Sommaire
- Urbanisme et émeutes urbaines : Quels sont les textes applicables ?
- Comment s’applique ce dispositif dérogatoire au droit de l’urbanisme consécutif aux émeutes urbaines ?
- Reconstruction à l’identique avec des adaptations ou améliorations des bâtiments démolis ou dégradés à la suite des violences urbaines
- Réalisation de certains travaux sans attendre la délivrance du permis de construire lorsqu’ils portent sur des ouvrages détruits par les émeutes
- Attention au contenu de la demande d’urbanisme (permis de construire, déclaration de travaux)
- Modifications des délais d’instruction des permis de construire et déclaration préalable
- Accélération des délais de consultation préalable

Urbanisme : Reconstruire après les émeutes urbaines, quels outils ?
La France a été marquée entre le 27 juin et le 5 juillet 2023 par des violences urbaines qui ont dégradé de nombreux équipements et bâtiments publics (hôtel de ville, médiathèques, écoles, mobiliers urbains).
Afin de permettre la reconstruction de ces équipements et ouvrages, le Gouvernement a pris un certain nombre de mesures en matière de commande publique et d’urbanisme.
Urbanisme et émeutes urbaines : Quels sont les textes applicables ?
L’article 3 de la loi n°2023-656 du 25 juillet 2023 avait autorisé tout d’abord le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures nécessaires permettant aux maîtres d’ouvrage soumis au code de la commande publique (État, collectivités territoriales), pendant une durée limitée, de conclure en dessous d’un certain seuil des marchés publics de travaux sans publicité préalable mais avec mise en concurrence, de déroger au principe d’allotissement et de recourir aux marchés globaux.
Une première ordonnance concernant la commande publique a été adoptée le 26 juillet 2023 (Ordonnance n°2023-660) prévoyant notamment l’absence de publicité pour les marchés publics de travaux dont la valeur est inférieure à 1.500.00 euros HT, la dérogation à l’obligation d’allotissement et le recours aux marchés globaux pour la reconstruction des ouvrages (voir notre article sur le sujet).
Puis, une deuxième ordonnance a été prise le 13 septembre 2023, portant sur les règles d’urbanisme, visant à l’accélération de la délivrance et la mise en œuvre des autorisations d’urbanisme permettant la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 (Ordonnance n°2023-870).
Enfin, le même jour, une troisième ordonnance a été prise visant à faciliter le financement de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits (Ordonnance n°2023-871).
Comment s’applique ce dispositif dérogatoire au droit de l’urbanisme consécutif aux émeutes urbaines ?
Quelle durée ? Ce dispositif s’applique pour une durée de 18 mois à compter de l’entrée en vigueur de l’ordonnance, soit jusqu’au 15 mars 2025.
Concrètement, ce dispositif s’applique à toutes les autorisations d’urbanisme (déclaration préalable, permis de construire…) déposées avant le 15 mars 2025.
Application aux bâtiments publics et privés. Précision importante : ce dispositif s’applique aux bâtiments publics et privés impactés par les violences urbaines.
Le dispositif ne bénéficie donc pas uniquement aux personnes publiques. Tout pétitionnaire concerné peut donc s’en prévaloir.
Attention à prendre en tenir compte de la durée du dispositif relatif à la commande publique.
Cependant, du côté des personnes publiques, on peut d’ores et déjà s’étonner sur le décalage avec la durée du dispositif d’assouplissement des règles de la commande publique dont la durée expire le 28 avril 2024.
Déjà, comme l’a relaté la presse, ce décalage entre ces deux ordonnances a empêché les personnes publiques d’utiliser pleinement les mesures en matière de commande publique.
Cela veut dire en pratique que les autorisations d’urbanisme concernant les travaux de reconstruction devront nécessairement faire l’objet d’une demande d’autorisation d’urbanisme bien avant le 28 avril 2024 pour que les travaux rentrent dans le dispositif.
Mais, après cette date, si les personnes publiques peuvent encore se prévaloir des dérogations en matière d’urbanisme, elles ne pourront plus en revanche se prévaloir de celles en matière de commande publique, ce qui les prive des intérêts du dispositif.
Reconstruction à l’identique avec des adaptations ou améliorations des bâtiments démolis ou dégradés à la suite des violences urbaines
Pour mémoire, l’article L.111-15 du Code de l’urbanisme prévoit que lorsqu’un bâtiment régulièrement édifié a été détruit ou démoli, sa reconstruction à l’identique est autorisée dans un délai de dix ans, et ce même en cas de dispositions d’urbanisme contraires, sauf si le PLU ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles notamment en dispose autrement.
L’article 2 de l’ordonnance complète cet article avec la possibilité d’adapter ou d’améliorer les bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023.
Cette possibilité d’adapter ou d’améliorer ces bâtiments est néanmoins encadrée.
Ainsi, les travaux, installations ou aménagements nécessaires à cette reconstruction ou à cette réfection peuvent comporter des adaptations de la construction initiale, mais dans une limite d’une diminution ou d’une augmentation de 5 % de son gabarit initial.
De plus, dans le cas où cette diminution ou cette augmentation est justifiée par un objectif d’amélioration de la performance énergétique, d’accessibilité ou de sécurité de l’ouvrage, elle peut dépasser 5 % du gabarit initial, mais à proportion des modifications du bâtiment nécessaires à la réalisation du ou des objectifs invoqués.
Attention, ces adaptations et améliorations ne doivent pas avoir pour effet de modifier la destination ou la sous-destination initiale du bâtiment. Par exemple, un commerce ne pourra pas être transformé en entrepôt ou une habitation en commerce.
Le texte prévoit en outre que ce droit à reconstruction ou à réfection (avec ou sans adaptation ou amélioration) doit s’exercer dans les limites des règles applicables en matière de risques naturels, technologiques ou miniers auxquelles la reconstruction ou la réfection ne peut contrevenir et, le cas échéant, sous réserve des prescriptions de sécurité dont l’autorité compétente peut assortir le permis.
Réalisation de certains travaux sans attendre la délivrance du permis de construire lorsqu’ils portent sur des ouvrages détruits par les émeutes
Autre dérogation, et non des moindres, certains travaux peuvent débuter dès le dépôt de la demande de permis de construire ou de déclaration préalable, et cela sans attendre l’expiration du délai d’instruction.
Ainsi, les opérations et travaux de démolition, de terrassement, de fondation (et eux seuls) peuvent être engagés dès le dépôt, « selon le cas » (qui ne sont pas précisés dans le texte), de la demande ou de la déclaration préalable.
Autrement dit, le pétitionnaire peut débuter ces opérations et travaux sans autorisation…
Quid alors de l’hypothèse où l’autorisation d’urbanisme serait refusée alors que les travaux ont déjà débutés ?
À cet égard, l’Ordre des architectes y voit un « risque considérable pour le maître d’ouvrage ».
Attention au contenu de la demande d’urbanisme (permis de construire, déclaration de travaux)
Le pétitionnaire doit être particulièrement vigilant à préciser si son projet est soumis le cas échéant soumis au régime dérogatoire prévu par l’ordonnance du 13 septembre 2023.
De plus, si son projet comprend des modifications par rapport au bâtiment initial (adaptations ou améliorations), il doit motiver celles-ci dans sa demande d’autorisation.
Modifications des délais d’instruction des permis de construire et déclaration préalable
Le délai d’instruction de la demande de permis de construire, d’aménager ou de démolir est limité à 1 mois (contre 2 mois pour les maisons individuelles et 3 mois pour les autres projets, à compter de la date de dépôt d’un dossier complet en mairie).
Le délai d’instruction de la demande de déclaration préalable est limité à 15 jours (contre 1 mois à partir de la date de dépôt de la DP en mairie).
Dans le cas où la demande relève de la compétence de l’État, alors le maire devra transmettre sans délai le dossier au préfet.
Le Préfet disposera alors d’un délai de 5 jours à compter de la réception du dossier pour notifier, le cas échéant, au demandeur que son dossier est incomplet, en lui indiquant les pièces et informations manquantes.
Accélération des délais de consultation préalable
Afin d’accélérer les délais de délivrance des autorisations d’urbanisme, l’article 6 de l’ordonnance prévoit une réduction des délais dans lesquels des avis, accords ou autorisations préalables éventuellement nécessaires, doivent rendus. Il en va de même pour la procédure de participation du public.
Ainsi, les transmissions pour avis, accord ou autorisation doivent être adressées à l’autorité administrative dans le délai de 5 jours suivant la réception du dossier. L’autorité administrative délivre l’avis, l’accord ou l’autorisation dans le délai de 15 jours.
Les majorations ou prolongations du délai d’instruction de la demande d’urbanisme sont limitées à 15 jours à compter de la réception du dossier par l’autorité administrative concernée.
Le cas échéant, la majoration ou la prolongation du délai d’instruction est notifiée sans délai au demandeur.
Lorsque la réalisation des travaux est subordonnée à l’accomplissement préalable d’une procédure de participation du public selon les modalités prévues à l’article L. 123-19 du code de l’environnement, la majoration du délai d’instruction est limitée à 45 jours.
Notons que dans ce cas, l’autorité compétente pourra recourir à la procédure de participation par voie électronique et exempter le projet d’enquête publique.
Les avis, accords ou autorisations requis sont adressés à l’autorité compétente pour délivrer l’autorisation d’urbanisme dans un délai de 15 jours à compter de la réception du dossier.
Attention, selon les cas, le silence gardé passé ce délai vaut, selon le cas, avis favorable ou acceptation tacite.
Enfin, lorsque ces avis, accords ou autorisations sont émis par un organisme collégial, celui-ci statue dans les plus brefs délais et par tout moyen assurant l’identification des participants et le respect de la confidentialité des débats vis-à-vis des tiers, nonobstant toute disposition particulière le régissant.

Par Laurent Bidault , Avocat Associé chez Novlaw Avocats , spécialisé en droit public , notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en matière d’ innovation appliquée au secteur public (achat innovant, R&D, BIM).
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