbanisme, qu’il soit introduit en première instance, en appel ou par un pourvoi incident, doit être notifié par lettre recommandée avec accusé de réception, à la fois à l’auteur de l’acte et à son bénéficiaire, dans un délai de quinze jours à compter de son dépôt sur Télérecours.
Cette formalité s’applique aux demandes tendant à l’annulation ou à la réformation d’une décision juridictionnelle relative à une autorisation d’urbanisme.
En cas de manquement, le juge de première instance, d’appel ou de cassation doit rejeter ce recours comme irrecevable si le requérant ne justifie pas avoir procédé à cette notification, même après une mise en demeure de produire la copie de cette notification.
Accessibilité : définition de l’agglomération validée par le Conseil d’État
Le Conseil d’État, dans sa décision du 1er octobre 2024 a clarifié la notion “d’agglomération” pour l’application des règles d’accessibilité fixées par le décret du 21 décembre 2006.
Ce décret, pris en application des lois des 13/07/1991 et 11/02/2005, prévoit une obligation d’accessibilité de la chaîne du déplacement, avec des exigences adaptées selon que l’infrastructure se trouve « en agglomération » ou « hors agglomération ».
Le Conseil d’État a retenu la définition du Code de la route (articles R. 110-2 et R. 411-2), qui qualifie l’agglomération comme un espace comprenant des immeubles bâtis rapprochés, délimité par des panneaux, avec des limites fixées par arrêté municipal.
Il rejette ainsi l’approche retenue en appel, qui s’appuyait sur une définition statistique de l’INSEE.
Régularisation d’une construction inachevée : la demande doit porter sur l’ensemble du bâtiment
Dans son arrêt du 2 octobre 2024, la Cour administrative d’appel de Paris a précisé qu’une construction inachevée dont l’autorisation d’urbanisme est périmée depuis de nombreuses années est soumise aux mêmes exigences qu’une construction achevée sans autorisation conforme.
Le propriétaire souhaitant réaliser de nouveaux travaux sur une telle construction doit déposer une demande d’autorisation d’urbanisme portant sur l’ensemble du bâtiment et non sur les seuls travaux envisagés. Si la demande est insuffisante, l’autorité administrative doit l’informer de cette obligation, sans qu’elle ait à attendre pour rejeter la demande initiale.
Dans l’affaire jugée, un permis de construire délivré en 1989 pour un immeuble à Vitry-sur-Seine n’avait pas été pleinement exécuté.
En 2021, le nouveau propriétaire a déposé une déclaration préalable pour régulariser des travaux de façade et de menuiserie.
La commune a retiré l’accord implicite né de cette déclaration, estimant qu’une demande globale de régularisation du bâti était nécessaire.
La Cour administrative d’appel a validé cette approche tirée du jugement du Tribunal administratif de Melun, soulignant que les règles d’urbanisme visent à garantir la conformité globale des constructions, même en cas de travaux partiels ou de régularisations tardives.
Régularisation des autorisations d’urbanisme : les limites fixées par le Conseil d’Etat
Dans une décision majeure rendue dans la même veine que l’avis du Conseil d’Etat du 2 octobre 2020 n° 438318 , le Conseil d’État a récemment précisé l’application de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme, qui permet de surseoir à statuer pour régulariser un vice affectant une autorisation d’urbanisme.
Le Conseil d’État confirme qu’après un premier sursis à statuer, si l’autorisation initiale n’est toujours pas régularisée, le juge doit l’annuler sans accorder un nouveau sursis pour les mêmes vices.
Cependant, si la mesure de régularisation est entachée d’un vice distinct mais régularisable, un second sursis peut être envisagé.
Dans cette affaire relative à un parc photovoltaïque, des permis modificatifs avaient été délivrés pour régulariser deux vices : une étude d’impact insuffisante et une enquête publique incomplète.
La régularisation ayant échoué, la Cour administrative d’appel de Marseille a annulé les arrêtés délivrant ces permis. Le Conseil d’État a validé cette décision, rejetant l’idée d’un nouveau sursis pour les mêmes vices.
Le rôle du juge en cas de sursis à statuer portant sur la régularisation d’une autorisation d’urbanisme
Ici, le Conseil d’État précise à nouveau les conditions dans lesquelles un juge peut surseoir à statuer sur un recours contre une autorisation d’urbanisme, en vertu de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme.
En effet, il peut décider de suspendre l’examen de l’affaire pour permettre la régularisation des vices affectant l’autorisation d’urbanisme.
Toutefois, avant d’opter pour ce sursis, il doit d’abord statuer sur les fins de non-recevoir et vérifier que les autres moyens soulevés dans le recours ne sont ni fondés ni susceptibles d’être régularisés.
Dans cette affaire, le Conseil d’État a annulé le jugement de première instance qui avait omis de se prononcer sur la fin de non-recevoir soulevée par la commune concernant l’intérêt à agir des requérants.
L’intérêt à agir d’un locataire contre un permis de construire portant sur un immeuble destiné à être démoli
Dans cet arrêt, la question était de savoir si un locataire peut, ou on, contester un permis de construire portant sur un projet immobilier nécessitant la démolition de l’immeuble qu’il occupe.
En l’espèce, la société Genedis, locataire d’un immeuble destiné à être démoli dans le cadre d’un projet immobilier, avait contesté le permis de construire portant sur ce projet délivré par le maire de Lyon, à la société immobilière Abraham Bloch.
Le Tribunal administratif puis la Cour administrative d’appel avaient validé la recevabilité de son recours, estimant que la mise en œuvre du permis de construire affectait directement les conditions d’occupation de l’immeuble par la société.
Cependant, le Conseil d’État a annulé cette décision. En effet, la Haute juridiction a estimé que la qualité de locataire d’un immeuble devant être démoli, en vertu d’un permis de démolir distinct, ne suffisait pas à justifier un intérêt à agir contre le permis de construire.
Selon l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme, pour être recevable, un recours en excès de pouvoir contre un permis de construire doit démontrer que le projet affecte directement les conditions d’occupation ou de jouissance du bien occupé.
Il faut préciser que l’intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d’aménager s’apprécie à la date d’affichage en mairie de la demande du pétitionnaire (article L. 600-1-3 du code de l’urbanisme).
En l’espèce, le permis de démolir avait été délivré après l’affichage du permis de construire, ce qui exclut un intérêt immédiat à agir contre ce dernier.
Cristallisation des règles d’urbanisme et opération de lotissement
Dans cette décision, le Conseil d’État précise les conditions dans lesquelles le pétitionnaire d’un permis de construire peut bénéficier de la cristallisation des règles d’urbanisme prévues à l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme.
Cette cristallisation garantit la stabilité des règles d’urbanisme applicables pendant cinq ans à compter de la non-opposition à déclaration préalable ou de l’achèvement des travaux dans un lotissement. Toutefois, une division foncière effective, matérialisée par un transfert en propriété ou jouissance d’au moins un lot, est indispensable pour en bénéficier.
En l’espèce, une décision de non-opposition à déclaration préalable a permis de diviser une parcelle en plusieurs lots, dont un seul (lot B) était destiné à être bâti.
Alors que les autres lots ont été cédés, le lot B est resté propriété du pétitionnaire. Le permis de construire, déposé en 2022, a été jugé conforme aux règles cristallisées en 2018, malgré l’absence de transfert du lot bâti.
Le Conseil d’État en conclut que le transfert en propriété ou en jouissance d’un seul lot suffit à mettre en œuvre les opérations de lotissement pour activer la cristallisation, même si le lot destiné à la construction n’est pas vendu, confirmant ainsi une jurisprudence antérieure sur les critères caractérisant une opération de lotissement (CE, 13/07/2022, n° 452457).
Novembre 2024
L’articulation entre la police des installations classées pour la protection de l’environnement et les dérogations pour espèces protégées
Le Conseil d’État précise les modalités d’articulation entre la police des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE) et la police des dérogations pour la protection des espèces menacées, régie par les articles L. 511-1 et L. 411-2 du code de l’environnement.
En l’espèce, le projet concernait la construction d’un parc de 4 éoliennes situé à proximité de zones Natura 2000, abritant une espèce d’oiseaux en danger critique d’extinction.
Le Préfet avait, néanmoins, délivré une autorisation environnementale pour ce projet, mais la Cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé cette autorisation, estimant que le projet portait atteinte à cette espèce avifaune protégée, sans examiner si une dérogation spécifique pour la protection des espèces protégées, était nécessaire.
Dans cet arrêt, le Conseil d’État a validé la position du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, ainsi que de la société Gourvillette Energies porteuse du projet, estimant qu’il aurait fallu vérifier si une dérogation au titre de l’article L. 411-2 du code de l’environnement était requise.
Si une telle dérogation était nécessaire, le juge d’appel aurait dû se contenter d’annuler partiellement l’autorisation et de suspendre ses effets en attendant l’instruction de cette demande de dérogation.
De plus, le Conseil d’État rappelle que lorsque des prescriptions complémentaires sont nécessaires pour protéger des espèces protégées, le préfet doit d’abord vérifier si le projet requiert une dérogation selon l’article L. 411-2 du code de l’environnement, et si c’est le cas, inviter le bénéficiaire du projet à solliciter cette dérogation.
Toutefois, la Haute juridiction estime qu’aucune prescription complémentaire adoptée dans le cadre d’une procédure de dérogation n’aurait pu permettre de protéger de manière suffisante, ces oiseaux et que leur conservation serait menacée par le projet.
En conséquence, cet arrêt rejoint l’analyse des juges d’appel et confirme l’annulation de l’arrêté préfectoral ayant délivré une autorisation unique pour l’exploitation de cette installation éolienne.
Mise en compatibilité du PLU pour un projet hôtelier
Dans son arrêt du 7 novembre 2024, la Cour administrative d’appel de Nantes a estimé que conformément à l’article L. 300-6 du Code de l’urbanisme, un projet peut permettre de modifier et d’adapter un PLU pour le rendre compatible avec les règles d’urbanisme, au moyen d’une déclaration de projet valant mise en compatibilité.
Pour cela, il est nécessaire que ce projet soit reconnu d’intérêt général.
En l’espèce, il s’agissait de la réalisation d’un complexe hôtelier comprenant un hôtel, une résidence hôtelière, un restaurant gastronomique, une brasserie, un spa, une piscine et un parking souterrain.
Les juges d’appel ont estimé que l’intérêt général était établi en soulignant que celui-ci se fondait sur plusieurs objectifs, à savoir :
- Développer le tourisme local de la station balnéaire en tant que station de tourisme,
- Consolider l’offre hôtelière,
- Soutenir le projet de “ville de congrès”,
- Créer des emplois
- Et valoriser la gastronomie locale.
En revanche, les préoccupations environnementales (notamment la proximité des falaises et la présence de radon) ou la configuration du quartier concerné, arguments soulevés par les requérants opposés à la réalisation de ce projet, n’ont pas paru être suffisants pour contester l’intérêt général constaté.
De nouvelles précisions importantes sur les effets cristallisateurs du certificat d’urbanisme
L’arrêt du Conseil d’Etat du 18 novembre 2024 (n° 476298) précise deux points majeurs concernant les effets cristallisateurs d’un certificat d’urbanisme, en soulignant la possibilité de prendre en compte un projet certain pour apprécier la légalité d’un projet au regard des exigences de salubrité et de sécurité publique (article R. 111-2 du Code de l’urbanisme).
En premier lieu, même si l’arrêté délivrant le certificat d’urbanisme n’a pas été transmis au Préfet, dans le cadre du contrôle de légalité, ceci n’enlève en rien aux effets cristallisateurs que ce certificat produit.
La transmission au préfet d’un certificat d’urbanisme n’est pas une condition pour bénéficier de ses effets cristallisateurs.
Le Conseil d’Etat rappelle que si la demande d’autorisation d’urbanisme est déposée dans les 18 mois suivant la délivrance du certificat, son caractère exécutoire est acquis, indépendamment des formalités de transmission au préfet (article L. 410-1 du Code de l’urbanisme). Cette solution évite que le pétitionnaire soit pénalisé par des carences administratives.
En second lieu, les effets cristallisateurs du certificat d’urbanisme positif qui a été délivré au bénéficiaire ne l’empêchent pas de compléter voire de modifier sa demande de permis de construire postérieurement au délai de 18 mois prévu par l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme précité.
Le caractère exécutoire des délibérations instituant le droit de préemption urbain
L’arrêt du Conseil d’État du 18 novembre 2024 (n° 487885) clarifie deux points fondamentaux concernant le caractère exécutoire des délibérations instituant le droit de préemption urbain (DPU). Cette décision marque un tournant dans l’interprétation des règles de publicité applicables aux collectivités territoriales.
En premier lieu, le Conseil d’État rappelle que les formalités de publicité prévues par l’article L. 2131 du Code général des collectivités territoriales, à savoir la publication et la transmission de la délibération au contrôle de légalité, suffisent à la rendre exécutoire.
Ainsi, les formalités spécifiques imposées par l’article R. 211-2 du Code de l’urbanisme, à savoir l’affichage en mairie pendant un mois et la publication dans deux journaux locaux, n’impactent pas la date à laquelle l’acte devient exécutoire.
En clair, dès que la délibération est publiée et transmise aux services préfectoraux, elle devient exécutoire et peut servir de base légale à l’exercice du DPU, même si les formalités d’affichage et de publication dans la presse ne sont pas entièrement accomplies.
En second lieu, cette clarification apporte une sécurité juridique accrue aux collectivités et limite les risques d’annulation des décisions de préemption pour non-conformité aux exigences de publicité spécifiques du Code de l’urbanisme.
OAP et permis de construire : le Conseil d’État affine les règles de compatibilité
Dans son arrêt du 18 novembre 2024 (Société Alliade Habitat, n° 489066), le Conseil d’État revient sur la compatibilité des permis de construire (PC) avec les orientations d’aménagement et de programmation (OAP) des plans locaux d’urbanisme (PLU).
Il est constant qu’un projet de construire ne peut être autorisé s’il est compatible avec les objectifs d’une OAP (CE, 30/12/2021, Commune de Lavérune, n° 446763).
Cependant, le Conseil d’État précise désormais que l’évaluation de cette compatibilité doit se faire à l’échelle de la zone couverte par l’OAP et non uniquement à l’échelle du projet.
En l’espèce, un permis de construire avait été partiellement annulé par le tribunal administratif de Lyon, au motif qu’il ne respectait pas une OAP imposant l’aménagement de rez-de-chaussée pour des activités de service le long d’une voie, dans le but de renforcer la mixité fonctionnelle du village.
Le Conseil d’État a annulé cette décision, en estimant que le tribunal aurait dû examiner si les effets globaux du projet suffisaient à contrarier les objectifs de l’OAP pour l’ensemble de la zone concernée.
Modification d’un PLU : point de départ du délai de révision après la création d’une zone à urbaniser
L’arrêt du Conseil d’État du 18 novembre 2024 (n° 470716), mentionné aux tables du recueil Lebon, vient préciser les règles en matière de modification d’un plan local d’urbanisme (PLU) pour l’ouverture à l’urbanisation d’un secteur classé en zone à urbaniser.
Selon cet arrêt, le point de départ du délai de neuf ans, imposé par l’article L. 153-31 du code de l’urbanisme pour engager une révision du PLU, est fixé à l’une des deux dates suivantes :
- La date du classement initial du secteur en zone à urbaniser (AU).
- La date de la révision du PLU intervenant ultérieurement pour un projet d’aménagement spécifique de cette zone.
Cette décision éclaire les collectivités locales sur les modalités d’application de ce délai, visant à garantir que les zones à urbaniser ne restent pas figées et respectent les exigences d’aménagement durable.
En effet, l’ouverture à l’urbanisation doit être cohérente avec les objectifs de développement du territoire et les évolutions des documents d’urbanisme.
Notification du recours en urbanisme : Validité de l’adresse mentionnée sur le panneau d’affichage
Le Conseil d’État, vient apporter un éclairage important sur l’application de l’article R. 600-1 du Code de l’Urbanisme concernant la notification des recours gracieux ou contentieux.
Selon la Haute juridiction, la notification est régulière lorsque le recours est adressé à l’adresse mentionnée sur le panneau d’affichage du permis de construire, même si cette adresse ne correspond pas à celle figurant dans l’acte attaqué.
Pour sa part, la Cour administrative d’appel de Lyon avait estimé que la notification était irrégulière puisque l’adresse ne correspondait pas à celle qui était mentionnée sur l’arrêté municipal.
Au contraire, selon le Conseil d’État, la notification à l’adresse du panneau était suffisante et les juges rappellent que le but de l’article R. 600-1 du code de l’urbanisme est bien de garantir la sécurité juridique et d’assurer que le bénéficiaire d’une autorisation d’urbanisme soit informé rapidement d’un recours.
Ainsi, la notification à l’adresse figurant sur le panneau, bien que non exigée par l’article A. 424-16, remplit cette obligation de manière régulière.
Droit au silence et constatation des infractions en urbanisme : Décision du Conseil d’État
Dans une décision rendue le 29 novembre 2024, le Conseil d’État a rejeté la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par le syndicat Union Défense Active Foraine (UDAF) et l’association France Liberté Voyage, concernant les dispositions de l‘article L. 480-1 du Code de l’Urbanisme.
Cette question portait sur l’absence de notification du droit de se taire aux personnes concernées lors de la constatation d’infractions en matière d’urbanisme.
Pour mémoire, l’article L. 480-1 du code de l’urbanisme prévoit que certains agents habilités, qu’ils soient policiers judiciaires ou fonctionnaires commissionnés, peuvent constater des infractions liées à l’urbanisme. Toutefois, ces dispositions ne prévoient pas explicitement que le droit de se taire soit notifié aux personnes faisant l’objet d’un constat.
Les requérants soutenaient que cette absence de garantie serait contraire à l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui garantit à toute personne poursuivie le droit de ne pas s’accuser et d’être informée de ce droit.
Le Conseil d’État a estimé que les dispositions de l’article L. 480-1 ne méconnaissaient pas ce principe, car elles ne sont pas destinées à organiser une audition formelle des personnes concernées, mais à établir un constat des infractions aux règles d’urbanisme.
Par conséquent, il a estimé que la question ne présentait pas de caractère sérieux et a décidé de ne pas la transmettre au Conseil constitutionnel.
Cette décision confirme que l’obligation de notifier le droit au silence ne s’applique pas dans le cadre des procédures de constatation des infractions en urbanisme, en l’absence d’audition formelle des personnes concernées.
CE, 29 novembre 2024, n° 498358

Cet article a été écrit par Célie Mendez Avocate Associée chez Novlaw Avocats intervient principalement en droit de l’urbanisme
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