On sait qu’il n’est pas possible d’implanter une licence IV n’importe où. La loi définit en effet un certain nombre de zones protégées (terrain de sport, écoles, maison de retraite, etc.). Mais comment définir la distance réglementaire entre la zone protégée et l’établissement exploitant la licence IV ?

Nous revenons sur une série de conseils afin de comprendre au mieux le principe des zones protégées en matière de Licence IV et les règles de calcul des distances entre un débit de boisson et un établissement protégé.

Lorsqu’un exploitant désire ouvrir un débit de boissons à consommer sur place, c’est-à-dire titulaire d’une licence III ou IV, il devra être particulièrement attentif à l’emplacement géographique où il espère s’installer.

En effet, l’ouverture d’un débit de boissons est soumise au respect de zones protégées par arrêté préfectoral. Lorsqu’une zone est dite protégée, toute ouverture d’un débit de boissons à consommer sur place ainsi que tout transfert est ainsi interdit.

De ce fait, un exploitant désirant ouvrir un commerce servant de l’alcool à consommer sur place sera soumis à une double contrainte géographique : s’assurer du respect des quotas qui limitent le nombre d’établissements ayant le droit de s’installer dans la commune, mais  également s’assurer que l’emplacement choisi n’entre pas dans la limite d’une zone protégée par arrêté préfectoral.

Nous vous conseillons vivement de procéder à ces vérifications ou de prendre conseil auprès d’un avocat spécialiste en bail commercial avant de vous installer dans un nouveau local ou de procéder à une opération d’acquisition de fonds de commerce. Nos avocats sont disponibles pour vous assister.

Qu’est-ce qu’une zone protégée en matière de Licence III ou Licence IV ?

Le législateur a toujours estimé nécessaire de protéger certains édifices, et ainsi d’empêcher l’ouverture de débits de boissons à proximité.

L’article L. 3335-1 du Code de la santé publique énumère limitativement les édifices et établissements autour desquels le préfet a le pouvoir par voie d’arrêté d’établir un périmètre, nommé zone protégée, dans lequel il est interdit d’implanter un débit de boissons à consommer sur place.

Les zones protégées sont déterminées par arrêté préfectoral qui précise l’étendue de la zone de protection et la distance d’interdiction.

On compte parmi ces zones protégées :

  • le périmètre autour des établissements de santé, maisons de retraite et tous établissements publics ou privés de prévention, de cure et de soins comportant hospitalisation ainsi que les dispensaires départementaux ;
  • Le périmètre autour des établissements d’enseignement, de formation, d’hébergement collectif ou de loisirs de la jeunesse ;
  • Et le périmètre entourant les lieux d’exercice sportif tels les stades, gymnases, piscines, terrains de sport publics ou privés.

Il est alors strictement interdit de créer ou de transférer un commerce d’alcool dans de telles zones. Toutefois, un débit de boissons exploité dans un lieu qui serait devenu après sa création une zone protégée peut rester ouvert.

Dérogations strictes de ces zones protégées

Il existe toutefois des dérogations érigées par l’article L 3335-1 du Code de la santé publique. En effet, dans les communes où il existe un seul débit de boissons à consommer sur place, le préfet du département pourra en autoriser l’installation dans une zone protégée pour des nécessités touristiques ou d’animation locale, qui justifieraient ainsi cette dérogation.

Distance déterminée pour chaque département

Chaque département par le biais d’un arrêté préfectoral détermine pour son propre territoire la distance réglementaire autour de l’établissement protégé. 
Par exemple, dans le département des Hauts-de-Seine, il est interdit d’ouvrir un débit de boissons à consommer sur place des 3ème et 4ème catégories à moins de 75 mètres autour des édifices et établissements protégés.

Dans le département du Rhône, aucune ouverture ou transfert ne pourra intervenir dans un rayon de 75 mètres pour les communes de 501 à 5000 habitants et de 150 mètres dans les communes de plus de 5000 habitants.

Se pose alors la question de l’appréciation de ces distances. Comment sont-elles calculées en pratique ?

En effet, cette donnée est essentielle afin de s’assurer que votre futur débit de boissons n’entre pas dans le champ d’une zone protégée.

Pour comprendre comment la distance entre un débit de boissons et un établissement protégé se calcule, il convient de se référer aux dispositions de l’article L 3335-1 du Code de la santé publique.

Les alinéas 2 et 3 de l’article susmentionné disposent que « ces distances sont calculées selon la ligne droite au sol reliant les accès les plus rapprochés de l’établissement protégé et du débit de boissons. Dans ce calcul, la dénivellation en dessus et au-dessous du sol, selon que le débit est installé dans un édifice en hauteur ou dans une infrastructure en sous-sol, doit être prise en ligne de compte. L’intérieur des édifices et établissements en cause est compris dans les zones de protection ainsi déterminées. »

Il faut alors comprendre que la distance se calculera sur les voies de circulation ouvertes au public, en se fondant sur la porte d’entrée ou de sortie de l’établissement visé par la protection préfectorale et l’entrée ou la sortie du débit de boissons les plus rapprochées.

En effet, le Conseil d’Etat est venu apporter ces précisions quant à l’appréciation concrète de ces distances par un arrêt du 1 juillet 2019 de la 5ème et 6ème chambres réunies, (n° 419287).

Le Conseil d’État affirme ainsi que « la distance entre un établissement protégé et un débit de boissons se mesure sur les voies de circulation ouvertes au public, suivant l’axe de ces dernières, entre et à l’aplomb des portes d’entrée ou de sortie les plus rapprochées de l’établissement protégé et du débit de boissons, la distance obtenue étant augmentée de la longueur de la ligne droite au sol entre les portes d’accès et l’axe de la voie et, le cas échéant, de la différence de hauteur entre le niveau du sol et celui du débit de boissons. »

Portes d’entrée ou de sortie de l’établissement protégé

In fine, afin de calculer la distance conformément à la méthode décrite, il faudra déterminer l’entrée de l’établissement protégé ainsi que celle du débit de boissons. La règle suivie est celle de l’entrée matérielle, c’est-à-dire l’entrée effective offerte au public, sans obligation de donner sur la voie publique, étant précisé que la distance réglementaire doit être calculée, à partir de l’entrée et de la sortie de l’établissement protégé et du débit de boissons, mais non à partir d’une sortie de secours non utilisée. Dans l’hypothèse où l’un de ces établissements disposerait de plusieurs entrées, celles-ci devront toutes être prises en compte et faire l’objet du calcul réglementaire. Tel serait par exemple le cas d’une école primaire disposant de plusieurs entrées.

Il est à noter qu’en cas de litige, les juges prendront toujours en considération la notion de distance et non celle de commodité d’accès. Ceci implique de retenir la distance la plus courte.

Exemple

Prenons l’exemple d’un exploitant ayant ouvert un débit de boissons à consommer sur place de quatrième catégorie (Licence IV) à moins de trente mètres d’un hôpital, dans une commune où l’arrêté préfectoral interdit toute installation dans une zone de 75 mètres. Cet exploitant fait alors valoir qu’un piéton qui voudrait relier la porte de l’hôpital à la porte du débit de boissons en empruntant les trottoirs et les passages protégés, parcourra en réalité plus de 75 mètres. Or, les deux bâtiments, situés dans une même rue, sont séparés sur l’axe de cette voie par moins de 75 mètres en prenant en considération les points situés à l’aplomb respectivement de la porte d’accès et de sortie de chacun de ses deux bâtiments.

Il est admis par la jurisprudence que « la nécessité pour un piéton d’emprunter les trottoirs et les passages protégés n’entre pas en ligne de compte pour la détermination de la zone de protection » (CA Aix-en-Provence, 5 septembre 2007, n° 2207/507). Seule la distance la plus courte devra être prise en considération, en suivant l’axe des voies ouvertes à la circulation entre l’aplomb des portes d’accès et de sortie les plus rapprochées de l’établissement faisant l’objet d’une protection et du débit de boissons.

Il vous restera à consulter l’arrêté préfectoral pour connaitre la distance à respecter et à appliquer celle-ci conformément au mode de calcul susvisé.

Un débit de boissons à consommer sur place qui s’installerait malgré l’interdiction serait alors sanctionné par une amende d’un montant de 3750 euros. La fermeture de l’établissement peut également être prononcée par jugement.

Il doit de nouveau être rappelé que tout débit de boissons à consommer sur place régulièrement installé avant la création d’une zone protégée n’est pas concerné par cette réglementation. Il ne pourra faire l’objet d’aucune sanction à ce titre et pourra poursuivre son exploitation.

Maître Baptiste Robelin, avocat spécialisé en restauration, est également formateur pour le Permis d’Exploitation obligatoire pour les Licences, dans le cadre des formations délivrées par la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Paris Île-de-France.

Baptiste ROBELIN est spécialisé en droit commercial, droit des contrats et nouvelles technologies, et droit immobilier des affaires (cessions de fonds de commerce, baux commerciaux, rachat à la barre du tribunal, etc…).

Maitre Baptiste Robelin - Novlaw Avocats Paris-Lyon

distance entre une licence 4 et une zone protégée

distance entre une licence 4 et une zone protégée