Sommaire
- Dérogations aux règles relatives aux espèces protégées
- Régularisation d’une autorisation d’urbanisme
- Pas de régularisation possible pour un permis de construire obtenu par fraude
- Certificat d’urbanisme, sursis à statuer et évolution du PLU
- Contradiction entre la convention de PUP et la demande de permis de construire
- Les autorisations d’urbanisme nécessaires pour l’implantation d’une antenne-relais
- La théorie de la connaissance acquise en cas de recours contentieux contre un arrêté de refus de permis de construire
- L’office du juge administratif en cas d’annulation d’une décision refusant une autorisation d’urbanisme
- Urbanisme : Revue de jurisprudence mars 2024

Urbanisme : Revue de jurisprudence Mars 2024
Retrouvez les principales décisions rendues durant le mois de mars 2024 en matière de droit de l’urbanisme, d’aménagement et de droit immobilier public.
Le Cabinet NOVLAW Avocats accompagne ses clients de façon transversale en droit immobilier et en droit public.
Dérogations aux règles relatives aux espèces protégées
En principe, la destruction et la perturbation des espèces animales protégées ainsi que la destruction et la dégradation de leur habitat est interdit.
Néanmoins, certaines mesures proposées par le pétitionnaire, peuvent justifier de faire droit à une demande de dérogation à cette interdiction, sur laquelle le Conseil d’Etat avait, d’ailleurs, eu l’occasion d’en préciser les contours, dans un avis du 9 décembre 2022 (n°463563).
Dans l’affaire commentée, le Conseil d’Etat a estimé qu’une telle demande doit s’apprécier sur le fondement de l’impact résiduel (après prise en compte des mesures d’évitement et de réduction des nuisances).
Partant, le Conseil d’Etat vient préciser l’étendue de l’office du juge sur l’effectivité des mesures d’évitement et de réduction proposées par un porteur de projet éolien, pour juger de l’opportunité de déposer une demande de dérogation.
Le juge administratif estime que les mesures de réduction proposées par le pétitionnaire doivent être prises en compte afin de vérifier si la demande de dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées est, ou non, nécessaire.
En l’espèce, les mesures de bridage proposées par le pétitionnaire semblent présenter des garanties d’effectivité suffisantes pour diminuer le risque pour ces espèces protégées.
En outre, le Conseil d’Etat a précisé que le juge de l’autorisation environnementale peut :
- Soit surseoir à statuer pour permettre au pétitionnaire d’obtenir, dans le temps de la procédure, une autorisation modificative régularisant les vices qui entachent l’autorisation initiale.
- Soit limiter l’effet de l’annulation qu’il prononce si les vices relevés n’entachent qu’une partie de l’autorisation ou s’ils ne portent que sur une phase d’instruction.
CE,8 mars 2024, Société Engie Green Doussay, n° 463249
Régularisation d’une autorisation d’urbanisme
Dans le cas où un vice affectant la légalité de l’autorisation d’urbanisme dont l’annulation est demandée, celle-ci peut être régularisée sur le fondement de l’article L. 600-5 du code de l’urbanisme, dès lors que le juge administratif est saisi de conclusions en ce sens.
Dans son arrêt du 26 juillet 2022 (n° 437765), le Conseil d’Etat a rappelé qu’un permis de construire modificatif peut être délivré, à condition que les modifications envisagées ne conduisent pas à créer un tel bouleversement du projet, que cela en changerait la nature même.
Le Conseil d’Etat est venu préciser qu’un permis de construire modificatif peut permettre de régulariser un vice dont est entaché le permis de construire initial, même si cette régularisation impliquerait de revoir l’économie générale du projet en question, dès lors que les règles d’urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent cette mesure de régularisation, laquelle ne doit pas impliquer d’apporter à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même.
Pas de régularisation possible pour un permis de construire obtenu par fraude
Le Conseil d’Etat rappelle que la régularisation d’un permis de construire, sur le fondement de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, n’est pas régularisable en cas de fraude commise par le pétitionnaire.
Rappelons que l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme prévoit que lorsqu’un vice entachant un permis de construire est susceptible d’être régularisé et qu’il est saisi de conclusions en ce sens, le juge administratif doit sursoir à statuer pour laisser le temps au pétitionnaire d’obtenir la régularisation de son projet.
En l’espèce, le pétitionnaire souhaitait faire construire une maison d’habitation en R+1, à la place d’un garage et d’un abri existant destinés à stocker du matériel de golf et de tennis.
Cependant, ce dernier a commis une fraude en cachant l’état de ruine de l’abris existant, ce qui lui a permis d’échapper à la règle d’urbanisme imposant le retrait de la nouvelle construction projetée par rapport à la limite séparative de son terrain.
Dans cette affaire, le Conseil d’État souscrit donc à l’analyse des juges du fond, en estimant que même si l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme ne le prévoit pas expressément, la régularisation d’un permis de construire obtenu par fraude ne confère pas de droit à son bénéficiaire et que de ce fait, ce permis de construire n’est pas régularisable.
Certificat d’urbanisme, sursis à statuer et évolution du PLU
Un certificat d’urbanisme permet à son bénéficiaire de cristalliser ses droits pendant une durée de 18 mois conformément à l’article L. 410-1 du code de l’urbanisme.
Ce qui signifie que le bénéficiaire d’un certificat d’urbanisme peut solliciter une autorisation d’urbanisme ou déposer une déclaration préalable, dans ce délai et ainsi bénéficier des règles d’urbanisme existantes à la date de la délivrance de son certificat.
Cependant, se pose la question du sursis à statuer que l’autorité administrative peut opposer à une demande d’autorisation d’urbanisme sur le fondement de l’article L. 424-1 du code de l’urbanisme et qui doit apparaître sur un certificat d’urbanisme.
Dans ce cadre, le Conseil d’État a rappelé qu’en cas d’élaboration ou de révision du Plan Local d’Urbanisme, un sursis à statuer peut être opposé à une demande d’autorisation d’urbanisme, même si le certificat d’urbanisme précédemment délivré n’en fait pas mention.
Contradiction entre la convention de PUP et la demande de permis de construire
Dans cette affaire, le Conseil d’État rappelle tout d’abord le principe selon lequel les insuffisances ou imprécisions du dossier de demande de permis de construire sont susceptibles d’entacher sa légalité que dans l’hypothèse où celles-ci ont été de nature à fausser l’appréciation portée par l’autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
Le demandeur du permis de construire n’avait ici pas représenté aux termes de sa demande plusieurs arbres situés sur le terrain d’assiette du projet, et ce en contradiction avec le projet de convention de projet urbain (PUP), ni précisé l’avenir de ces derniers.
Dès lors, le conseil d’État relève que la lecture du dossier de demande de PC ne permet donc pas de déterminer si ces arbres seront ou non abattus et, dans l’affirmative, si l’abattage les concernera tous ou seulement certains d’entre eux.
Une telle insuffisance est de nature à fausser l’appréciation du service instructeur sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
Les autorisations d’urbanisme nécessaires pour l’implantation d’une antenne-relais
Par principe, la construction d’une antenne-relais doit faire l’objet d’un permis de construire (articles L. 421-1 et R. 421-1 du code de l’urbanisme), notamment si elle se trouve dans un secteur protégé.
Par exception, l’implantation d’une antenne-relais quelle que soit sa hauteur et la construction de locaux techniques, doivent être précédés d’une déclaration préalable, lorsque la surface de plancher et l’emprise au sol sont supérieures à 5 m² et inférieures ou égales à 20 m².
Certains projets de constructions d’antenne-relais sont même dispensés de toute formalité au titre du code de l’urbanisme (lorsque la surface au sol est inférieure ou égale à 5 m² et que la hauteur est inférieure ou égale à 12 mètres).
Si ces règles sont claires s’agissant des antennes-relais, elles le sont moins en ce qui concerne les locaux techniques dont la surface de plancher ou l’emprise au sol serait inférieure à 5 m².
Dans son avis du 21 mars dernier, le Conseil d’État a donc précisé le régime juridique applicable à ces locaux techniques, en estimant qu’il convient de se référer à la hauteur de l’antenne-relais :
- Si sa hauteur est inférieure ou égale à 12 mètres, aucune formalité n’est nécessaire.
- En revanche, si sa hauteur est supérieure à 12 mètres, une déclaration préalable devra être déposée pour l’implantation de cette antenne-relais et la construction de locaux techniques.
CE, avis, 21 mars 2024, n°490536
Voir également : Dans quels cas une antenne-relais doit faire l’objet d’une déclaration préalable
La théorie de la connaissance acquise en cas de recours contentieux contre un arrêté de refus de permis de construire
Le Conseil d’État a rappelé comment apprécier la théorie de la connaissance acquise en cas de contestation d’un refus de permis de construire.
En l’espèce, une société pétitionnaire avait sollicité la délivrance d’une autorisation d’urbanisme pour la construction d’un ensemble immobilier qui lui a été refusée, ce qu’elle a, ensuite, tardivement contesté, devant le Tribunal administratif.
En effet, le Conseil d’État rappelle que la connaissance acquise est démontrée notamment lorsqu’il est avéré que ladite société a formé, à tort, un recours administratif contre l’avis de l’architecte des bâtiments de France, en joignant une copie de l’arrêté lui refusant un permis de construire qu’elle n’a pas contesté dans les délais.
Partant, sa requête introduite plus de quatre mois plus tard, était manifestement tardive.
L’office du juge administratif en cas d’annulation d’une décision refusant une autorisation d’urbanisme
Rappelons que l’article L. 600-4-1 du code de l’urbanisme impose au juge administratif qui annule un acte en matière d’urbanisme, de se prononcer sur l’ensemble des moyens d’une demande susceptibles de justifier l’annulation ou la suspension d’une décision.
Dans cette affaire, une société avait sollicité la délivrance d’un permis de construire pour la construction de trois immeubles, lequel fut finalement refusé par le Maire de la Commune.
Après plusieurs rebondissements jurisprudentiels, le Conseil d’Etat est venu préciser l’office du juge, en matière d’appréciation de la légalité d’un refus de permis de construire en fonction du degré de juridiction saisi (première instance ou appel) ainsi que des motifs retenus dans sa décision.
Ainsi, il ressort de cet arrêt que :
Les juges de première instance doivent examiner tous les arguments sollicitant l’annulation d’un refus de permis de construire (relevant de la légalité externe comme de la légalité interne de l’acte).
Cependant, si un argument justifie le refus de permis de construire, les juges peuvent, dans ce cas, rejeter la demande d’annulation, sans avoir à se prononcer sur les autres moyens soulevés par le requérant.
En cas d’appel sur un jugement annulant une décision de refus de permis de construire, la Cour doit se prononcer sur les motifs d’annulation retenus en première instance.
Toutefois, si les juges d’appel estiment que l’un des motifs justifie le refus de délivrance d’une autorisation d’urbanisme et que l’administration aurait pris la même décision sur ce fondement, ils peuvent rejeter la demande d’annulation de l’acte, sans examiner les autres motifs retenus par les juges de première instance.

Cet article a été co-écris par Laurent Bidault et Célie Mendez Avocats Associés chez Novlaw Avocats.

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