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Marché Public : Revue de jurisprudence Octobre 2023
Retrouvez les principales décisions rendues durant le mois d’octobre 2023 en matière de marché public.
Le Cabinet NOVLAW Avocats accompagne ses clients de façon transversale en droit immobilier et en droit public.
Attention à la limitation du nombre de pages d’un mémoire technique
Le règlement de la consultation limitait le nombre de pages du mémoire technique à remettre par les candidats.
Afin de « contourner » cette limite, un candidat avait fait le choix de remettre une offre respectant le nombre de pages maximal mais en présentant 4 pages par feuille, de sorte que la commune a rejeté son offre estimant qu’elle ne respectait pas le nombre de pages.
Saisi d’un référé précontractuel, le juge annule la procédure au motif que le règlement de la consultation était imprécis sur les conditions de présentation du mémoire technique, ne précisant pas notamment sur la taille de la police d’écriture employée ou sur la composition et la mise en forme de chaque page.
Absence de réclamation et acceptation du décompte général d’un marché public
Dans la mesure où le titulaire n’a pas adressé sa réclamation au maître d’œuvre conformément aux stipulations de l’article 13.44 du CCAG Travaux (1976), mais uniquement au maître d’ouvrage, le décompte général du marché est réputé avoir été accepté par le titulaire et est devenu le décompte général et définitif conformément à l’article 13.45 du CCAG Travaux (1976).
Et cela peu importe la circonstance que le maître d’ouvrage n’a pas formellement informé le titulaire de son refus d’accepter le décompte final du maître d’œuvre.
Référé provision et appréciation du juge
Il appartient au juge des référés saisi d’un référé provision de déterminer le fondement juridique selon lequel il devait traiter la demande de provision qui lui était soumise, et non pas ici de se borner à estimer impossible de déterminer s’il y avait lieu d’appliquer les clauses contractuelles prévues dans le marché public ou de les écarter.
Titulaire défaillant et contestation du nouveau marché public
Le titulaire défaillant d’un précédent marché de conception-réalisation, qui avait été résilié pour faute (« en raison d’importantes difficultés d’exécution constatées au cours de l’exécution du précédent marché ») ne peut contester la relance du nouveau marché passé à la suite de sa défaillance.
Le juge relève notamment que le titulaire défaillant n’a pas formellement contesté la résiliation du marché précédent ou encore qu’elle n’établît pas qu’elle a pris les mesures nécessaires pour corriger les manquements alors invoqués.
Le juge en déduit qu’elle ne dispose donc manifestement pas des capacités techniques et professionnelles suffisantes pour candidater au nouveau marché, de sorte qu’elle ne peut le contester.
→ TA de Guadeloupe, ord. 12 octobre 2023, Société Babel, n°2301159
Indemnisation du titulaire d’un marché public : que comprennent les dépenses utiles ?
Le Conseil d’État rappelle que les dépenses utiles comprennent, à l’exclusion de toute marge bénéficiaire, les dépenses qui ont été directement engagées par le cocontractant pour la réalisation des fournitures, travaux ou prestations destinés à l’administration.
Et, seule la quote-part des frais généraux directement liée à l’exécution du marché et à ce titre utile à la personne publique peut être prise en compte.
En revanche, ne peuvent pas être regardés comme utilement exposés pour l’exécution du marché les frais de communication ainsi que, dans le cas où le contrat en cause est un marché public, sauf s’il s’agit d’un marché de partenariat, les frais financiers engagés par le cocontractant.
Le cocontractant ne peut davantage demander au titre des dépenses utiles à être indemnisé de la valeur non amortie, à la date de la résiliation du contrat, des dépenses d’investissement qu’il a consenties pour l’acquisition d’un bien dont il demeure propriétaire.
Dans cette affaire, la part non amortie d’un bien qui est resté la propriété du titulaire n’est pas une dépense utile.
Sous-traitant ou fournisseur dans un marché public
La distinction entre sous-traitant et fournisseur n’est pas toujours aisée à saisir.
Est un sous-traitant l’entreprise qui exécute des prestations relatives à l’exécution d’une part du marché public en cause. À l’inverse, la simple fourniture de matériaux notamment au titulaire du marché public conclu avec le maître de l’ouvrage ne constitue pas contrat de sous-traitance, mais uniquement un contrat de fourniture.
Dans cette affaire, le Conseil d’État relève que la société en cause avait fourni des menuiseries présentant des spécifications techniques déterminées conformément au cahier des clauses techniques particulières et fabriquées spécialement pour les besoins du marché en cause et qu’elle était intervenue sur le chantier pour participer à leur pose : il s’agit donc d’un contrat de sous-traitance.
Par voie de conséquence, l’entreprise en cause peut prétendre au paiement direct de ses prestations.
→ CE, 17 octobre 2023, Commune de Viry-Châtillon, n° 465913
Sous-traitant dans un marché public et demande de paiement
Le sous-traitant du titulaire d’un marché public qui omet de communiquer sa demande de paiement direct au titulaire du marché ou qui se voit opposer un refus de la part du titulaire ne peut se prévaloir ensuite d’un droit à ce paiement auprès du maître d’ouvrage.
Pour rappel, sur la procédure de règlement du sous-traitant d’un marché public, voir notamment Paiement direct et indemnisation du sous-traitant
→ CE, 17 octobre 2023, SIEL Territoire d’énergie Loire, n° 469071
Résiliation d’un marché public pour un motif d’intérêt général
Pour mémoire, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d’intérêt général, résilier unilatéralement un marché public (sous réserve des droits éventuels à indemnité de son cocontractant).
À cet égard, les difficultés financières rencontrées par une personne publique peuvent constituer un motif d’intérêt général de nature à justifier la résiliation d’un contrat administratif.
L’impossibilité pour une commune d’assurer le financement de son projet constitue un motif d’intérêt général de nature à justifier la résiliation unilatérale d’un marché public. Il était notamment fait état de la situation des finances de la commune et de l’urgence pour cette dernière à prendre des mesures de redressements, de sorte qu’elle était fondée à accorder la priorité aux investissements présentant un caractère supportable pour les finances communales afin de ne pas obérer complètement sa capacité d’emprunt future.
→ CAA Toulouse, 17 octobre 2023, Société Philippe Descat, n° 21TL23381
Conditions de mise en œuvre d’un marché de conception-réalisation
Pour mémoire, il appartient à l’acheteur/maître d’ouvrage de justifier le recours à un marché de conception réalisation, en particulier en raison de l’existence de motifs techniques qui justifieraient qu’un tel marché global soit conclu (Article L. 2171-2 et R. 2171-1 du Code de la commande publique).
Dans cette affaire, la commune se limitait à exposer que le « pumptrack » (piste en boucle) devait permettre aux utilisateurs d’avancer sans relancer leur engin quel qu’il soit, qu’elle souhaite se démarquer des parcours existants, bénéficier d’une bonne coordination entre conception et réalisation, disposer d’un produit sûr et pérenne avec la meilleure utilisation possible des deniers publics ne se prévaut d’aucune contrainte technique au sens des dispositions précitées qui concernent des ouvrages confiés à des groupements d’entreprises et dont la particulière complexité technique exige d’associer l’entrepreneur aux études d’ouvrage.
Ces motifs ne suffisent pas à justifier le recours au marché de conception-réalisation.
Marché public et attestations fiscales et sociales
Par principe, le règlement de la consultation (RC) est obligatoire dans toutes ses dispositions.
Dans cette affaire, le RC prévoyait que l’attributaire pressenti devait remettre ses attestations fiscales et sociales dans un délai de 6 jours maximum. Cependant si l’attributaire avait remis ces attestations lors de la présentation de sa candidature, il les avait remis en retard à l’issue de l’attribution de son offre.
Dans ce contexte, le Conseil d’État considère le retard dans la remise de ces attestations est sans incidence sur la régularité de la procédure puisque l’acheteur a été mis à même auparavant, lors de la remise des candidatures, de s’assurer que le titulaire pressenti était à jour de ses obligations fiscales et sociales.
Aucune incidence sur le délai contentieux de la notification d’un décompte général d’un marché public
La notification d’un décompte général est dépourvue d’incidence sur le cours du délai de six mois, mentionné à l’article 50.32 du CCAG (1976), dont dispose le titulaire du marché, à compter de la notification de la décision prise sur les réclamations auxquelles a donné lieu le décompte général, pour saisir le tribunal administratif.
Point de départ du délai de remise des offres à un marché public
le retire au bureau de poste durant le délai de mise en instance de 15 jours, la date de notification de ce pli est celle de son retrait.
En cas de retour du pli à l’administration au terme de ce délai de 15 jours, la notification est réputée avoir été régulièrement accomplie à la date à laquelle ce pli a été présenté à l’adresse de l’intéressé, dès lors du moins qu’il résulte soit de mentions précises, claires et concordantes portées sur l’enveloppe, soit, à défaut, d’une attestation du service postal ou d’autres éléments de preuve, que le préposé a, conformément à la réglementation en vigueur, déposé un avis d’instance informant le destinataire que le pli était à sa disposition au bureau de poste.
Partant, la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en jugeant qu’il y avait lieu de se placer au jour de l’envoi aux candidats du pli recommandé avec avis de réception, contenant l’information du délai de remise des offres modifiées fixé par l’acheteur, pour apprécier le caractère suffisant de ce délai, alors que ce caractère doit s’apprécier en prenant en compte la date de notification de ce pli.

Par Laurent Bidault, Avocat Associé chez Novlaw Avocats, spécialisé en droit public, notamment en droit des contrats publics (marché public, concession) et en droit immobilier public (aménagement, urbanisme, construction). Il a également développé une expertise particulière en innovation publique (achat innovant, R&D).
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