Le droit de préemption est la faculté donnée à une collectivité territoriale (ou à un organisme dédié) d’acquérir par priorité, dans certaines zones préalablement définies, les biens faisant l’objet d’une aliénation, dans le but de réaliser des opérations d’intérêt général (Articles L.210-1 et suivant Code de l’urbanisme)

Le droit de préemption commercial est un outil à disposition des communes pour lutter contre la dévitalisation des centres villes et assurer le maintien des commerces de proximité (Articles L. 214-1 et suivants du Code de l’urbanisme).

La finalité de ce droit de préemption est donc le maintien ou la réintroduction de la diversité de l’activité économique de proximité.

Si vous souhaitez en savoir plus sur le droit de préemption urbain et sur le droit de préemption dans les ZAD nous vous invitons à consulter notre article à ce sujet.

Le droit de préemption commercial de la commune

Le droit de préemption commercial de la commune

Comment fonctionne le droit de préemption commercial ?

Pour qu’une commune puisse exercer son droit de préemption commercial sur un bien, il faut que les conditions suivantes soient remplies :

  • Le bien doit être situé dans une zone préalablement définie ;
  • Le bien doit pouvoir être préempté ;
  • Il doit y avoir un transfert de propriété du bien (aliénation) ;
  • Le changement de propriétaire du bien doit se faire à titre onéreux.

La définition du périmètre du droit de préemption commercial

Préalablement à l’exercice du droit de préemption, le conseil municipal doit avoir créé un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité, par une délibération.

Concrètement, il est impossible pour une commune d’exercer son droit de préemption commercial si le bien n’est pas situé dans un périmètre de sauvegarde du commerce et de l’artisanat de proximité préalablement défini ou si le périmètre du commerce et de l’artisanat de proximité n’a pas été régulièrement défini.

Qui est le titulaire du droit de préemption commercial ?

Le titulaire légal du droit de préemption commercial est la commune (Article L. 214-1 du code de l’urbanisme), et par une éventuelle délégation les EPCI, établissement public, SEM, concessionnaires.

Les titulaires du droit de préemption commercial peuvent s’appuyer sur le fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC) dont la mission est de financer des opérations destinées à favoriser la création, le maintien, la modernisation ou la transmission des entreprises de proximité destinées à la population locale.

Quels sont les biens concernés par le droit de préemption commercial ?

Les biens concernés par le droit de préemption commercial sont les biens incorporels aliénés à titre onéreux et faisant partie d’un fonds artisanal, d’un fonds de commerce ou d’un bail commercial, quelle que soit l’activité exercée.

Sont également concernés par le droit de préemption commercial, les biens corporels, aliénés à titre onéreux, de terrains portant des commerces ou destinés à porter des commerces dans un délai de cinq ans à compter de leur aliénation. Mais, à la condition que ces commerces soient des magasins de vente au détail ou des centres commerciaux (au sens de l’article L. 752-3 du code de commerce) et qui ont une surface de vente comprise entre 300 et 1 000 mètres carrés.

Seuls les terrains sont visés par le droit de préemption commercial, les autres immeubles, qui entrent dans le champ d’application du droit de préemption urbain, n’entrent pas dans celui droit de préemption commercial.

Sont donc exclus du droit de préemption commercial, les lots de copropriété, les volumes, les droits réels immobiliers, les droits indivis sur un terrain.

En cas de cession simultanée des murs et du fonds, l’acquisition des murs relève du droit de préemption urbain, et non pas du droit de préemption commercial.

Concernant la préemption du fonds de commerce d’un débit de boissons ou d’un restaurant, la préemption ne peut pas inclure la licence d’exploitation, notamment la licence IV, qui constitue un bien meuble non soumis au droit de préemption commercial.

Une aliénation à titre onéreux

L’aliénation à titre onéreux concerne tout transfert de propriété du bien (apport, vente, échange, etc.) et toute substitution de locataire équivalent à une cession de bail, faite à titre onéreux.

Cela implique l’exclusion des opérations gratuites comme les fusions, scissions et apports partiels d’actifs qui emportent une transmission, universelle, d’un patrimoine et non une transmission, à titre particulier, d’un bien.

Sont également exclues les cessions de biens concernant les entreprises en difficulté faisant l’objet d’un plan de sauvegarde ou d’un plan de cession d’entreprise au titre d’un redressement judiciaire ou d’une liquidation judiciaire.

Droit de préemption commercial et déclaration d’intention d’aliéner (DIA)

Avant la vente d’un fonds artisanal, d’un fonds de commerce ou la cession d’un bail commercial, qui est situé dans le périmètre de sauvegarde des commerces de proximité, le cédant doit adresser une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) à la commune, généralement par l’intermédiaire du notaire.

La déclaration d’intention d’aliéner prend la forme du formulaire cerfa n°13644*02.

Elle doit être adressée à la mairie en 4 exemplaires papier, via lettre recommandée avec accusé de réception ou via le dépôt en mairie contre récépissé.

Cette déclaration peut également être faite en un seul exemplaire par voie électronique. Un tel procédé ne s’avère pas satisfaisant, sauf à disposer d’un accusé de réception de la commune. A défaut, difficile d’apprécier si la déclaration d’intention d’aliéner a bien été reçue.

S’il y a eu une délégation du droit de préemption commercial, la déclaration d’intention d’aliéner doit également être faite auprès de la mairie (principe du guichet unique) et c’est au maire de communiquer la déclaration d’aliéner à la personne publique compétente.

La déclaration d’intention d’aliéner (DIA) doit préciser :

  • Le prix ;
  • Les conditions de la cession envisagée ;
  • L’activité de l’acquéreur pressenti ;
  • Le nombre de salariés du cédant et la nature de leur contrat de travail ;
  • Le chiffre d’affaires réalisé par le cédant ;
  • La copie du bail, s’il existe.

Cette déclaration d’intention d’aliéner est obligatoire.

Si elle n’a pas été effectuée, le titulaire du droit de préemption commercial pourra obtenir la nullité de la vente durant un délais de 5 ans, ainsi que l’engagement de la responsabilité du propriétaire pour faute.

Droit de préemption commercial et décision de préemption 

Le titulaire du droit de préemption commercial (généralement la commune) dispose de 2 mois pour exercer éventuellement le droit de préemption au profit de la commune, ou y renoncer.

Ce délai peut être suspendu en cas de visite de la commune ou de déclaration incomplète ou erronée du propriétaire.

Le droit de préemption commercial dispose de 3 choix :

  • Refuser d’exercer son droit, explicitement ou tacitement (le silence gardé durant 2 mois vaut renonciation). Dans ce cas la vente se réalise aux prix et conditions figurant dans sa déclaration ;
  • Préempter au prix prévu dans la déclaration. Dans ce cas, la commune fait acquisition du bien.
  • Préempter à un autre prix que celui prévu dans la déclaration. Dans ce cas, la commune fait acquisition à ce prix, sauf si le propriétaire demande la fixation du prix par le juge de l’expropriation.

La décision doit être motivée notamment par l’impératif de maintenir l’artisanat, le commerce de proximité ou un autre objectif poursuivi par la préemption.

En cas de désaccord sur le prix, il doit y avoir saisine du juge de l’expropriation par le titulaire du droit de préemption dans les 15 jours suivant la réponse du propriétaire. Si le titulaire ne s’exécute pas dans ce délai, il aura abandonné la préemption tacitement.

Finalité du droit de préemption commercial : la rétrocession du bien

Contrairement aux autres droits de préemption urbain, le bien préempté au titre du droit de préemption commercial n’intègre que temporairement le patrimoine de la personne publique.

La finalité de cette préemption est la rétrocession du bien, que ce soit un fonds ou un bail.

Dans un délai de 2 ans suivant la préemption, le titulaire (la commune) doit rétrocéder le bien à une entreprise immatriculée au RCS ou au répertoire des métiers, en vue d’une exploitation destinée à préserver la diversité et à promouvoir le développement de l’activité commerciale et artisanale dans le périmètre concerné.

Le titulaire devra établir un cahier des charges approuvé par délibération du conseil municipal, dont les clauses doivent permettre d’assurer le respect des objectifs de diversité de l’activité commerciale ou artisanale

Le titulaire doit assurer la publicité de l’avis de rétrocession par un affichage en mairie pendant 15 jours, incluant un appel à candidatures, une description du fonds, du bail ou du terrain, le prix proposé et la mention que le cahier des charges peut être consulté en mairie (Article R. 214-12 Code de l’urbanisme).

La rétrocession doit être autorisée par délibération du conseil municipal.

S’il s’agit d’un bail commercial, la rétrocession est subordonnée à l’accord préalable du bailleur, qui peut s’y opposer en saisissant le juge judiciaire (Article L. 214-2 Code de l’urbanisme).

S’il n’y a pas de rétrocession dans le délai de cinq ans, alors l’acquéreur évincé sera prioritaire pour acquérir le bien.