Comment résilier un bail commercial avant son terme ?

On le sait, le bail commercial de caractérise par sa stabilité et sa durée de 9 ans minimum, avec possibilité de résiliation triennale, tous les trois ans, si bien que l’on qualifie aussi le bail commercial de «  Bail 3,6,9  ». En principe, il n’existe pas de possibilité de déroger à cette durée minimale de 9 ans, sauf exception du bail dérogatoire et de la convention d’occupation précaire.

Si cette stabilité est généralement appréciée tant par les locataires, qui peuvent dans le temps développer leur entreprise, que par les bailleurs, qui sont assurés de revenus fonciers dans la durée, il n’en demeure pas moins que les parties peuvent parfois avoir intérêt à résilier le bail commercial avant son terme.

Les raisons peuvent être multiples : pour le bailleur, ce peut être le souhait de se séparer d’un locataire indélicat, mauvais payeur, avec des retards systématiques, ou bien qui exerce une activité génératrice de troubles anormaux du voisinage. Pour le locataire, ce peut être le désir de cesser prématurément son activité, par manque de rentabilité, pour prévenir des difficultés financières et un état de cessation des paiements, ou tout simplement pour changer de vie.

Quels que soient les motifs, résilier un bail commercial avant son terme, obéit à un formalisme et des conditions strictes. Nous exposons ci-après les principaux cas de résiliation anticipée du bail commercial, que ce soit à l’initiative du locataire ou du bailleur.

Accord des parties pour la résiliation amiable du bail commercial

On le dit souvent, le bail commercial est très encadré par le Code de commerce. Les parties ne peuvent pas faire ce qu’elles veulent et doivent respecter des conditions strictes lorsqu’elles exécutent le bail.

Il n’en demeure pas moins que comme tout contrat, le principe du consensualisme s’applique : les parties peuvent toujours décider d’un commun accord de revenir sur leurs arrangements, et ainsi décider de résilier de manière anticipée le bail commercial qu’elles avaient signé.
Il existe toutefois une exception importante en matière de bail commercial  : en effet, rappelons que le commerçant est propriétaire de son fonds de commerce (constitué notamment par le bail commercial) et que ce fonds de commerce constitue également une garantie pour les créanciers du locataire. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle la Banque sollicite généralement un nantissement sur fonds de commerce quand le commerçant souscrit un emprunt bancaire pour acheter son fonds de commerce.

Ainsi, si le locataire du bail commercial a des dettes, et notamment si les créanciers ont des inscriptions sur le fonds de commerce, il ne sera pas possible de résilier le bail commercial sans leur notifier préalablement la décision de résiliation amiable. C’est ce que prévoit l’article L. 143-2 du Code de commerce  :
«  La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu’un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus  »

La même règle s’applique lorsque c’est le bailleur qui poursuit la résiliation judiciaire du bail et qu’il existe des créanciers inscrits.
Le but de cette notification est d’informer ces créanciers, qui disposent d’une sûreté réelle sur le fonds, du risque de disparition de leur garantie.

La notification reçue ne met aucune obligation à la charge du créancier inscrit, mais elle lui permet d’agir auprès de son débiteur soit pour le contraindre à régulariser ses dettes, soit pour obtenir une autre garantie.Le cas échéant, le créancier pour s’opposer à la demande de résiliation.

En l’absence de notification, la résiliation n’est pas opposable aux créanciers inscrits qui peuvent poursuivre la vente forcée du fonds de commerce à titre de réalisation de leur privilège, et également demander des dommages-intérêts au bailleur qui ne les a pas informés de cette résiliation.

Résiliation du bail commercial par le locataire  : la résiliation triennale

C’est un grand principe du bail commercial  : le locataire peut résilier le bail tous les 3 ans, à l’expiration de chaque période triennale, c’est-à-dire tous les 3, 6 et 9 ans.

Dans ces cas-là, le locataire n’a aucun motif à donner, aucune justification à apporter. Il peut partir librement, sans toutefois pouvoir demander d’indemnité d’éviction à son bailleur. Attention, il existe cependant une exception : si le bail commercial a été conclu pour une durée supérieure à 9 ans, le contrat peut prévoir de supprimer la faculté de résiliation triennale au profit du locataire. Ce dernier se trouve alors tenu de respecter une durée ferme de 9 ans (c’est pourquoi il est toujours important pour le locataire de faire attention à la clause durée du bail lors de la rédaction du bail commercial).

Les conditions sont souples, puisque le congé peut être donné par lettre recommandée avec accusé de réception ou par acte d’huissier (l’acte d’huissier est cependant recommandé pour se ménager des preuves). Le congé doit être donné par le locataire pour le dernier jour du trimestre civil et au moins six mois avant l’expiration de la période triennale en cours. Attention à ne pas rater la date d’anniversaire pour délivrer congé : tout congé délivré en retard ne prendra effet qu’à l’issue de la période triennale suivante et le locataire se trouvera alors tenu pour une nouvelle période de trois ans.

Résiliation du bail commercial en cas de départ à la retraite du locataire

C’est l’autre moyen classique de résilier le bail commercial avant son terme : lorsque le commerçant doit prendre sa retraite. Le Code de commerce prévoit même dans ce cas une faculté pour le locataire souhaitant partir à la retraite de déspécialiser son bail commercial, sans indemnité. C’est ce que l’on appelle la cession-déspécialisation, afin de faciliter au locataire en place la recherche d’un repreneur.

Résiliation du bail commercial par le bailleur 

En principe le bailleur ne peut pas résilier le bail commercial avant son terme. D’ailleurs, même dans ce cas, le bailleur qui ne voudrait pas renouveler le bail commercial de son locataire serait tout de même tenu de lui verser une indemnité d’éviction, pour compenser la perte du fonds de commerce. La liberté du bailleur est donc assez restreinte sur ce point.

À noter qu’il est toutefois possible pour le bailleur d’exercer un droit de reprise anticipée, lui permettant de résilier un bail commercial avant son terme.

Ainsi, par exception, le bailleur peut lui aussi résilier le bail commercial avant son terme  :

  • Afin de construire, de reconstruire ou de surélever l’immeuble existant,

  • De réaffecter le local d’habitation accessoire à cet usage,
  • De transformer à usage principal d’habitation un immeuble existant par reconstruction, rénovation ou réhabilitation,
  • D’exécuter des travaux prescrits ou autorisés dans le cadre d’une opération de restauration immobilière et en cas de démolition de l’immeuble dans le cadre d’un projet de renouvellement urbain.

Le bailleur sera alors tenu de verser une indemnité d’éviction au locataire, sauf dans le dernier cas, s’il s’agit d’exécuter des travaux prescrits par l’Administration (par exemple si l’immeuble est insalubre et dangereux).

Pour exercer son droit de reprise et ainsi résilier le bail commercial avant son terme, le bailleur devra donner congé au locataire par acte d’huissier ou par lettre recommandée AR, en respectant un préavis minimum de 6 mois.

Résiliation judiciaire du bail commercial en cas de faute du locataire

C’est l’une des hypothèses les plus fréquentes permettant de résilier le bail commercial avant son terme, celle d’une faute du locataire  : par exemple, en cas de défaut d’assurance du locataire, ou bien si le locataire ne paye pas son loyer et ses charges, ou encore s’il exerce une activité non autorisée dans le local ou viole le règlement de copropriété.
Dans toutes ces hypothèses, le bailleur pourra poursuivre la résolution judiciaire du bail commercial.

Si le bail commercial renferme une clause résolutoire, cela sera encore simple pour le bailleur, qui pourra faire constater les manquements dans une procédure de référé (procédure accélérée) en demandant au juge de constater l’acquisition de la clause résolutoire.
Pour rappel, la clause résolutoire est celle qui prévoit une résiliation automatique du bail commercial en cas de manquement du locataire à ses obligations, un mois après délivrance d’un commandement de payer, resté sans effet (délivré par acte d’huissier obligatoirement).

Attention là encore aux créanciers inscrits sur le fonds de commerce du locataire. Comme en matière de résiliation anticipée amiable du bail commercial, les créanciers inscrits doivent être avertis par le bailleur qui poursuit la résiliation judiciaire du bail, afin que ces derniers puissent solliciter de nouvelles garanties auprès de leur locataire.
À défaut, la résiliation du bail sera inopposable aux créanciers inscrits qui pourront poursuivre la vente forcée du fonds de commerce et éventuellement demander la condamnation du bailleur à des dommages-intérêts.

Résiliation judiciaire du bail commercial en cas de faute du locataire

Outre la faculté pour les parties de demander la résiliation anticipée du bail commercial, le bail commercial sera résolu de plein droit dans un certain nombre de circonstances.

Ce sera notamment le cas en cas de décès du locataire ou encore en cas de destruction du local commercial dans un cas de force majeure (tempête, ouragan, etc..).

On le voit, des conditions strictes doivent être respectées pour demander la résiliation du bail commercial avant son terme : à défaut, la résiliation anticipée du bail ne produira aucun effet. Il faut également garantir les droits des créanciers inscrits qu’il s’agisse d’une résiliation amiable, ou à l’initiative du bailleur poursuivant la résiliation judiciaire du bail pour faute du locataire.

La prudence est donc de mise et il est fortement conseillé aux parties qui envisagent de résilier un bail commercial avant son terme, de demander s’adresser à un avocat spécialisé en bail commercial. N’hésitez pas à nous contacter pour demander conseil.

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